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"Pantalon indécent": Loubna libérée

La journaliste Loubna Ahmed al-Hussein, condamnée pour le port d'un pantalon jugé "indécent", a été libérée mardi
Article rédigé par France2.fr
France Télévisions
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La journaliste Loubna Ahmed al-Hussein, condamnée pour le port d'un pantalon jugé "indécent", a été libérée mardiLa journaliste Loubna Ahmed al-Hussein, condamnée pour le port d'un pantalon jugé "indécent", a été libérée mardi

Le syndicat soudanais des journalistes, considéré comme ayant des liens avec les autorités, a payé l'amende de 209 dollars à laquelle elle a été condamnée lundi et qu'elle a refusé de régler, préférant aller en prison pour un mois.

Elle encourait 40 coups de fouet mais y a échappé, sans doute grùce au tollé que son affaire a provoqué dans le monde.

Sa premiÚre réaction à sa sortie de prison a été la colÚre: "Ils viennent de me dire de partir. Je ne sais pas pourquoi et je ne suis pas contente. J'ai dit à tous mes amis et à ma famille de ne pas payer l'amende. Mais je suis libre". Et d'ajouter: "Je ne suis pas contente parce qu'il y a plus de 700 femmes encore en prison qui n'ont personne pour leur payer l'amende."

Loubna Hussein a soulignĂ© que parmi les douze femmes arrĂȘtĂ©es avec elle en juillet, dix avaient dĂ©jĂ  Ă©tĂ© fouettĂ©es. Mohieddin Titawi, le prĂ©sident du syndicat des journalistes, n'a pas expliquĂ© pourquoi son organisation avait payĂ© la somme requise.

AprĂšs le jugement, Loubna Hussein avait dit ĂȘtre prĂȘte Ă  aller jusqu'Ă  la Cour constitutionnelle, la plus haute instance judiciaire au Soudan, afin d'invalider la loi autorisant la flagellation.

Des manifestants ont été battus et interpellés par la police lundi à l'ouverture du procÚs de la journaliste. Plus d'une centaine de personnes se sont rassemblées devant le tribunal dans le centre de Khartoum pour soutenir la jeune femme. "Liberté, liberté", scandaient des manifestants, alors que d'autres brandissaient des encarts sur lesquels étaient écrits "non à la flagellation".

Criant "Allah Akbar", des islamistes ont infiltrĂ© la manifestation et s'en sont pris verbalement Ă  des supporters de Loubna Ahmed al-Hussein. Munis de boucliers et de bĂątons, des policiers ont frappĂ© des manifestants, dispersĂ© la foule et arrĂȘtĂ© une quarantaine de femmes, selon un correspondant de l'AFP sur place.

Un dispositif de sécurité renforcé avait été déployé devant le tribunal. Les policiers ont interdit les photographes et les caméramans de filmer la manifestation, alors que les journalistes n'ont pas été admis dans la salle d'audience.

Ce procÚs qui défraye la chronique à l'étranger, ne fait pas la Une au Soudan. "Nous ne sommes pas autorisés à mentionner le nom de Loubna", a déclaré à l'AFP le rédacteur en chef d'un important journal à Khartoum.

Rappel des faits


Loubna Hussein mĂšne un combat contre l'article 152 du code pĂ©nal soudanais de 1991 entrĂ© en vigueur deux ans aprĂšs le coup d'Etat de l'actuel prĂ©sident Omar el-BĂ©chir et qui prĂ©voit une peine maximale de 40 coups de fouet pour quiconque "commet un acte indĂ©cent, un acte qui viole la moralitĂ© publique ou porte des vĂȘtements indĂ©cents".

Or cet article viole la Constitution soudanaise et l'esprit de la loi islamique (charia) en vigueur dans le Nord du Soudan, majoritairement musulman, soutient la journaliste devenue activiste.

Loubna Hussein, dont le procÚs avait été ajourné le 4 août dernier, a reçu plusieurs appuis à l'étranger dans son bras de fer contre l'article de loi 152.

L'organisation de défense des droits de l'Homme Amnesty International a exhorté ce week-end les autorités soudanaises à abroger la loi et à retirer les accusations. "La maniÚre dont cette loi a été utilisée contre les femmes est inacceptable et la sentence prévue est répugnante", a déclaré l'organisation. "Cette loi est rédigée de telle sorte qu'il est impossible de savoir ce qui est décent ou indécent", ce qui laisse place à l'arbitraire des policiers, ajoute l'organisation qui juge également cette loi "discriminatoire".

Loubna avait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©e en juillet lors d'une rĂ©ception dans un restaurant de Khartoum.

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