C'était "un terrorisme d'Étatsans frontières", explique une historienne de l'Université de BuenosAires, Ema Cibotti. Le Plan Condor a été mis au jour en 1992 au Paraguay, lorsqu'ont surgi lespremières archives établissant l'existence d'un plan concerté entre six paysd'Amérique du sud. Entre 1975 et le début des années 1980, les dictaturesmilitaires du continent — Argentine, Chili, Paraguay, Uruguay, Bolivie etBrésil — échangeaient des informations afin de faire enlever ou supprimer desopposants réfugiés à l'étranger.Depuis 1992, les lois d'amnistie —en Argentine notamment — et les lenteurs des différentes justices ont retardél'heure des procès. Et même provoqué des rendez-vous manqués pour l'ancienprésident paraguayen Alfredo Stroessner ou le Chilien Augusto Pinochet, mortsavant d'avoir pu être jugés.Argentine : 30.000 morts et disparusLe premier procès focalisé sur lePlan Condor s'ouvre ce mardi à Buenos Aires. Face au Tribunal fédéral numéro un,une vingtaine de hauts fonctionnaires argentins et deux anciens dignitaires durégime argentin, appelés à répondre de crimes contre l'humanité : l'ancienprésident Jorge Videla (1976-1981), qui était au pouvoir quand la répressionétait à son paroxysme, purge une peine de prison à vie. À ses côtés,l'ex-général Luciano Benjamin Menendez, surnommé "La Hyène", car ilavait la réputation de rire pendant que ses hommes torturaient les prisonniers.Rien qu'en Argentine, durant septans (1976-1983), la dictature a fait 30.000 morts et disparus. Des centaines demilliers de personnes ont été emprisonnées sans autre forme de procès, selonplusieurs organisations de défense des droits de l'Homme. Les avocats de victimes argentines et uruguayennes espèrent que la justiceréussira à mettre en évidence le soutien, sur fond de guerre froide, des Etats-Unisau Plan Condor, face aux oppositions de gauche organisées en groupes armés. "Nousavons des témoignages de survivants et des documents déclassifiés qui compromettentWashington", affirme l'avocate Carolina Varsky.