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Questions autour d'un bras de fer entre Paris et Téhéran

Désormais en route pour Paris, Clotilde Reiss va retrouver sa famille aujourd'hui et être reçue à l'Elysée. Restent les questions autour de cette affaire, plus de dix mois de négociations pour obtenir cette libération.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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  (Radio France ©REUTERS)
  • Pourquoi l'Iran avait-t-il décidé de juger une jeune Française?

    Première hypothèse : il s'agissait d'envoyer un message clair aux pays étrangers pour éviter toute ingérence après les importantes manifestations qui secouent le régime depuis juin 2009 et la réélection contestée du président iranien Mahmoud Ahmadinejad.

    Deuxième hypothèse : c'était un moyen de pression, alors que le Conseil de sécurité de l'ONU dont fait partie la France venait de se prononcer sur de nouvelles sanctions contre la Corée du Nord et que se posait la question d'un durcissement des sanctions à l'égard de Téhéran.

    Troisième possibilité : l'Iran avait déjà plusieurs échanges possibles en tête. Comme la libération d'Ali Vakili Rad, emprisonné en France depuis 1991 pour avoir assassiné à Paris l'ancien Premier ministre iranien Chapour Bakhtiar. Or, ce dernier, condamné à perpétuité, a purgé sa peine incompressible de 18 ans de prison et a fait une demande de remise en liberté conditionnelle cet été. “Vous devez savoir qu’il y a quelques Iraniens qui sont en prison en France depuis des années. Malheureusement nous n’avons vu aucune action du gouvernement français en faveur de ces prisonniers”, avait ainsi déclaré Mahmoud Ahmadinejad dans une interview diffusée sur France 2 en septembre dernier.

    -Pourquoi cette libération intervient-elle maintenant ?

    Peut-être parce que le 5 mai dernier le tribunal de Paris a refusé d'extrader vers les Etats-Unis l'Iranien Majid Kakavand. Ce dernier était accusé de ne pas avoir respecté les sanctions contre l'Iran en fournissant illégalement à son pays des composants pouvant avoir des applications militaires. Par ailleurs, la justice française doit justement se prononcer dans les prochains jours sur la libération conditionnelle éventuelle d'Ali Vakili Rad.

    • Le Sénégal a-t-il joué un rôle?

    Selon un long communiqué de la présidence de la République du Sénégal, la libération de Clotilde Reiss est
    “consécutive à une médiation entreprise par le chef de l'Etat Sénégalais depuis
    septembre 2009”. Toujours selon Dakar, c'est par l'intermédiaire du gouvernement sénégalais que le gouvernement iranien aurait informé la France de la décision de libérer Clotilde Reiss.
    Faute de pouvoir joindre son homologue français Nicolas Sarkozy mardi soir, Abdoulaye Wade a annoncé la nouvelle au secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant. Ce vendredi, des ministres Madické Niang et Karim Wade (fils du président sénégalais) auraient participé à Téhéran aux "derniers réglages de la libération".

    • Que cache l'amende payée par l'avocat de Clotilde Reiss ?

    “La cour a condamné Mlle Reiss à une amende de 300 millions de tomans (245.000 euros) que j’ai payée ce matin””, a déclaré hier Mohammad Ali Mahdavi-Sabet, l'avocat de Clotilde Reiss. Amende ou rançon ? La question mérite d'être posée. D'autant qu'on voit mal un avocat avancer une telle somme sans garantie de remboursement. D'autant que cette somme correspond presque à la caution de 213 000 euros versés cet été pour sortir de prison la jeune Française de 24 ans. Même si, théoriquement, la caution pourrait être rendue à la France.

    Jean-Louis Dell'Oro

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