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Pays-Bas: la face cachée du leader d’extrême droite Geert Wilders

Il compare le Coran à Mein Kampf. Et dénonce la «racaille marocaine». «Il», c’est Geert Wilders, le leader de la formation d’extrême droite Parti pour la liberté (PVV), favori pour les législatives du 15 mars 2017 aux Pays-Bas. Reste à savoir qui est cet homme, député depuis 1998. Son frère Paul, de 9 ans son aîné, dresse de lui un portrait assez surprenant dans l'hebdo allemand «Spiegel».
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min

«Après les élections, nous viendrons te voir et nous te règlerons ton compte.» La menace a été proférée récemment par des jeunes à Paul Wilders, 69 ans, qui passait dans la rue. Mais le frère du leader extrémiste néerlandais sait très bien que cette haine vise avant tout son frère. Qui fait feu de tout bois contre l’islam et les musulmans. N’hésitant pas à dire que la religion musulmane est «peut-être encore plus dangereuse que le national-socialisme».

A la question de savoir si Geert croit en ce qu’il dit, son frère Paul explique dans le Spiegel (accessible très difficilement par abonnement!): «C’est un adversaire résolu de l’islam. Mais bien sûr, derrière tout cela, il faut tenir compte de tout un tas d’éléments tactiques (…). Dans la vie, Geert n’a pas grand-chose d’autre que la politique. Son succès en politique est le début et la fin de son bonheur.»


Pour tenter de trouver une explication à cette islamophobie, certains utilisent la psychologie des profondeurs. Selon des historiens, sa famille aurait des racines dans les îles indonésiennes, colonie néerlandaise jusqu'en 1949. «L'étonnante coiffure blond peroxydé (de Wilders) servirait donc surtout à masquer des origines asiatiques et une lignée où l'on retrouverait une arrière-grand-mère musulmane», rapporte Le Monde.

«Il se coupe de la vie quotidienne normale»
Aujourd’hui, le chef du PVV peut-il se présenter comme un vrai représentant du peuple néerlandais, comme il le fait continuellement? «Il n’y a pas d’homme politique qui ait moins de contact avec le peuple que Geert. Il ne peut même pas faire un seul pas dans la rue. Depuis 12 ans (et l’assassinat, en 2004, du polémiste anti-musulman Theo Van Gogh), il vit avec sa femme (Krisztina Marfai Arib, une ex-diplomate hongroise) dans un lieu tenu secret», raconte son frère.

Et de poursuivre: «Le couple doit vivre en permanence sous protection personnelle. Car (Geert) a reçu des menaces de mort très sérieuses proférées par des islamistes. Quand il est chez lui, on trouve toujours des membres des forces de sécurité devant sa porte. Quand il sort faire des courses, les gardes du corps doivent l’accompagner. Même lors des fêtes de famille, ils sont là. Le monde de Geert est devenu très petit: (il est constitué) du Parlement, des réunions publiques et (de) son logement. Il ne peut aller nulle part ailleurs. Il est socialement isolé. Il se coupe de la vie quotidienne normale. Cela n’est bon pour aucun être humain.»

Paul Wilders dresse de son frère le portrait d’un homme intolérant. Lors des réunions de famille, personne ne parle politique: «C’est un sujet tabou. Chacun sait que si nous entamons une discussion avec lui, il s’en ira et nous ne le reverrons plus jamais. Il coupera alors toutes les relations.»

Et comment Geert était-il dans sa jeunesse? «C’était une calamité. (Il était) égocentrique et agressif», raconte Paul. «Même à l’adolescence, il se montrait déjà extrême. Il a une vision étriquée des choses. Pour lui, il n’y a pas de compromis.»


Opportunisme
C’est à la fin des années 80 que Geert Wilders a commencé à s’intéresser à la politique. «Il voulait faire bouger les choses», se souvient son aîné. «Nous avons, tous les deux, discuté pendant des heures dans quel parti il devait aller. Il était alors ni clairement de gauche ni de droite, il n’était pas encore xénophobe. Mais le jeu politique l’a fasciné, (avec) le combat pour le pouvoir et l’influence.»

Chez le patron du Parti pour les libertés, le pouvoir semble davantage compter que les convictions (extrémistes, notamment antimusulmanes), qu’il semble s’être forgées ensuite par opportunisme, si l’on en croit son frère. Après les attentats du 11-Septembre aux Etats-Unis, les assassinats, en 2002, de l’homme politique Pim Fortuyn et, en 2004, du réalisateur Theo Van Gogh, «il a compris qu’il y avait un vide dans le paysage politique. Il s’est donc présenté comme un adversaire de l’islam».

Une posture qui plaît à ses électeurs. «C’est un maître des messages courts, que recherchent de nombreuses personnes dans l’époque complexe que nous traversons. Ils recherchent une vision politique simple et sans nuances. Geert la leur donne. Il procure une identité: Nous, le peuple néerlandais. Il fournit les éléments (présentés comme) s’y opposant: les musulmans, l’UE, les élites.»

Devenu un personnage incontournable du paysage politique néerlandais, Geert Wilders a-t-il atteint ce qu’il voulait? Il «ne supporte aucune contradiction, chez ses partisans comme dans sa vie privée. Beaucoup de ses amis d’autrefois ont pris leurs distances», constate Paul. Et d’ajouter: «Je ne pense pas qu’il soit heureux. Cela me rend malheureux.» 

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