Cet article date de plus de treize ans.

Egypte : Moubarak reste

Démentant les rumeurs de démissions qui circulaient depuis la fin de l'après-midi au Caire, le président égyptien Hosni Moubarak a expliqué qu'il resterait à son poste jusqu'aux élections de septembre. En attendant, il transfère l'ensemble de ses pouvoirs au vice-président, Omar Souleimane. Place Tahrir, où sont réunis des centaines de milliers de manifestants, l'abattement cède la place à la colère.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Radio France © France Info)

C'est la douche froide sur la place Tahrir. Les manifestants y ont cru. Depuis la fin de l'après-midi, les signes avant-coureurs d'une démission du président Hosni Moubarak se multipliaient : de l'armée venue annoncer que les occupants de la place seraient “satisfaits”, à la CIA, qui jugeait le départ de Moubarak “probable”. Mais le raïs a pris tout le monde à contre-pied, dans une sorte de “je vous ai compris”, version 2011.

Dans une allocution enregistrée, diffusée par les soins des militaires, le président explique qu'il compte “endosser ses responsabilités” jusqu'à la tenue d'élections “libres et démocratiques” en septembre. Il répète qu'il ne briguera pas de nouveau mandat. Il assure que les demandes du peuple sont “légitimes”, et promet que les réformes promises auront bien lieu. Il annonce une réforme constitutionnelle. Il promet que les responsables des crimes qui ont ensanglanté le pays durant les 17 jours de protestation seront punis et il présente ses excuses aux familles des victimes. Mais pas de démission.

Hosni Moubarak a annoncé qu'il transférait son pouvoir au vice-président, Omar Souleimane, sans préciser exactement ce qu'il entendait par là. Ne sera-t-il plus qu'un président honorifique, à l'allemande, ou continuera-t-il à tirer les fils de la politique ? La répartition des pouvoirs n'est pas claire.
_ Hosni Moubarak jure aussi qu'il n'obéirait pas à des injonctions de l'étranger, visant les Etats-Unis et les pays européens, et aussi la presse étrangère, notamment la chaîne de télévision qatarie Al Jezira.

La situation est d'autant plus embrouillée que l'attitude de l'armée laissait penser qu'elle avait récupérer l'essentiel du pouvoir : outre leurs promesses à demi-mot, les militaires ont tenu un haut conseil sans le président, ni le vice-président, un acte quasi-révolutionnaire en soi. L'armée soutient-elle le processus piloté par le raïs, ou y-a-t-il un bras de fer en coulisses entre civils et militaires ? Là encore, c'est l'incertitude.

Ce qui est sûr en revanche, c'est la colère des manifestants de la place Tahrir. D'abord abasourdis par la nouvelle qui les a totalement surpris, ils ont ensuite laissé éclater leur colère. Ils ont brandi des chaussures vers le ciel en criant “démission ! Démission !”. Certains se seraient mis en marche vers le ministère de l'Intérieur.

Que vont faire les partisans du régime, qui étaient sortis du bois au soir du précédent discours du raïs, et avaient déchaîné la violence dans les rues du Caire ? Que va faire l'armée, qui avait annoncé qu'elle n'accepterait pas la contestation de la transmission des pouvoirs au vice-président ? Que va faire l'opposition ? Tout le monde retient son souffle en Egypte en attendant le prochain épisode d'une crise dont les développements ont, jusqu'ici, surpris tout le monde, étrangers comme Egyptiens. Le vice-président, Omar Souleimane, a pris la parole après Hosni Moubarak. Il promet le dialogue et demande aux manifestants de rentrer chez eux. Il est peu probable qu'il soit écouté.

Grégoire Lecalot

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.