Législatives : des couacs pour les Français de l'étranger
Pour la première fois, les Français résidant à l'étranger pourront élire en juin leurs propres députés. Le vote est déjà confronté à des problèmes d'organisation, suscitant l'inquiétude de parlementaires.
Les Français de l'étranger pourront-ils vraiment élire leurs députés en juin ? Rien n'est moins sûr car l'organisation des législatives les concernant connaît un démarrage difficile. Pour la première fois, un million d'électeurs établis hors de France sont invités à désigner onze députés chargés de les représenter, dans autant de circonscriptions dont certaines sont vastes comme deux continents. A trois mois du premier tour, le 10 juin, les dispositifs de vote par correspondance et par internet sont remis en cause par des parlementaires PS et UMP, qui craignent que certains électeurs ne puissent exercer leur droit de vote. Revue de couacs signée FTVi.
• Vote par correspondance : le facteur n'est pas passé...
La poste, on a tous à y gagner ? Pas forcément à l'étranger, où l'efficacité des services postaux varie énormément d'un pays à l'autre. "Les postes africaines ou même européennes - je pense à l'Italie - n'ont pas toutes la même vitesse que La Poste française", rappelle le sénateur UMP des Français de l'étranger Robert Del Picchia. Ce facteur logistique inquiète quatre sénateurs PS, qui ont affirmé le 23 février dans un communiqué que les électeurs "risquent de ne pas pouvoir voter au second tour dans la plupart des circonscriptions, très vastes, où la poste ne sera pas en mesure de transmettre et d'assurer le retour du matériel de vote" à temps.
Ces quatre sénateurs socialistes des Français de l'étranger ont par ailleurs demandé un report de la date limite d'inscription pour le vote par correspondance, fixée au 1er mars. Ils suggèrent le 1er mai, tandis que Robert Del Picchia souhaite qu'elle soit repoussée au 1er avril. Selon ce dernier, "il faut qu'un maximum d'électeurs puisse s'inscrire, surtout que le vote par correspondance représente bien la moitié des bulletins".
• Vote par internet : des tests inquiétants
Les électeurs refroidis par les modalités du vote par correspondance voudront peut-être se reporter sur le vote en ligne, grande nouveauté de ces législatives, comme le souligne le site du Journal du Dimanche. Un scrutin fictif a été organisé par le ministère des Affaires étrangères auprès de 15 000 volontaires début février pour tester le dispositif. Résultat : "Seul un tiers des volontaires a réussi à enregistrer son vote", s'inquiète le sénateur socialiste des Français de l'étranger Jean-Yves Leconte. "Le ministère a tellement voulu sécuriser le vote que beaucoup de configurations d'ordinateur se sont révélées inadaptées, ce qui laisse présager une efficacité très moyenne du dispositif."
Les expatriés pourront toujours s'en remettre au vote par procuration ou au vote à l'urne, même si ce dernier sera lui aussi problématique dans certaines zones. "Le bureau de vote le plus proche pour un Français de Vladivostok sera à Moscou", illustre Jean-Yves Leconte, rappelant que nombre d'électeurs vivent à des centaines de kilomètres des bureaux. Autant de difficultés d'organisation qui risquent de réduire "singulièrement" le taux de participation, selon les sénateurs socialistes. En 2007, il avait été de 42,1% pour le second tour de la présidentielle - contre plus de 80% en métropole -, sans possibilité de vote par internet ou par correspondance.
• Vote non grata au Canada
Pas de ça chez moi ! Le gouvernement canadien refuse que son territoire soit inclus dans une circonscription française et qu'une campagne électorale s'y déroule, comme le rapporte le site français Slate. La France pourrait être contrainte de se contenter de ses bureaux consulaires pour accueillir le scrutin. "Cela ne passera pas, prévient Jean-Yves Leconte. Les 50 000 Français de Montréal ne pourront pas tous y voter en une journée", d'autant que le consulat général se trouve au dixième étage d'un immeuble.
• Les étranges voyages des ministres candidats
Dernier point polémique : la confusion des casquettes pour Frédéric Lefebvre, Thierry Mariani et Marie-Anne Montchamp. Tous trois sont membres du gouvernement et candidats aux législatives pour représenter les Français de l'étranger. La sénatrice socialiste Claudine Lepage a dénoncé "une utilisation plus que contestable" de leurs fonds ministériels pour financer des "déplacements de campagne" aux Etats-Unis, en Chine et au Benelux, dans une question adressée au ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, le 23 février.
Sur 77 jours de déplacement à l'étranger du ministre des Transports Thierry Mariani, 62 ont eu lieu dans la circonscription qu'il vise (Asie-Pacifique), soit 80% de ses voyages, comme le relève le Lab d'Europe 1 à partir du blog de la candidate écologiste aux législatives Janick Magne. Cette première élection des députés des Français de l'étranger a déjà des airs d'essuyage de plâtres.
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