Israël : les difficultés des citoyens arabes de l'Etat hébreu à participer aux manifestations contre la guerre à Gaza

Les Arabes israéliens sont les grands absents des manifestations qui se tiennent pourtant toutes les semaines en Israël pour le retour des otages et contre le conflit à Gaza.
Article rédigé par Farida Nouar - Fabien Gosset
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Une manifestation à Tel Aviv, le 11 mai 2024, pour réclamer la libération des otages et la démission du premier ministre Benjamin Netanyahu. (JACK GUEZ / AFP)

Les Arabes israéliens peuvent-ils manifester leur opposition à la guerre ? Peuvent-ils dire qu’ils sont solidaires avec Gaza ? Comme tous les samedis depuis le 7 octobre, des manifestations sont prévues à Jérusalem ou encore à Tel-Aviv pour le retour des otages et l’arrêt du conflit. Mais dans ces rassemblements, les Arabes israéliens sont inexistants et les autorisations pour organiser des manifestations dans les villes arabes sont très difficiles à obtenir auprès de la police.

Haïfa, dans le nord du pays, est une ville symbole de la coexistence entre les deux peuples. Akram, rencontré dans un bureau de tabac, l’assure : il est libre de manifester pour le retour des otages et contre le gouvernement. "Il y a tout le temps des manifestations sur cette place ou dans la rue Ben Gourion pour le cessez-le-feu, la paix, le retour des otages. La police veille sur l’ordre et il n’y a jamais eu de problème", assure-t-il. Libres de s’exprimer sur le conflit, c’est ce que confirme aussi un  vendeur de fruits et légumes qui ne souhaite pourtant pas parler de ce sujet au micro de franceinfo.

Peur des conséquences

Mais ce sentiment de liberté, Mohamed, âgé d'une vingtaine d'années et attablé à une sandwicherie dans la même rue, ne le partage pas. "Ils ne vont pas vous dire que ça ne va pas, parce qu’ils ont peur", assure le jeune homme. Lui ne participe à aucun rassemblement.

"On ne manifeste pas car cela va nous créer des problèmes."

Mohamed, un habitant d'Haïfa

à franceinfo

"Si on se fait arrêter ça peut avoir des conséquences sur nos études, ou si on fait un prêt immobilier. Et on ne sera pas libéré facilement, alors qu’un juif le sera. Les Arabes sont opposés à la guerre mais ce n’est pas quelque chose que l’on va dire en public ou dans les rues. On se sert plutôt des réseaux sociaux. C’est là que j’exprime mon opposition. Je like, Je partage des contenus", confie Mohamed.

En octobre dernier, après une manifestation non autorisée en soutien à Gaza, le chef de la police israélienne Kobi Shabtai avait menacé les Arabes israéliens de "leur mettre des bus à disposition s’ils veulent retourner à Gaza".  "Des gens ont été arrêtés, ils ont été poursuivis parce qu’ils ont manifesté, donc ils ont appris la leçon et ne sortent plus", lance un homme avant de s’éclipser dans un restaurant. Isaak est le propriétaire de l’établissement. "Moi c’est d’abord parce que je suis très occupé, mais c'est aussi parce que je ne veux pas qu’on me voit dans des manifestations. Je reçois tout le monde, je respecte tout le monde. Je ne peux pas prendre position", confie le restaurateur.

"De toute façon, de ce que je vois dans les manifestations, la police ne fait pas de distinction entre un juif ou un Arabe. Elle arrête tout le monde, elle frappe tout le monde."

Isaak, restaurateur à Haïfa

à franceinfo

Malheureusement, c’est ça la police que l’on a maintenant. Elle se comporte avec tous les citoyens de la même façon. Mais c'est vrai que généralement il y a un peu plus de violence envers les Arabes", témoigne-t-il. 

L’ONG Mossawa  "égalité" en arabe  constate pour sa part une hausse des "discriminations systémiques" à l’égard des citoyens arabes d’Israël depuis la guerre, comme les arrestations ou encore les agressions.

Les Arabes israéliens et les manifestations contre la guerre à Gaza : reportage de Farida Nouar et Fabien Gosset

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