Prise d'otages au Kenya : les zones d'ombre
"A partir de demain ( aujourd'hui), j'ai demandé au ministère de l'Intérieur de tenir les Kényans informés des progrès de l'enquête ", expliquait le président du Kenya, Uhuru Kenyatta, au moment d'annoncer la fin de l'assaut du centre commercial Westgate de Nairobi. Mais au lendemain de cette déclaration, les zones d'ombre demeurent.
Quel est le nombre de morts ? Où sont les disparus ?
Débutée samedi à la mi-journée, l'attaque du centre commercial de Nairobi a pris fin mardi, vers 18h30. Nous avons humilié et vaincu nos assaillants. (...) En conséquence de l'attaque, j'ai le regret d'annoncer que nous avons perdu 61 civils et six membres des forces de sécurité ", déclarait alors le chef de l'Etat kényan. Le bilan provisoire est donc toujours de 72 morts, puisque cinq terroristes auraient également péri dans l'assaut.
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Mais le bilan donné par les shebab n'est pas le même. Sur leur compte Twitter, les insurgés islamistes somaliens ont affirmé que "137 otages " avaient péri dans l'attaque. Le président kényan "Uhuru Kenyatta et son gouvernement doivent être tenus pour responsables" de la perte "des vies des 137 otages qui étaient détenus par les moujahidines ", ont écrit les shebab sur Twitter, accusant les forces kényanes d'avoir utilisé "des gaz chimiques " pour mettre fin au siège et d'avoir "provoqué l'effondrement du bâtiment, enterrant les preuves et tous les otages sous les décombres ".
Le pire, c'est que les deux parties pourraient avoir raison. En effet, on ne sait toujours pas ce qu'il est advenu des 71 personnes qui sont toujours déclarées disparues (selon la Croix-Rouge). Ce mercredi, les secours fouillaient encore les décombres du Westgate. Une partie du toit et de trois étages, sur les quatre que compte le centre commercial, s'était effondrée mardi, ce qui rend les recherches particulièrement difficiles.
Qui sont les assaillants ?
Dès samedi, l'attaque a été revendiquée par les insurgistes islamistes somaliens d'Al-Shebab, avec la volonté de contester l'intervention militaire kényane en Somalie.
Mais pour l'instant, leur identité est toujours floue. Le commando aurait été composé de 12 à 19 membres selon les sources, qui reprennent les noms publiés par le compte Twitter @HSM_PRESS2 lors de l'attaque. On peut y lire notamment "abdirizak mouled 24 y.o from ontario canada " ou "ismael fuled 23 y.o from helsink finland ". En tout, la liste comporte six Américains, deux Britanniques, deux Syriens, un Finlandais, un Russe du Daguestan, un Canadien, un Kényan, un Suédois et deux Somaliens.
Ce que l'on sait, c'est qu'il n'y a que très peu de Somaliens. Différentes sources affirment en effet que les terroristes parlaient anglais entre eux pendant l'attaque. Ce que l'on sait aussi, c'est que de nombreux membres des shebab sont recrutés aux Etats-Unis, et notamment dans le Minnesota, dans un quartier qu'on surnomme "Little Mogadiscio ".
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Selon une enquête du Congrès de 2011, plus de 20 combattants américains se sont engagés avec les shebab ces dernières années. Mais la personnalité qui interroge réellement les enquêteurs, c'est celle de Samantha Lewthwaite, surnommée "La veuve blanche ". On ne sait toujours pas si elle faisait partie ou non de l'attentat.
Certaines "sources officielles " ont en effet assuré qu'elle était sur place et d'autres disent même qu'elle aurait dirigé le commando. Mais les messages envoyés par les shebab diffèrent. Sur Twitter, dimanche, ils ont indiqué : "Sherafiyah Lewthwaite alias Samantha est une femme courageuse ! Nous sommes heureux de la compter dans nos rangs ", avant de se raviser et d'expliquer qu'ils avaient "un nombre suffisant de jeunes hommes totalement dévoués " et qu'ils n'employaient "pas nos sœurs dans de pareilles opérations militaires ".
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Comment ont-ils pu faire entrer toutes ces armes ?
Grâce aux témoignages qui commencent à affluer des personnes retenues dans le centre commercial, ce qui s'est passé pendant ces quelques jours commencent à être plus clair. Le plan aurait été mis en place des semaines ou des mois avant sur le sol somalien par une unité des opérations extérieurs des shebab, peut-on lire dans le New York Times .
Le quotidien américain explique que les plans du bâtiment auraient été étudiés "jusque dans les conduits d'aération. L'attaque a été répétée et l'équipe a été dispatchée, afin de ne pas se faire détecter au moment de traverser la frontière, où les gardes kényans sont souvent corrompus".
Il est mentionné que les Somaliens devaient avoir un QG au Kenya pour stocker leurs armes, et que ce QG était possiblement à l'intérieur même du Westgate, où un employé a pu faire entrer leurs armes dans un local loué contre quelques billets. Cela expliquerait également pourquoi des chiens renifleurs ont été envoyés sur place, ce mercredi, ainsi que des experts en explosifs et des robots démineurs téléguidés. En effet, il se pourrait que des bombes soient toujours présentes à l'intérieur du bâtiment.
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