Le président syrien Bachar Al Assad a imputé mercredi la responsabilité des protestations à des "conspirateurs"
Contrairement à ce qui était attendu, il n'a pas annoncé la levée de l'état d'urgence, en vigueur dans tout le pays depuis 1963.
Cette première intervention publique du chef de l'Etat depuis le début du mouvement de contestation en Syrie le 15 mars a profondément déçu les protestataires qui ont annoncé la poursuite des manifestations.
Ils attendaient en effet, lors de ce discours devant le Parlement, l'annonce de la fin de l'état d'urgence, en vigueur depuis près d'un demi-siècle, et de nouvelles lois sur les médias et le pluralisme politique.
Mais le président n'a annoncé aucune réforme de libéralisation pour calmer la contestation, sans précédent depuis son arrivée au pouvoir en 2000.
"Nous sommes totalement favorables à des réformes (...) Mais nous ne sommes pas favorables à des dissensions", s'est-il contenté de dire, avant d'indiquer que la lutte contre la corruption et le chômage était une "priorité" du prochain gouvernement. Le cabinet dirigé depuis 2003 par Mohammad Naji Otri avait démissionné mardi.
Sa principale conseillère Boussaïna Chaabane avait pourtant indiqué dimanche que la décision d'abroger l'état d'urgence avait été prise.
En vigueur depuis la prise de pouvoir par le parti Baas en 1963, l'état d'urgence impose des restrictions sur la liberté de réunion et de déplacement, et permet l'arrestation de "suspects ou de personnes menaçant la sécurité". Il autorise aussi la surveillance des communications et le contrôle préalable des médias.
"Je sais que les Syriens attendent ce discours depuis la semaine dernière, mais je voulais attendre d'avoir une image complète de la situation (...) afin d'éviter de tenir des propos émotionnels qui auraient peut-être apaisé les gens, mais n'auraient pas eu d'effet concret au moment où nos ennemis visent la Syrie" s'est justifié le président syrien.
Ses propos ont été accueillis par des ovations des députés qui ont scandé "par notre sang, par notre âme, nous nous sacrifierons pour toi Bachar".
Douche froide pour les contestataires
En revanche, pour les contestataires, ce discours a été une douche froide. "Les manifestations vont continuer. Nous avons demandé des changements, notre liberté, la démocratie. Rien n'a changé et maintenant nous n'avons d'autre choix que de descendre dans la rue", a déclaré à l'AFP Haitham Maleh, un avocat, emprisonné en octobre 2009 et libéré la semaine dernière.
Nadim Houry, un chercheur à Human Rights Watch, a qualifié le discours de "terriblement décevant".
Des dizaines de personnes ont été tuées et des dizaines d'autres arrêtées dans le pays depuis le 15 mars selon des militants des droits de l'Homme.
Après des violences ce week-end, le principal port du pays, Lattaquié, était de nouveau mercredi le théâtre de troubles.
Critiques de l'Occident
Le discours du président syrien Bachar Al Assad était "très général", a regretté mercredi soir le chef de la diplomatie, Alain Juppé. "Je ne suis pas sûr qu'il réponde véritablement aux attentes et je dirais même à la colère du peuple syrien. Il faut aujourd'hui des propositions concrètes pour répondre aux aspirations de ce peuple", a déclaré le ministre à France 3.
Même constat à Washington. Le discours du président syrien "n'a pas été à la hauteur des réformes" que les Syriens "exigent", a commenté le porte-parole de la diplomatie américaine, Mark Toner.
"Il est clair qu'il n'y avait guère de substance", a poursuivi Mark Toner, estimant que les Syriens seraient "déçus".
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