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Mineurs revenus de Syrie et d'Irak : le nouveau fichier créé est "indigne d'un pays comme le nôtre", dénonce l'avocate Marie Dosé

Après la création d'un nouveau fichier pour "mineurs de retour de zones d'opérations de groupements terroristes", l'avocate Marie Dosé ne cache pas sa colère.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
L'avocate Marie Dosé (THOMAS SAMSON / AFP)

"C'est indigne d'un pays comme le nôtre", a dénoncé ce lundi sur franceinfo Marie Dosé, avocate de familles de femmes et d'enfants retenus dans les camps du nord-est syrien, à propos du décret gouvernemental créant un fichier devant permettre une "meilleure coordination" de la prise en charge des mineurs français revenus d'Irak et de Syrie. "Je ne peux que le dénoncer", a-t-elle ajouté, estimant y voir "une forme de stigmatisation" pour ces enfants qui "ne sont que des victimes".

Franceinfo : Dénoncez-vous la mise en place de ce fichier ?

Marie Dosé : "Je ne peux que le dénoncer. Je suis même extrêmement choquée que la France fasse le choix de ficher des enfants qu'elle a laissé périr, qu'elle a abandonnés dans des prisons à ciel ouvert pendant plus de quatre ans. La France a été condamnée à trois reprises pour l'abandon de ces enfants. Elle leur fait maintenant le cadeau de les ficher après ces quatre années d'enfer vécues en Syrie. Aucun fichage d'enfant ne peut répondre à un impératif de protection. Il s'agit en réalité de les stigmatiser un peu plus".

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Vous y voyez une forme de présomption visant ces enfants ?

"Non, j'y vois une forme de stigmatisation, comme si la France n'avait pas assez stigmatisé ces enfants en refusant leur protection et en les faisant payer le prix de la faute de leurs parents. Je suis vraiment profondément outrée et j'ai saisi le Défenseur des droits. Nous sommes plusieurs à envisager un recours contre ce décret pour essayer d'en obtenir l'annulation. Tout ceci a des relents du fichier des mineurs isolés qui avait été mis en place il y a quelques années. C'est indigne d'un pays comme le nôtre".

L'argument de l'amélioration de la prise en charge ne tient pas selon vous ?

"Nous suivons de très près la prise en charge. Mon cabinet est saisi concernant une cinquantaine d'enfants. Je peux vous assurer que cette prise en charge a besoin d'être améliorée mais qu'elle a besoin de tout sauf d'un fichier. Ce n'est pas la priorité et c'est même contreproductif. Nous avons besoin d'éducateurs, de rapprocher ces enfants de leurs familles. Ce n'est pas en fichant ces enfants que la prise en charge sera bénéfique, vraiment pas".

Comment se passent ces retours ?

"Ils se passent du mieux possible. L'important est surtout de faire sortir ces enfants de l'enfer des camps. La prise en charge est perfectible. Il faut impérativement que les enfants soient emmenés plus souvent en détention pour que le lien avec leurs mamans ne soit pas brutalisé par une séparation difficile à supporter. Je rappelle que ces enfants ne sont que des victimes. Dans ce cas-là, pourquoi ne pas ficher les enfants de réfugiés politiques qui ont vécu eux aussi en zones de guerre et qui ont été exposés aux pires des traumatismes ? Quel est ce pays qui met en place des fichiers d'enfants victimes ?"

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