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La finance islamique, un vivier d'opportunités pour l'aide humanitaire

Le financement humanitaire fait face à un déficit annuel de 15 milliards de dollars chaque année, selon les Nations Unies. Un rapport préconise, entre autres, de miser sur les taxes de solidarité et de s'appuyer sur le financement social islamique.
Article rédigé par Falila Gbadamassi
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Billets en dollars et en euros. Cliché pris le 29 septembre 2015. (JAUBERT / ONLY FRANCE)

Comment combler «le fossé grandissant entre le nombre croissant de personnes ayant besoin d'assistance et les ressources disponibles»? Cette question est celle à laquelle les Nations Unies ont demandé à des experts de répondre. Leur réponse est un rapport publié le dimanche 17 janvier 2016. Il préconise, notamment, de faire appel à de nouvelles sources de financement pour apurer le déficit annuel de 15 milliards de dollars du financement humanitaire. 

«Nous sommes partis de faits et de chiffres austères: 125 millions de personnes dans le besoin; un chiffre record de 25 milliards de dollars par an pour les aider; mais, en dépit de cela, les besoins continuent de dépasser les ressources», ont déclaré les co-présidents du groupe de haut niveau, la Bulgare Kristalina Georgieva, vice-présidente de la Commission européenne, et le sultan malais Nazrin Shah, souverain de Perak (Malaisie). «Un écart de 15 milliards de dollars, c'est beaucoup d'argent mais dans un monde dont le PIB s'élève à 78.000 milliards de dollars, cela ne devrait pas être impossible à trouver», ont-ils ajouté. Grâce en partie à la finance islamique. 

«La vice-présidente de la Commission estime que 3 à 5 milliards de dollars, sur les 15 milliards de dollars qui manquent à l'aide humanitaire, pourraient provenir de la finance islamique», rapporte Reuters. 

Les ressources inexploitées du financement social islamique
La finance islamique qui produit déjà de nombreux instruments financiers de solidarité est un territoire inexploité. Parmi eux, le waqf, la zakat (aumône musulmane) ou encore le sukuk. «Le waqf (ou habs) est une institution islamique. Elle permet de retirer de la propriété privée un bien de manière définitive (...), puis d’affecter son usufruit à des œuvres de bienfaisance ou d’intérêt public», explique-t-on dans Saphirnews.

Le sukuk, quant à lui, est considéré comme étant «l’équivalent islamique des obligations». «Cependant, contrairement aux obligations conventionnelles, qui confèrent simplement la propriété d’une dette, le sukuk accorde à l’investisseur une part d’un actif, ainsi que des flux de trésorerie et des risques proportionnés», peut-on lire sur le site de la Banque islamique de développement (BID). 

Les ressources de la finance islamique sont les bienvenues dans la mesure où, selon le rapport, 90% des crises humanitaires que connaît la planète aujourd’hui se produisent dans les pays membres de l’Organisation de la coopération islamique. En outre, 31 des 33 conflits qui ont lieu en ce moment le sont dans des pays à majorité musulmane. Plusieurs institutions financières islamiques réfléchissent déjà sur la façon dont le waqf,  la zakat  ou les obligations sukuk pourraient participer au financement humanitaire. La banque islamique malaisienne Maybank Islamic plancherait ainsi sur l’émission d’un «sukuk humanitaire».  

Miser sur les taxes de solidarité
Par ailleurs, le rapport de l'ONU n'oublie pas d'évoquer des recettes déjà connues, comme la taxe de solidarité. A l'instar de la taxe Tobin (prélevée sur les transactions financières) qui demeure matière à débat, ou celle prélevée sur les billets d'avion par l'ONG Unitaid dans le cadre de la lutte contre le sida et le paludisme. Cette dernière avait permis de récolter 1,6 milliard de dollars entre 2006 et 2011. Le groupe d'experts propose que les carburants puissent constituer une nouvelle assiette pour une taxe de solidarité. Ces taxes sur les billets d'avions et les carburants permettraient de financer, par exemple, les services de santé dans les camps de réfugiés ou les zones urbaines qui accueillent des populations déplacéees. 

«Avant de publier son rapport, rapporte Reuters, la commission d'experts onusienne a pris contact avec la Fédération internationale de football (Fifa) et envisagé comment des fonds pourraient être levés grâce à une "taxe mondiale sur le luxe" ou des micro-prélèvements sur des achats de loisirs ou des courses en taxi, par exemple sur les utilisateurs de l'application Uber». Concerts, films, compétitions sportives pourraient être être mis à contribution, précise l'AFP, pour financer des projets humanitaires. 

Le rapport évoque d'autres sources de financement liées, par exemple, aux loteries. La pratique existe dans certains pays en ce qui concerne des actions de développement. Le document attire également l'attention sur la manne que peut représenter les biens confisqués dans le cadre des sanctions prises par les Nations Unies contre certains régimes. 

Les conclusions du groupe d'experts seront soumises à la communauté internationale en mai 2016 lors du premier Sommet humanitaire mondial qui se tiendra en Turquie. Selon Reuters, «les 5.000 délégués à ce sommet, où seront présents des gouvernements, des agences de l'ONU, des organisations caritatives et le secteur privé, seront ensuite invités à transformer ces propositions en objectifs, qui ne seront cependant pas contraignants»
 
 

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