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Le nouveau canal de Suez forge la gloire du président Sissi

Projet pharaonique ! Le jugement est souvent critique en ce qui concerne la réalisation de ce nouveau canal. Pourtant, le retour sur investissement n'est pas seulement économique. En effet, le pouvoir joue sur la corde patriotique pour asseoir sa légitimité.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Vue du canal de Suez a Ismalia, à l'est du Caire. (AFP)

Cher, très cher ! Surtout pour un pays qui cherche désespérément de la croissance, victime de la chute du  tourisme.
Pour le percement du nouveau canal, la facture s’élève à 6,5 milliards d’euros. Certes d’ici 2023, le trafic et les revenus des droits de passage devraient doubler, passant de 5 à 11 milliards d’euros annuels.
 
Une hyper zone industrielle
Mais les travaux ne se limitent pas au canal. Il s’agit également de créer sur les rives d’immenses zones industrielles. On y trouverait des commerces, des ports, et un centre de services pour les navires. Un vieux projet présent déjà dans les cartons d’Hosni Moubarak. Un investissement global de 78 milliards d’euros avec à la clé, espèrent-on, un million d’emplois.
Le doublement du trafic obtenu grâce au nouveau canal devrait selon les autorités attirer les investisseurs dans le secteur.
 
Lutter contre les terroristes
Ainsi le  retour sur investissement est aussi politique. L’enjeu est de répondre aux djihadistes installés dans le désert du Sinaï, par le développement économique. Là où il y a du travail le terrorisme recule. Le magazine OrientXXI rapporte les propos de Mohab Mamish, le président de l’Autorité du canal de Suez. «Moins les zones sont développées, plus le terrorisme apparait».
 
Nationalisme
Une préoccupation respectable qui cache mal cependant l’exaltation d’un nationalisme  plus classique. Le canal de Suez est en effet aux yeux des Egyptiens le symbole de l’Egypte moderne. 100.000 ouvriers sont morts en le perçant au profit des nations coloniales.
Et c’est Nasser qui en 1956, en nationalisant le canal a rendu au peuple égyptien sa fierté.
 
Le délai très court demandé (et respecté) pour le percement du nouveau canal (un an au lieu de trois) est aussi moteur d’orgueil national.
D’ailleurs le peuple égyptien a été appelé à financer les travaux. En une dizaine de jours, les 6 milliards d’euros ont été réunis, à 80% auprès de petits porteurs.
 
Al-Sissi légitimé
Alors le maréchal Al–Sissi, comme Pharaon avant lui, va profiter de l’évènement que constitue l’inauguration du canal. Les 5.000 invités présents dont plusieurs chefs d’Etat, vont assoir la légitimité du nouveau raïs. Oublié le coup d’état et les milliers de morts de la répression.
 
Les financements viendront certainement de la péninsule arabique. Les Emirats et le Koweit ont déjà promis 12 milliards d’euros. Au point que certains observateurs pensent que cette relance économique par des grands travaux pourrait aboutir. Sur le plan politique, les bénéfices sont déjà tombés.

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