Le président français a plaidé lundi à l'Onu pour une taxe sur les transactions financières
Nicolas Sarkozy a été l'un des premiers chefs d'Etat à prendre la parole, lundi, devant l'Onu réunie pour étudier les objectifs du millénaire pour le développement.
Fixés en 2000, ces objectifs consistent notamment à réduire de moitié la pauvreté dans le monde, assurer l'éducation primaire pour tous et promouvoir l'égalité des sexes.
Sarkozy: "pourquoi attendre ?"
"Les financements innovants, la taxation des transactions financières, nous pouvons le décider ici. Pourquoi attendre ? La finance s'est mondialisée, au nom de quoi nous ne demanderions pas à la finance de participer à la stabilisation du monde en prélevant sur chaque échange financier une taxe ?", a lancé Nicolas Sarkozy.
"J'essaierai, pendant l'année de ma présidence du G20 et du G8, de promouvoir l'idée des financements innovants", a-t-il ajouté.
"Je veux dire ma conviction qu'alors que tous les pays développés sont en déficit, il faut trouver de nouvelles sources de financement pour la lutte contre la pauvreté, l'éducation et pour la résolution des grandes pandémies sanitaires de la planète", a insisté le président français.
L'association humanitaire Oxfam a immédiatement appuyé cette initiative. "Oxfam France salue l'engagement de la France en faveur des financements innovants et notamment sur les taxes sur les transactions financières", souligne l'ONG, selon laquelle "une taxe de 0,05% pourrait générer 500 milliards de dollars par an pour le développement".
La France co-préside avec le Japon et la Belgique un "Groupe pilote" de 60 pays engagés dans la mise au point de financements innovants. Billets d'avion, tourisme, internet, téléphonie mobile, transactions financières: les financements innovants peuvent prendre la forme de taxes diverses.
Plus généralement, Nicolas Sarkozy a exhorté les pays riches à poursuivre leur aide à ceux en développement, en insistant sur ceux d'Afrique.
Pour montrer l'exemple, il a annoncé une hausse de 20% sur les trois prochaines années de la contribution de la France au Fonds mondial de lutte contre le sida, dont son épouse Carla est une des ambassadrices, qui passera de 300 à 360 millions d'euros par an. Son geste n'a été applaudi que du bout des lèvres par les ONG, qui souhaitaient un doublement de cette enveloppe.
Juste avant son intervention à la tribune, Nicolas Sarkozy a profité de son séjour new-yorkais pour tenter, à la faveur , de tirer un trait sur le "couac" qui a perturbé la semaine dernière le couple franco-allemand autour de la question des Roms.
L'économiste américain James Tobin avait suggéré le premier dans les années 70 une taxe sur les transactions financières pour ralentir la volatilité sur le marché des changes, d'où le nom de "taxe Tobin". L'idée a resurgi avec la crise, avec des modalités et objectifs différents.
Aujourd'hui, le but est de faire participer les banques au financement de la crise. Dans l'esprit de ses promoteurs, la taxe permettrait aussi à la fois de freiner la spéculation et d'aider au financement de l'aide au développement des pays pauvres ou à celui de la lutte contre le réchauffement climatique.
De nombreux pays européens militent pour cette taxe. Mais ils butent contre l'opposition résolue des pays asiatiques, du Canada, ou encore de l'Australie. Quant aux Etats-Unis, ils restent sur la réserve.
Or une telle taxe, si elle n'est imposée que dans un seul pays ou un seul groupe de pays, risque d'être contre-productive en se traduisant par une fuite des capitaux vers des cieux plus cléments. La Suède, qui l'a testée dans les années 80, l'a appris à ses dépens.
C'est pourquoi Paris en a fait à nouveau une priorité au niveau mondial lors de sa présidence du G20 qui débute en novembre. A défaut d'accord global, l'Allemagne notamment, est favorable à ce qu'elle soit mise en oeuvre au niveau européen.
Mais la Commission européenne est sceptique. Elle se montre moins critique en revanche sur une éventuelle taxe sur les "activités financières", déjà appliquée par plusieurs pays, portant sur les profits ou le bilan des institutions financières.
100 milliards de dollars pour atteindre les objectifs
Lundi, le chef de l'Onu a appelé les dirigeants du monde à s'engager en faveur des objectifs du millénaire pour le développement (OMD). "L'horloge tourne, avec encore beaucoup à faire", a dit M. Ban à l'ouverture du sommet de trois jours à l'ONU à New York.
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a évalué à plus de 100 milliards de dollars les financements nécessaires pour atteindre les OMD.
Dans un document déjà mis au point qui doit être adopté d'ici mercredi, les chefs d'Etat se déclarent "profondément préoccupés de constater que le progrès n'est pas à la hauteur, tant s'en faut, de ce qui serait nécessaire".
Mais certains experts doutent que les objectifs puissent être atteints d'ici à cinq ans alors que la crise économique a engendré des réductions de l'aide publique au développement tout en provoquant un accroissement des inégalités.
Dominique Strauss-Kahn, directeur général du Fonds monétaire international (FMI) a souligné que "des années de progrès ont été perdues et la dynamique a déraillé du fait de la crise qui n'est pas seulement économique mais aussi alimentaire et énergétique".
Dans un panel de discussions organisé par la chancelière Angela Merkel en marge du sommet, celle-ci a clairement dit qu'il ne serait pas possible d'atteindre tous les OMD d'ici 2015.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.