Les hommes de Kadhafi ont perdu le contrôle de Tobrouk (Est), et à Tripoli, ils peinaient à mobiliser mercredi
Quelques dizaines de voitures tournaient en klaxonnant sous une pluie battante sur la place Verte, dans la capitale libyenne, au lendemain du discours télévisé du colonel Kadhafi appelant ses partisans à descendre dans la rue et menaçant ses opposants d'un bain de sang.
Une équipe de France 2 a pu se rendre dans l'est de la Libye ( voir notre vidéo).
A Tripoli, mercredi, la plupart des commerces étaient fermés et les rues étaient presque désertes, à une heure où elles sont habituellement embouteillées. Mais de longues files d'attente s'étaient formées devant les boulangeries et les stations d'essence.
2000 morts à Benghazi ?
Un médecin français de retour de Benghazi a estimé à "plus de 2000" le nombre de morts dans la deuxième ville du pays. Dans un témoignage publié sur le site du Point, il parle de morts par centaines. Il évoque "un carnage", et "des tirs de mortier et carrément de roquettes anti-aérienne, directement dans la foule". Les estimations faisant état d'un millier de morts en Libye sont crédibles, a jugé mercredi le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini.
Les violences de ces derniers jours ont fait 300 morts, 242 civils et 58 militaires, selon des chiffres officiels publiés mardi soir avant une conférence de presse de Seif al-Islam, fils de Mouammar Kadhafi. Il s'agit du premier bilan officiel.
Les violences ont fait au moins 640 morts dans le pays, dont 275 à Tripoli et 230 à Benghazi, selon un autre bilan actualisé, celui que la Fédération internationale des ligues de droits de l'homme (FIDH) a fourni mercredi.
Les habitants contrôlent Tobrouk
Les envoyés spéciaux de France 2, Martine Laroche-Joubert et Jean-François Monier, parmi les premiers journalistes étrangères à entrer en Libye, ont passé la frontière égyptienne et se sont rendus à Tobrouk (est), où les habitants ont pris le contrôle après trois jours de combats avec les forces de Kadhafi. L'équipe de France 2 a tourné dans cette ville des images de Libyens en liesse, qui se proclament "hommes libres de la Libye", déchirant le Livre vert de Kadhafi et foulant au pied son portrait. A Tobrouk, les opposants ont abandonné le drapeau de la Jamahiriya de Kadhafi et brandissent un drapeau à bandes verte, noire et rouge, comme celui des débuts de l'indépendance.
Selon la BBC, l'est de la Libye est sous le contrôle de l'opposition. Depuis mardi, plusieurs journalistes étrangers sont entrés dans l'est du pays. Jusqu'à maintenant, les informations en provenance de Libye sont rares. Il est difficile d'identifier et vérifier les différents témoignages et bilans provenant de l'intérieur du pays et les journalistes étrangers ne sont pas autorisés à se rendre sur place depuis le début des violences. Les autorités ont menacé mercredi d'arrestation les journalistes entrés illégalement en Libye.
Les reporters libyens ne peuvent pas non plus aller à Benghazi, bastion de l'opposition, où il y a eu de nombreux morts. La chaîne de télévision quatarie Al-Jazira a accusé lundi les services de renseignements libyens de brouiller son signal dans le pays.
Les défections se multiplient, un pilote refuse de bombarder
Dans l'est du pays, un avion de chasse s'est écrasé près d'Ajdabiya. Son pilote et son copilote avaient reçu l'ordre de bombarder Benghazi, la deuxième ville du pays. Ils ont refusé d'obéir et ont sauté en parachute, laissant leur appareil s'écraser.
Les défections se multiplient. La dernière en date, selon Al Jazira: celle du ministre de l'Intérieur Libyen, Abdul Fatah Younis, qui a annoncé son soutien à la "révolution du 17 février". Le ministre a exhorté l'armée à passer dans le camp du peuple, selon la chaîne qatarie. Le ministre de la Justice avait déjà annoncé sa démission lundi.
De nombreux diplomates à l'étranger ont aussi pris leurs distances avec Tripoli. Ainsi les ambassadeurs de Libye en Inde, en Australie, en Malaisie et au Maroc ont démissionné. Par ailleurs, une coalition de dignitaires musulmans libyens a rendu publique une déclaration appelant tous les musulmans à se soulever contre le régime actuel.
Des témoignages d'horreur
Des Tunisiens qui arrivaient de la capitale libyenne ont raconté mardi à l'AFP des tirs, des viols, des blessés perdant leur sang sur le bitume et des habitants qui se terrent. Des habitants de Fachloum et de Tajoura, quartiers de la banlieue de Tripoli, ont fait état lundi soir de véritables "massacres". Selon des témoignages recueillis au téléphone par l'AFP, les combats ont toutefois cessé mardi à Benghazi.
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