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Intervention militaire israélienne à Gaza: l'analyse de Charles Enderlin
Le conflit entre Israël et le Hamas à Gaza ne marque aucun signe de répit. L’analyse du correspondant de France 2 à Jérusalem, Charles Enderlin.
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En France, certains ont l’impression qu’il y a une disproportion des moyens entre la puissante armée israélienne et les combattants du Hamas. Qu’en pense-t-on en Israël ?
Effectivement, ce conflit, cette guerre, est asymétrique. Une armée combat une guérilla dans un territoire où la densité de population est une des plus élevée au monde, d’où le nombre élevé de victimes civiles. Cela dit, en l’absence de sondages, et je ne peux que parler de mes impressions.
D’après ce que je vois, le public israélien a le sentiment que c’est une guerre défensive où Israël n’a pas le choix. Benjamin Netanyahu a proposé un premier cessez-le-feu au début de ce conflit, lorsque les échanges roquettes/frappes aériennes n’avaient pas fait de nombreuses victimes. Le calme contre le calme. Le Hamas a refusé, ainsi que deux propositions d’arrêt des combats présentées par les Egyptiens, et continue d’envoyer des roquettes en direction du territoire israélien. Evidemment, ces missiles et ces obus de mortiers ne font quasiment pas de victimes en raison du système d’alerte, des abris et de l’efficacité des batteries anti-missiles. Sans cela, il y aurait très probablement un bilan très élevé en Israël.
A Gaza, la population n’a rien de tout cela. Des experts israéliens, découvrant l’importance des galeries et des tunnels construits par le Hamas dans le sous-sol, s’exclament: «Voilà où est parti tout le béton qui est entré à Gaza ces dernières années!»
Dans l’état actuel des choses, comment une désescalade est-elle possible ?
A ce stade, c’est plutôt l’escalade. Tout dépend des négociations vers un cessez le feu. Ni Israël, ni le Hamas – et les autres organisations islamistes – à Gaza n’entameront une désescalade sans obtenir des acquis concrets. Le Hamas demande une levée du blocus, la fin des liquidations ciblées de ses militants, la libération de ses responsables arrêtés en Cisjordanie après le meurtre des trois jeunes Israéliens… Et aussi l’ouverture du poste frontière de Rafah à la frontière avec l’Egypte. Les Israéliens, eux, demandent l’assurance que le Hamas n’aura plus la possibilité de tirer des missiles, voire un changement radical de pouvoir à Gaza, mais cela n’est officiellement pas à l’ordre du jour..
Quel rôle joue exactement l’Egypte du général Sissi ?
La clé d’une désescalade se trouve au Caire. Mais l’Egypte de Sissi est l’ennemi des Frères musulmans – donc du Hamas – et de leurs principaux soutiens. Ce pays est aussi l’ennemi du Qatar qui est le financier du Hamas. Il faut rappeler que trois journalistes d’al-Jazeera, la chaîne qatariote, ont été condamnés à des années de prison en Egypte. Avec la Turquie, les relations sont particulièrement tendues. Le Premier ministre turc, Erdogan, a qualifié le général Sissi de «tyran» et ajouté «qu'Israël surpasse Hitler dans la barbarie».
Pour le Qatar et la Turquie, il est fondamental que le Hamas, leur protégé, ne sorte pas vaincu de ce conflit, mais avec de réels acquis. C’est un message qu’ils veulent envoyer au monde arabe et musulman. L’Egypte, qui considère le Hamas comme un mouvement terroriste, voudrait lui couper les ailes. Déjà, sur les ordres du général Sissi, la plupart des tunnels qui relient le Sinaï à Gaza, ont été détruits. C’est une des raisons qui ont mis l’organisation islamiste au pied du mur. Elle a perdu sa principale source d’approvisionnement en matériel militaire, et aussi de rentrées financières (la dîme que le Hamas prélevait sur tout ce qui rentrait dans Gaza). Depuis quatre mois, les fonctionnaires et les combattants du Hamas ne sont pas payés.
Comment réagit l’Autorité palestinienne ?
Elle tente de survivre dans cette crise. Les Egyptiens voudraient que dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu, des policiers venus de Ramallah contrôlent le poste frontière de Rafah, côté Gaza. Le Hamas dit non.
Effectivement, ce conflit, cette guerre, est asymétrique. Une armée combat une guérilla dans un territoire où la densité de population est une des plus élevée au monde, d’où le nombre élevé de victimes civiles. Cela dit, en l’absence de sondages, et je ne peux que parler de mes impressions.
D’après ce que je vois, le public israélien a le sentiment que c’est une guerre défensive où Israël n’a pas le choix. Benjamin Netanyahu a proposé un premier cessez-le-feu au début de ce conflit, lorsque les échanges roquettes/frappes aériennes n’avaient pas fait de nombreuses victimes. Le calme contre le calme. Le Hamas a refusé, ainsi que deux propositions d’arrêt des combats présentées par les Egyptiens, et continue d’envoyer des roquettes en direction du territoire israélien. Evidemment, ces missiles et ces obus de mortiers ne font quasiment pas de victimes en raison du système d’alerte, des abris et de l’efficacité des batteries anti-missiles. Sans cela, il y aurait très probablement un bilan très élevé en Israël.
A Gaza, la population n’a rien de tout cela. Des experts israéliens, découvrant l’importance des galeries et des tunnels construits par le Hamas dans le sous-sol, s’exclament: «Voilà où est parti tout le béton qui est entré à Gaza ces dernières années!»
Dans l’état actuel des choses, comment une désescalade est-elle possible ?
A ce stade, c’est plutôt l’escalade. Tout dépend des négociations vers un cessez le feu. Ni Israël, ni le Hamas – et les autres organisations islamistes – à Gaza n’entameront une désescalade sans obtenir des acquis concrets. Le Hamas demande une levée du blocus, la fin des liquidations ciblées de ses militants, la libération de ses responsables arrêtés en Cisjordanie après le meurtre des trois jeunes Israéliens… Et aussi l’ouverture du poste frontière de Rafah à la frontière avec l’Egypte. Les Israéliens, eux, demandent l’assurance que le Hamas n’aura plus la possibilité de tirer des missiles, voire un changement radical de pouvoir à Gaza, mais cela n’est officiellement pas à l’ordre du jour..
Quel rôle joue exactement l’Egypte du général Sissi ?
La clé d’une désescalade se trouve au Caire. Mais l’Egypte de Sissi est l’ennemi des Frères musulmans – donc du Hamas – et de leurs principaux soutiens. Ce pays est aussi l’ennemi du Qatar qui est le financier du Hamas. Il faut rappeler que trois journalistes d’al-Jazeera, la chaîne qatariote, ont été condamnés à des années de prison en Egypte. Avec la Turquie, les relations sont particulièrement tendues. Le Premier ministre turc, Erdogan, a qualifié le général Sissi de «tyran» et ajouté «qu'Israël surpasse Hitler dans la barbarie».
Pour le Qatar et la Turquie, il est fondamental que le Hamas, leur protégé, ne sorte pas vaincu de ce conflit, mais avec de réels acquis. C’est un message qu’ils veulent envoyer au monde arabe et musulman. L’Egypte, qui considère le Hamas comme un mouvement terroriste, voudrait lui couper les ailes. Déjà, sur les ordres du général Sissi, la plupart des tunnels qui relient le Sinaï à Gaza, ont été détruits. C’est une des raisons qui ont mis l’organisation islamiste au pied du mur. Elle a perdu sa principale source d’approvisionnement en matériel militaire, et aussi de rentrées financières (la dîme que le Hamas prélevait sur tout ce qui rentrait dans Gaza). Depuis quatre mois, les fonctionnaires et les combattants du Hamas ne sont pas payés.
Comment réagit l’Autorité palestinienne ?
Elle tente de survivre dans cette crise. Les Egyptiens voudraient que dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu, des policiers venus de Ramallah contrôlent le poste frontière de Rafah, côté Gaza. Le Hamas dit non.
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