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Suez : d’un canal à un autre

Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Le canal de Suez, qui enregistre 8% du trafic maritime, est le seul qui relie la mer Rouge à la Méditerranée. Le 6 août 2015, «le nouveau canal de Suez», comme l’ont baptisé les Egyptiens, a été inauguré en présence de François Hollande, président de la France, pays invité d’honneur de la cérémonie.

Le chantier du nouveau canal de Suez a démarré en 2014. Livré en douze mois, au lieu des trente-six prévus, il a mobilisé 43 000 personnes. La construction de la nouvelle voie a été financée par les Egyptiens. Une souscription nationale a été lancée en août 2014 et 8,5 milliards de dollars ont été récoltés, indique le Suez Canal Authority (SCA), l'organisme public qui gère la voie maritime.

En se dotant d'une nouvelle voie, le canal de Suez devrait voir son trafic doubler, selon l’autorité de gestion du canal de Suez (SCA). L'extension permettra une navigation à double sens et réduira le temps de transit (de dix-huit à onze heures) et d'attente des navires. La moyenne journalière des bateaux qui transitent par le canal «devrait (ainsi) passer de 49 à 97». Quant aux revenus générés, la moyenne annuelle de 5,3 milliards devrait atteindre 13,2 milliards de dollars d'ici à 2023. (MOHAMED EL-SHAHED / AFP)
Avant l'inauguration du 6 août 2015, le canal a accueilli son premier navire le 25 juillet 2015.


 (Reuters/Stringer)
La nouvelle voie du canal de Suez (en rose), qui s'étend dur 72 km, est parallèle à la première (en bleu). (Suez Canal Authority)
C’est une nouvelle page qui s’ouvre pour une voie de navigation vieille de plus d’un siècle. Le canal de Suez, percé dans l’isthme du même nom entre Port-Saïd et le golfe de Suez, est le premier canal artificiellement créé par l’homme. Il faut remonter au pharaon Sésostris III (1887 – 1849 av. J.C) pour retrouver l’ancêtre d’un canal qui relie alors la mer Rouge à la Méditerranée via les affluents du Nil. Sa version moderne, dont on aperçoit une vue aérienne de l'entrée sud datant de 2007, est une idée de Napoléon Bonaparte qui la met en œuvre en 1799. Mais ce sera un échec à cause des mauvais calculs de ses ingénieurs.  (AFP PHOTO/JACK GUEZ)
Toutefois, l’idée fait son chemin en France, notamment dans l’esprit des saint-simoniens («un mouvement de pensée réformateur influent du XIXe siècle (qui souhaite) bâtir le bonheur de l’humanité sur le progrès de l’industrie et de la science»). Des ingénieurs, appartenant à ce courant intellectuel, se rendent en Egypte en 1833 mais la maladie aura raison de leurs ambitions. Deux ans plus tard, ils repartent, bredouilles. Cependant, l’un d’eux, Ferdinand de Lesseps, alors vice-consul de France à Alexandrie, n’abandonne pas pour autant l’idée. 
  (AFP)
Le diplomate français réussit à convaincre le vice-roi d’Egypte, Mohammed Saïd-Pacha, en 1854. Quatre ans plus tard, la Compagnie universelle du canal maritime de Suez voit le jour. Elle a pour mission de construire et de gérer le canal pendant quatre-vingt-dix-neuf ans, période à la fin de laquelle la gestion sera confiée à l’Egypte. 
  (AFP/Private collection Photos12.com - Photosvintages)
Le coût des travaux est estimé à 200 millions de francs à l’époque. La nouvelle structure rencontre très vite des difficultés financières. Saïd-Pacha achète alors 44% des parts de l’entreprise qui est désormais franco-égyptienne. 
  (AFP)
Les Britanniques, notamment, qui ont toujours vu d’un mauvais œil ce projet, le retardent également. Mais la construction de l’ouvrage est rendue possible grâce à l’intervention de Napoléon III. Les travaux démarrent le 25 avril 1859. Quatre ans plus tard, ils seront de nouveau interrompus. Ferdinand de Lesseps fait de nouveau appel à Napoléon III, dont le soutien permettra de mettre en place une commission internationale en mars 1864 pour régler tous les contentieux inhérents au projet. Le canal de Suez est inauguré le 17 novembre 1869. La convention de Constantinople, signée en 1888, le rend accessible à tous les navires de tous les pays. 
 
  (AFP)
En 1875, les parts égyptiennes du canal sont rachetées par les Britanniques qui maintiennent une présence militaire à partir de 1936 (dans le cadre du du traité anglo-égyptien), dans une zone considérée comme stratégique. Ce qui ne convient pas aux nationalistes égyptiens. Ainsi, l’accord de 1936 est suspendu pour sept ans par un nouvel accord conclu en 1954 (il est signé le 21 octobre 1954, cf. photo). Le document prévoit le retrait progressif des troupes britanniques du canal de Suez. 
  (AFP)
Au cours de son histoire, la voie maritime a été fermée cinq fois, dont deux dans l'histoire contemporaine. La première fermeture fut causée par la crise de Suez. Gamal Abdel Nasser, président de la République d'Egypte, annonce le 26 juillet 1956 la nationalisation du canal afin d’utiliser les revenus générés pour financer le futur barrage d’Assouan.
  (AFP)
Pour défendre leurs différents intérêts économiques et géopolitiques, Français, Britanniques et Israéliens s'allient pour protester contre cette décision. Le 29 octobre 1956, Israël attaque l’Egypte. C’est le début de la crise de Suez. Mais quelques jours plus tard, sous la pression des Russes et des Américains, la coalition se retire d’Egypte. Le canal est de nouveau navigable en mars 1957. (AFP )
La deuxième fermeture à la navigation est la plus longue. Elle durera de juin 1967 à 1975, c’est-à-dire après la guerre de Six jours et pendant celle de Kippour. Le premier conflit est une réponse directe à l’interdiction faite à Israël le 22 mai 1967 d’accéder au golfe d’Akaba («la marine israélienne est présente sur l’île de Tiran depuis 1949»). Le 5 juin 1967, Israël bombarde l’Egypte et sort victorieuse du conflit le 10 juin 1967. La deuxième guerre s'apparente à une revanche pour les Egyptiens qui ne se sont pas remis de leur défaite face aux Israéliens à l'issue de la guerre de Six jours. Les tensions entre les deux pays sont palpables et elles sont incarnées par un contentieux territorial. A l’instar des pays arabes, Le Caire souhaite que Tel Aviv rétrocède les territoires conquis en 1967 («le Sinaï égyptien et la bande de Gaza sous administration égyptienne, la Cisjordanie et Jérusalem-Est sous contrôle jordanien depuis 1950 et le Golan syrien»). Le 6 octobre 1973, le jour de la grande fête juive de Yom Kippour (le grand pardon), les forces égyptiennes et syriennes attaquent Israël. Un cessez-le-feu est prononcé le 25 octobre 1973 et ses modalités sont précisées le 11 novembre de la même année par l’accord dit du «kilomètre 101», situé entre Le Caire et Suez, où la paix est signée entre les parties belligérantes.  (AFP ARCHIVES / IPPA FILES / AFP)

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