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Pas facile d'être supporter russe aux Jeux de Rio : "Les sifflets ? On a l'habitude !"

Depuis la cérémonie d'ouverture, affaire de dopage oblige, les athlètes russes sont régulièrement hués par le public brésilien. Forcément, leurs (rares) supporters à Rio ont le vague à l'âme.

Article rédigé par Pierre Godon - Envoyé spécial à Rio de Janeiro (Brésil),
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des supporters russes dans le parc olympique de Rio de Janeiro (Brésil), le 8 août 2016. (PIERRE GODON / FRANCETV INFO)

Il faut être un peu masochiste pour traverser la moitié de la planète en sachant qu'on va finalement se faire siffler. C'est le dur lot des supporters russes aux Jeux olympiques de Rio (Brésil), qui ont essuyé un accueil mitigé lors de la cérémonie d'ouverture, subi les sifflets contre certains de leurs nageurs et vu le public brésilien se retourner régulièrement contre eux dans les sports collectifs. Sachant qu'en deuxième semaine, ils seront privés de toutes les compétitions d'athlétisme...

Prenez le France-Russie de handball féminin, lundi 8 août. La salle, aux deux tiers vide, compte une centaine de Français, et une douzaine de Russes. Le public brésilien observe d'abord une timide neutralité. On entend surtout l'entraîneur russe vociférer au bord du terrain. Mais d'un coup, alors que la Russie creuse l'écart, la salle prend fait et cause pour les Bleues. Sifflets à chaque décision défavorable de l'arbitre, huées sur les tirs russes, acclamations à chaque but français... Comme si la Seleçao brésilienne évoluait sur le parquet ! "On a l'habitude", soupire l'un des supporters russes, un drapeau sur les épaules. Avant de tourner les talons pour fêter la victoire (26-25) avec ses camarades, il lance : "Vous avez vu comment les médias nous traitent ?"

Selfies et interviews

Mal-aimés, les Russes ? Les athlètes, pour certains. Leurs supporters, eux, ont la cote. Olga et ses trois amis, bonnets et survêtements aux couleurs de leur pays, ne peuvent pas marcher cinq mètres dans le parc olympique sans être interrompus pour un selfie. "L'atmosphère est fantastique ici", s'enthousiasme la jeune femme, venue encourager les escrimeurs russes. On lui demande pourquoi il n'y a presque pas de supporters de son pays. "C'est toujours un peu comme ça, c'est très loin, vous savez." Elle a à peine fini sa phrase qu'une télé brésilienne l'interpelle pour une interview. 

Il faut dire que les supporters russes ne se bousculent pas sur le site principal des Jeux de Rio. Quand vous croisez un supporter portant un drapeau avec des bandes horizontales rouge, bleue et blanche, il y a plus de chances que ce soit un Néerlandais. "On m'a déjà demandé plusieurs fois si j'étais russe. Je n'en ai pratiquement pas vu", sourit Dirk, installé sur la grande aire de pique-nique en plein cœur du parc olympique.

La crise a fait plus de dégâts que le CIO

Les Bataves sont venus en nombre jusqu'au Brésil, forts de l'espoir de battre leur record de médailles, comme le prédisent les agences de statistiques. Pour les Russes, c'est plutôt le contraire : une bérézina digne de la débâcle d'Atlanta (63 médailles, pire total depuis un demi-siècle) les attend. Du coup, leurs supporters se font plutôt rares. Y compris au sein du Club Russie, à Copacabana, où l'on trouve surtout des Brésiliens, des Italiens, des Colombiens et même... des Américains. Et à en croire la carte que chaque visiteur est invité à poinçonner avec un petit drapeau, les supporters russes ne dépassent pas la centaine.

Alexandr, supporter russe, au parc olympique de Rio de Janeiro (Brésil), le 9 août 2016. (PIERRE GODON / FRANCETV INFO)

"Je ne pense pas que les Russes soient moins nombreux en raison des sanctions sportives", tempère Alexandr, venu encourager les nageurs russes dans la piscine olympique. Son petit drapeau demeure modeste, à côté des dizaines de bannières étoilées américaines, celles des supporters venus fêter les triomphes de Michael Phelps ou Katie Ledecky. "Il fallait acheter les tickets et réserver les hôtels plus d'un an à l'avance, poursuit-il. Même s'ils avaient eu des places pour l'athlétisme, ils seraient venus. La vraie raison, c'est la crise économique qui frappe le pays depuis plusieurs années. Après, numériquement, comme il y a moins d'athlètes, il y a moins de familles. C'est probablement pour ça qu'on a l'impression qu'il y a peu de supporters russes."

Les vieux clichés ont en tout cas la vie dure. Juste avant la finale du sabre féminin 100% russe entre Sofia Velikaya et Yana Egorian, la sono a craché le thème musical de Dark Vador. Comme si, dans l'inconscient collectif, la Russie était encore un peu l'empire du mal.

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