Cet article date de plus de sept ans.
Gaza: les Palestiniens otages d’une pénurie «organisée» du courant électrique
Privés régulièrement de courant électrique et de carburant, les Palestiniens de la Bande de Gaza s’enfoncent, selon un rapport de la banque mondiale, dans «une crise humanitaire». A plus de dix ans de blocus israélien vient s’ajouter un nouveau bras de fer entre le Hamas et l’Autorité Palestinienne, aggravant la situation d’une population prise désormais littéralement en otage.
Publié
Temps de lecture : 5min
Triplement otages du blocus israélien, de la radicalisation du Hamas et du durcissement de l’Autorité palestinienne à l’encontre de son rival islamiste, les Palestiniens de la Bande de Gaza s’enfoncent dans la crise.
C’est la Banque mondiale elle-même qui a tiré la sonnette d’alarme sur la situation des Gazaouis gouvernés depuis 2007 par le mouvement islamiste Hamas.
Deux millions de Gazaouis en «crise humanitaire»
Dans un rapport publié en amont d’une conférence internationale de donateurs, elle estime que la constante pénurie de carburant et le manque d’infrastructures ont entraîné une «crise humanitaire» pour les deux millions d’habitants de la Bande de Gaza.
L’unique centrale électrique de ce territoire se retrouve souvent à court de carburant pour ses générateurs et ne peut plus fournir parfois que quatre heures de courant par jour.
Le Hamas importe du diesel pour les générateurs de cette centrale via l’Autorité palestinienne installée à Ramallah en Cisjordanie, mais les deux rivaux politiques sont en litige permanent sur le paiement entraînant ces pénuries.
Pour faire pression sur le pouvoir islamiste, l’Autorité de Mahmoud Abbas vient même, selon le Cogat, un organe du ministère israélien de la Défense, de décider d’arrêter le paiement de l’électricité livrée à la Bande de Gaza.
Israël fournit en effet 120 megawatts à Gaza pour environ 11 millions de dollars par mois, soit 80% de l’électricité disponible dans ce territoire palestinien autonome.
Résultat: les pénuries frappent les hôpitaux, les cliniques, l’approvisionnement en eau et d’autres services vitaux ainsi que les besoins des ménages, indique Marina Wes, la directrice de la Banque mondiale pour la Cisjordanie et Gaza, dans ce rapport.
Toujours selon l’institution financière mondiale, l’aide étrangère ne pourra à elle seule sortir l’économie palestinienne de la stagnation sans changements pratiques et sans coopération israélienne.
L'Aurorité palestinienne doit réformer et Israël alléger les restrictions
«L’autorité palestinienne doit entreprendre des réformes pour faire en sorte que les obligations de paiement aux fournisseurs d’électricité soient satisfaites, estime la Banque. Ceci est particulièrement important à Gaza pour permettre la construction d’une ligne de haute tension en provenance d’Israël pour atténuer la crise énergétique.»
«Alléger les restrictions israéliennes sur le commerce extérieur et ouvrir l’accès à Gaza sont essentiels pour accroître la croissance du secteur privé et de l’emploi», estiment également les auteurs du rapport qui doit être présenté le 4 mai à Bruxelles aux coordonateurs de l’aide internationale.
Aujourd’hui, «avec des coupures de courant de 20 heures par jour et les réserves d’urgence de carburant qui s’épuisent, les services de base pourraient s’arrêter», prévient de son côté le coordinateur de l’aide humanitaire de l’ONU, Robert Piper.
Sept des hôpitaux de Gaza n’ont plus que quelques jours de réserve de carburant pour alimenter les générateurs d’appoint, a fait savoir le ministère de la Santé du Hamas.
L’ONU a annoncé avoir débloqué 500.000 dollars pour l’achat d’urgence de carburant pour le secteur médical, mais ce n’est qu’un traitement limité du problème.
Le Hamas craint d'importants mouvements sociaux dans la Bande de Gaza
Sous la pression financière de l’Autorité palestinienne qui a déjà réduit, début avril, la rémunération des fonctionnaires, le Hamas s’insurge. «Mahmoud Abbas doit absolument revenir sur sa décision» de ne plus payer l’électricité, a déclaré Fawzi Barhoum, le porte-parole du Hamas à Gaza. «L’occupant israélien en paiera le prix, car il est l’unique responsable du blocus», a-t-il menacé.
Mais les islamistes qui gouvernent la Bande de Gaza craignent surtout une réédition des événements de janvier 2017, et en plus violent cette fois-ci.
Exaspérés par les coupures de courant, des milliers de Palestiniens s’étaient rassemblés dans le camp de réfugiés de Jabalia pour marcher sur le siège de la compagnie publique d’électricité. Ils ont été dispersés par les tirs en l’air, les gaz lacrymogènes et les coups de matraque des forces de sécurité du Hamas.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.