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Négociations transatlantiques : deux ans pour se mettre d'accord

L'Union européenne et les États-Unis entament ce lundi les négociations en vue d'un accord de libre-échange à grande échelle entre les deux parties. Les discussions, qui devraient s'achever en 2015, se sont quelque peu tendues ces dernières semaines avec les révélations d'espionnage des institutions européennes par les Américains. Il n'y en avait pas besoin tant certains points promettent déjà des négociations serrées.
Article rédigé par franceinfo
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  (Tobias Schwartz Reuters)

Le rendez-vous a été fixé à lundi, à Washington, entre le représentant américain au Commerce extérieur, Michael Froman, et le négociateur en chef européen, Ignacio Garcia Bercero. Les deux hommes et leurs équipes vont entamer une série de discussions "historiques", qui doivent déboucher en 2015 sur un accord transatlantique sur le commerce et l'investissement, baptisé TTIP. Le but : faire tomber les droits de douane dans certains secteurs protégés de part et d'autre de l'Atlantique, mais aussi et surtout harmoniser et assouplir les règles édictées par chacune des parties à l'intérieur de son espace économique, et qui visent en général à privilégier ses "champions" commerciaux.

Mais une affaire est venue porter un coup sérieux à ce début de négociations. Le magazine Der Spiegel a en effet révélé il y a quelques semaines, se basant sur un document récupéré par Edward Snowden, l'existence d'un système d'espionnage du Parlement européen, notamment, par les renseignements américains. Après avoir menacé de suspendre les négociations, François Hollande s'est rangé derrière la décision des Vingt-Huit de quand même les entamer, tout en créant un groupe de travail au sujet de ces révélations.

Quelle est l'utilité d'un tel accord ?

Si l'Union européenne a bien vite remisé son emportement dans cette affaire, c'est parce que le TTIP revêt une importance capitale, pour chacune des deux parties.

En créant une immense zone de libre-échange, regroupant plus de 820 millions d'habitants et plus de 50 % de la production économique mondiale, l'UE et les États-Unis espèrent bien accroître leur activité et, dans le cas de l'Europe, gagner en croissance dans une période de crise qui dure. La Commission européenne estime que la mise en oeuvre de l'accord pourrait générer environ 0,5 % de croissance annuelle en plus pour l'UE.

Les deux parties, qui sont déjà les principaux partenaires l'un de l'autre avec des échanges au-dessus des 500 milliards d'euros en 2012, ont donc beaucoup à gagner.

Combien de temps ?

Dès le début des négociations lundi, Européens et Américains vont d'abord s'attacher à dresser un calendrier précis pour les 15 groupes de travail. 

Les deux parties devraient a priori se retrouver une semaine par mois, à partir de la rentrée prochaine. Des sources très optimistes assurent que l'accord sera bouclé dès l'automne 2014. Mais il est d'ores et déjà quasiment certain que les discussions dureront au moins deux ans, vu l'ampleur de la tâche.

Quels sont les points d'achoppement ?

L'un des points les plus délicats a déjà été - provisoirement - réglé. La France s'opposait, au nom de l'exception culturelle, à ce que l'audiovisuel fasse partie des points en négociations. Au prix d'un bras de fer avec la Commission européenne, sa demande a été acceptée.

Mais les points délicats ne manquent pas. En voici quelques-uns :

Dans le domaine de l'agriculture , les États-Unis rêvent de pouvoir vendre leurs produits OGM aux Européens, qui eux ne renonceront pas facilement à leurs normes sanitaires qui empêchent toute importation. Et si l'UE vient à céder, les résistances intérieures ne manqueront pas, notamment en France. Des réticences qui concernent aussi la viande américaine aux hormones, d'ailleurs. Les deux continents semblent en règle générale diamétralement opposés en matière d'alimentation et d'agriculture, comme l'affaire de la mimolette est venue récemment le prouver. Dans le domaine des marchés publics , les États-Unis vont avoir beaucoup de réticence à abandonner leur sacro-sainte préférence nationale ("Buy American"). Les Européens rêvent déjà des parts de marché ouvertes si cela se réalisait. Dans le domaine numérique , la protection des données personnelles sur Internet promet une belle bataille. Alors que l'UE prépare de son côté un texte qui se veut innovant en la matière, les grands groupes américains (Google, Facebook, Twitter...) se plaignent de freins à leur développement sur le Vieux Continent. Dans le domaine aéronautique , il suffit de lancer deux noms pour mettre le feu aux poudres : Boeing et Airbus. Européens et Américains sont en conflit auprès de l'OMC à cause des aides publiques accordées à leurs avionneurs respectifs. Alors trouver des règles en bonne intelligence... Dans le domaine bancaire , les États-Unis aimeraient tout simplement exlure le secteur financier des termes de l'accord. L'enjeu est crucial, mais un accord semble quand même lointain même si ant l'UE que les États-Unis semblent vouloir que la route aboutisse. C'est ce qu'a affirmé il y a plusieurs mois Michael Froman, le représentant du Commerce extérieur américain : "Nous ne voulons pas passer dix ans à négocier sur des dossiers qui sont bien connus sans parvenir à un résultat ". Dont acte.

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