Le directeur général de BP, Tony Hayward, va abandonner la gestion quotidienne de la marée noire aux USA
Celle-ci va être confié à un autre responsable du groupe pétrolier, Robert Dudley, un citoyen américain, a déclaré vendredi son président, Carl-Henric Svanberg, sur la chaîne Skynews.
Auditionné jeudi au Congrès américain, Tony Hayward avait été mis en difficulté par les parlementaires présents.
Un porte-parole de BP aux Etats-Unis a tempéré l'annonce de l'éviction de Tony Hayward. Il a assuré que pour l'instant, ce dernier continuait de diriger les mesures de BP face à la marée noire, ajoutant que "M. Dudley et son équipe prendront le relais une fois que la crise immédiate sera passée".
Carl-Henric Svanberg a par ailleurs cherché à rassurer sur la capacité de son groupe
à surmonter cette crise, qui a suscité ces dernières semaines d'énormes craintes parmi les investisseurs, tout en répétant que le groupe n'avait aucune idée du montant final de l'addition qu'il devra supporter. "BP est une entreprise très solide" et "nous y survivrons", a assuré le dirigeant. Une disparition du groupe à cause de cette catastrophe, "ne peut pas se produire", a-t-il ajouté.
Le président russe Dmitri Medvedev avait exprimé jeudi son inquiétude au sujet de l'avenir de BP, présent en Russie à travers la coentreprise TNK-BP, troisième producteur d'or noir du pays, dans un entretien au Wall Street Journal, évoquant le danger d'une éventuelle "annihilation" du groupe britannique.
Les opérations sur le terrain
La compagnie pétrolière récupère désormais 25.000 barils de pétrole par jour du puits endommagé, mais de grandes quantités de brut continuent de se déverser dans le golfe du Mexique.
Jusqu'à présent, BP récupérait 15.000 barils par jour, alors que le puits situé à 1500 m de profondeur et à 80 km des côtes américaines crache chaque jour entre 35.000 et 60.000 barils (jusqu'à 9,5 millions de litres) de pétrole.
L'audition de Tony Hayward au Congrès des Etats-Unis
"Sous votre direction, BP a pris les risques les plus excessifs", a déclaré d'emblée le démocrate Henry Waxman au début de l'audition du directeur général de la compagnie, jeudi au Congrès américain..
"BP a pris des raccourcis pour économiser un million de dollars par-ci, quelques heures ou jours par-là. Et maintenant, l'ensemble du golfe (du Mexique) en paie le prix", a-t-il ajouté.
Cette attaque a donné le ton d'une séance difficile pour Tony Hayward, visiblement affecté, mais dont les bévues passées et la volonté de minimiser l'ampleur de la catastrophe ont heurté l'opinion. A cela s'ajoute le fait que la perspective des élections de mi-mandat de novembre prochain aiguise les prises de position des parlementaires.
Les membres de la commission parlementaire, dont certains ont agité des images d'oiseaux mazoutés au cours de cette audition très médiatisée, ont reproché au groupe pétrolier basé à Londres d'avoir ignoré les mises en garde des entreprises partenaires et de ses propres employés. Ils lui ont aussi reproché d'avoir choisi l'option de forage la plus rapide et la moins onéreuse. Une option augmentait pourtant le risque de rupture du puits.
La déclaration préliminaire de Tony Hayward, durant laquelle il s'est dit "profondément désolé", a été interrompue par une femme dont les mains étaient peintes en noir et qui a crié à tue-tête: "Vous devriez être poursuivi pour crime, Tony !" Elle a été évacuée de la salle par la police.
Le directeur général de la compagnie pétrolière a déclaré que BP faisait son maximum pour contenir la marée noire provoquée par l'explosion de la plate-forme Deepwater Horizon, qui a fait 11 morts le 20 avril. "L'explosion et l'incendie de Deepwater Horizon, ainsi que la marée noire qui s'en est suivie, n'auraient jamais dû se produire et je suis profondément désolé que cela ait été le cas", a dit Tony Hayward.
"Je pense que tous les accidents sont évitables", a-t-il déclaré par ailleurs tout en précisant n'avoir décelé aucun comportement imprudent au sein de son entreprise.
A plusieurs reprises, le patron de BP a refusé de donner des précisions à propos des enquêtes sur la marée noire. Il a estimé qu'il était trop tôt pour expliquer les causes de cet accident. Il a également répété qu'il n'était pas personnellement impliqué dans les décisions prises au sujet de l'équipement et des méthodes utilisées pour creuser le puits Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique.
Henry Waxman l'a interrompu: "Vous n'assumez pas vos responsabilités. Vous bottez en touche !" Le patron de BP a également été tancé par le démocrate Bart Stupak, qui lui a rappelé qu'il avait dit espérer lui aussi la fin de la crise "pour retrouver sa vie d'avant". "Je suis sûr que vous retrouverez votre vie d'avant, que vous rentrerez en Angleterre avec un parachute doré. Mais nous aux Etats-Unis, nous restons avec les conséquences dramatiques du mépris de BP pour la sécurité", a lancé l'élu.
Tony Hayward a aussi rappelé que BP répondrait aux "conséquences économiques" de la marée noire. La veille, le groupe avait accepté de mettre 20 milliards de dollars de côté sur un compte bloqué pour les indemnisations, après une rencontre avec le président Barack Obama.
Ce sujet est revenu au cours de l'audition avec une intervention remarquée du républicain Joe Barton, estimant que la Maison Blanche s'était rendue coupable d'"extorsion de fonds". "J'ai honte de ce qui s'est passé à la Maison Blanche hier (...) Je présente mes excuses", a-t-il dit.
Le porte-parole de Barack Obama, Robert Gibbs, a aussitôt réagi en soulignant que Joe Barton semblait plus enclin à défendre les "grandes entreprises qui ont provoqué la catastrophe" que ses victimes. De son côté, le vice-président Joe Biden a dénoncé des propos "scandaleux" et "incroyablement déconnectés de la réalité".
Graphique animé présentant les différentes estimations de la quantité de pétrole s'échappant chaque jour de la plateforme de BP dans le golfe du Mexique, et l'évolution de la marée noire au large des côtes américaines.
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