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En images Les sites du patrimoine syrien et irakien détruits ou menacés par l'Etat islamique

Les jihadistes menacent d'anéantir Palmyre, peut-être le plus beau site antique syrien. Et ce n'est pas le seul site remarquable ou classé par l'Unesco à se retrouver dans le collimateur de l'EI, en Irak et en Syrie.

Article rédigé par Gaël Cogné
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7 min
L'antique cité de Palmyre, en Syrie, le 14 mars 2014. (JOSEPH EID / AFP)

Il faut "protéger Palmyre et tout mettre en œuvre pour empêcher sa destruction". La directrice générale de l'Unesco, Irina Bokova, est inquiète. L'organisation Etat islamique (EI) n'est plus qu'à un kilomètre de l'antique Palmyre, en Syrie, classé au patrimoine mondial de l'Unesco, vendredi 15 mai.

Personne ne semble être en mesure d'arrêter les jihadistes et, au fur et à mesure de leurs prises, ils s'en prennent au patrimoine. Quand ils ne peuvent revendre les œuvres d'art trop volumineuses, ils les détruisent. Retour en images sur plusieurs sites détruits ou menacés.

 

Détruit : le tombeau du prophète Jonas

Le tombeau de Jonas, à Mossoul (Irak), le 19 juillet 2014. (AP /SIPA  )
 

Les décombres du tombeau de Jonas, à Mossoul (Irak), le 24 juillet 2014. (  REUTERS)

Ce qu'il s'est passé. A Mossoul, en Irak, en juillet 2014, les jihadistes de l'EI ont détruit le tombeau du prophète Jonas, sur lequel était bâtie une mosquée. Les islamistes ont demandé à tout le monde de sortir, avant de faire exploser les lieux, comme le montre une vidéo. D'après le Guardian (en anglais), des habitants ont rapporté que l'EI considérait que c'était un lieu d'apostasie et non de prière.

Pourquoi ce tombeau était remarquable. La mosquée était bâtie sur un tombeau datant du VIIIe siècle avant J.-C. Ce dernier était réputé contenir la dépouille du prophète Jonas. Dans le Coran comme dans la Bible, Jonas est avalé par une baleine. La mosquée avait été rénovée dans les années 1990 et des fidèles venaient du monde entier s'y recueillir.

Détruits : Ninive et le musée de Mossoul

Une sculpture du site de Ninive, près de Mossoul, en Irak, le 8 avril 2014. (DEA / C. SAPPA / DE AGOSTINI EDITORIAL / GETTY IMAGES)

Capture d'écran d'une vidéo de propagande de l'EI montrant un homme détruisant une sculpture assyrienne, au musée de Mossoul, en Irak. La vidéo a été diffusée le 26 février 2015. (AP / SIPA)

Ce qu'il s'est passé. En février 2015, l'EI a mis en ligne une vidéo de propagande montrant des jihadistes réduisant en miettes des statues, frises et autres trésors pré-islamiques. Les scènes, vraisemblablement tournées en 2014, se déroulaient à Mossoul, la grande ville irakienne contrôlée par l'EI, et sur le site de Ninive, tout proche. Par chance, au musée de Mossoul, les jihadistes ont surtout détruit des copies.

Pourquoi ce taureau ailé était remarquable. Ces deux photos montrent un imposant taureau ailé assyrien en granit qui gardait la porte de Nergal, à Ninive. Ninive était la capitale de l’Empire néo-assyrien (dès le VIIe siècle avant J.-C.). Une réplique est exposée au British museum de Londres. La destruction de ce taureau à visage humain a été comparée à celle des bouddhas de Bamiyan par les talibans afghans en 2001. 

Détruites : les ruines de Nimroud

Un palais à Nimroud, en Irak, photographié en 1977. (HERITAGE IMAGES / HULTON ARCHIVE)

Capture d'écran d'une vidéo de l'Etat islamique montrant la destruction du site de Nimroud, en Irak, le 11 avril 2015. ( AP / SIPA )

Ce qu'il s'est passé. A Nimroud, les jihadistes se sont acharnés. L'EI a publié, le 11 avril, une vidéo montrant des combattants détruisant des œuvres d'art dans la cité antique assyrienne, avant de faire exploser le site. Sur les images, des hommes détruisent à la hache bas-reliefs et statues. Puis ils amassent des barils remplis de poudre dans une pièce dont les murs faits de plaques de gypse sont magnifiquement sculptés de représentations des divinités assyriennes. Selon les images, non datées, Nimroud, située à une trentaine de kilomètres au sud-est de Mossoul, sur les rives du Tigre, au nord de l'Irak, a été complètement rasée. Dans la vidéo, un jihadiste dénonce "l'idolâtrie".

Pourquoi ces ruines étaient remarquables. Nimroud, une cité fondée au XIIIe siècle avant J.-C., était l'une des villes phares de l'empire assyrien, dont elle a été la capitale au IXe siècle avant J.-C. S'étendant sur 360 hectares et cernée d'un mur de briques de 13 kilomètres, elle était devenue l'un des sites archéologiques les plus célèbres d'Irak. En 1988, plus de 600 bijoux, décorations et pierres précieuses, y avaient été exhumés, ce qui est considéré comme l'une des plus importantes découvertes archéologiques du XXe siècle. 

Détruite : la cité de Hatra

Le site de Hatra, en Irak, le 27 juillet 2005. (ANTONIO CASTANEDA / AP / SIPA)
 

Capture d'écran d'une vidéo de propagande de l'Etat islamique, à Hatra, en Irak. ( AP / SIPA )

Ce qu'il s'est passé. L'Unesco a dénoncé le saccage de la cité d'Hatra, à une soixantaine de kilomètres au sud-ouest de Mossoul, en Irak, en mars. Un mois plus tard, une vidéo est venue le confirmer. Sur les images, on voit des jihadistes arracher des sculptures murales, les viser au fusil d'assaut et endommager une statue à coups de pioche. "L'Etat islamique nous a envoyés pour détruire ces idoles parce qu'elles sont vénérées à la place de Dieu", explique l'un des deux insurgés s'exprimant dans la vidéo. Les pièces montrées sur les images sont cependant constituées de tiges métalliques, indiquant qu'il pourrait s'agir d'antiquités qui ont été restaurées ou de répliques plus récentes.

Pourquoi cette cité est remarquable. S'étalant sur 324 hectares, Hatra est une cité antique vieille de 2000 ans. Elle a été le premier site irakien a être classé au patrimoine mondial de l'Unesco. La ville fortifiée mêle architectures orientale et occidentale. Elle était particulièrement bien conservée. "Hatra est une cité magnifique des franges du désert, au carrefour des routes caravanières", témoignait auprès du Monde Béatrice André-Salvini, conservatrice en chef du patrimoine : "Les vestiges de Hatra [Ier siècle av. J.-C. – Ier siècle ap. J.-C.] en pierre de taille, sur des hauteurs considérables, sont uniques dans la région. Certains grands temples mesurent plus de 15 mètres de haut."

Menacé : le joyau syrien de Palmyre

 
L'antique cité de Palmyre, en Syrie, le 14 mars 2014. (JOSEPH EID / AFP)
 
Ce qu'il s'y passe. Palmyre pourrait bien être la suivante sur la liste de l'Etat islamique. L'oasis qui abrite la perle antique du désert syrien a été placée sur la liste du patrimoine en péril de l'Unesco. Les jihadistes de l'EI se trouvent désormais à un kilomètre du site. Sur le terrain, l'armée syrienne a dépêché des renforts.
 
Pourquoi cette cité est remarquable. C'est avec la conquête romaine, à partir du Ier siècle avant J.-C. et durant quatre siècles, que Palmyre (Cité des palmiers) a connu un essor remarquable. Ce fut une ville luxueuse et luxuriante en plein désert grâce au commerce d'épices et de parfums, de la soie et de l'ivoire venus de l'Asie, et des statues et du travail du verre de Phénicie, venus de l'ouest. Au IIIe siècle, profitant des difficultés de l'empire romain, la ville s'érige en royaume qui défie les Perses. La cité est réputée pour ses colonnades torsadées romaines, ses temples, ses tours funéraires, vestiges d'un brillant passé. C'était un haut lieu touristique syrien avant la guerre. 

Menacé : le minaret de Samarra

 
Le minaret de la mosquée de Samarra, en Irak. (  REUTERS)
  
Ce qu'il s'y passe. En juin 2014, des combats se sont déroulés dans la ville de Samarra, en Irak, à 130 km au nord de Bagdad, lorsque l'Etat islamique s'est emparé de la région. L'Unesco a alors placé la ville, célèbre pour son minaret, sur la liste du patrimoine en péril.

Pourquoi cette ville est remarquable. Comme le rappelle l'Unesco, Samarra a été le "siège d’une puissante capitale islamique qui régna sur les provinces de l’Empire abbasside, qui s’étendit pendant un siècle de la Tunisie à l’Asie centrale". C'est un site immense qui "s'étend sur 41,5 km du nord au sud pour une largeur qui varie entre 4 et 8 km". Le monument le plus célèbre est un minaret en spirale, datant du IXe siècle. Selon l'Unesco, "80 % de la ville reste à mettre au jour".

Menacées : les ruines d'Assour

 
Une rare photo du site d'Assour, en Irak, prise en 2008 par des soldats américains. (STAFF SGT. JOANN S. MAKINANO / DIGITAL)
 
Ce qu'il s'y passe. Comme Samarra, Assour se trouve dans une zone d'affrontement entre l'EI et les troupes irakiennes. Les archéologues redoutent que les ruines de la ville soient la cible de destructions, selon RFI.
 
Pourquoi ces ruines sont remarquables. La ville a été la première capitale de l’Empire assyrien du XIVe au IXe siècle avant J.-C. Selon l'Unesco"elle fut une ville-Etat et un carrefour commercial international. Elle fut aussi la capitale religieuse des Assyriens, associée au dieu Assour. La ville fut détruite par les Babyloniens, mais renaquit de ses cendres à l'époque parthe, aux Ier et IIe siècles."

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