"Notre idée est d'affronter le symbole" : en Italie, la ville natale de Mussolini va créer un musée pour enrayer le culte du Duce
Le maire de Predappio (Italie), la ville natale du dictateur, veut créer un musée du fascisme pour que la commune devienne un lieu de mémoire, sans nostalgie néo-fasciste.
Alors que l'Italie célèbre le jour de la Libération le 25 avril, certains s'apprêtent à commémorer la mort de Benito Mussolini, exécuté trois jours plus tard, le 28 avril 1945. Chaque année, la petite ville de Predappio, 6 000 habitants, dans le centre-est de l'Italie, voit déferler des nostalgiques du "Duce". C'est ici qu'est né le dictateur et fondateur du fascisme et c'est aussi ici qu'il est enterré.
Mais, le maire centre-gauche de Predappio, Giorgio Frassineti, espère éradiquer ces pèlerinages néo-fascistes en créant un musée du fascisme dans sa ville. Ce serait le premier du genre en Italie.
Le lieu choisi pour le musée est particulièrement symbolique. Il s'agit de l'immense bâtisse de 2 000 m2 qui abritait le siège régional du parti fasciste de Benito Mussolini, une ville nouvelle bâtie dans les années 1920 sur ordre du dictateur, autour de sa maison natale. "Ici, c’était le centre de la vie politique et 'culturelle', indique Carlo Giunchi, le conseiller culturel de Predappio sur le chantier. Notre idée est d’affronter le symbole, non pas en l’effaçant mais en le transformant comme ils le font en Allemagne. En Italie, jusqu’ici, tous les musées sur l’histoire du XXe siècle ne parlent que de la guerre et de la Résistance."
La commune rêve de voir les nostalgiques du régime mussolinien remplacés par des visiteurs du musée. Trois fois par an, des dizaines de milliers de partisans viennent se recueillir sur sa tombe : le 28 avril (sa mort), le 29 juillet (sa naissance) et le 29 octobre (sa prise de pouvoir avec "la marche sur Rome").
"Le mythe de l'âge d'or italien"
"Les gens qui viennent dans cette crypte laissent des messages du type 'reviens et remets de l’ordre', déplore le maire Giorgio Frassineti. Des tas de personnes ont en tête le mythe d’un âge d’or italien, d’une Italie qui était alors respectée. Nous nous devons d’expliquer de manière claire ce qu’était le fascisme. Ce musée sera comme un puits. Tout en profondeur. Dans le sous-sol, on racontera la guerre, les lois raciales, le colonialisme."
Quand tu sortiras de ce musée, tu n’auras plus du tout envie d’acheter un briquet avec la tête de Mussolini !
Giorgio Frassineti, maire de Predappioà franceinfo
Dans la rue principale de la commune, trois magasins vendent ouvertement des bustes du Duce, des livres et des gadgets en tout genre à la gloire du fascisme. Et les affaires marchent toujours aussi bien en 2018, confie le gérant de l’une de ces boutiques.
Ce projet de musée ne fait pas que des adeptes. Plusieurs historiens, notamment, préfèreraient un lieu plus neutre pour un tel musée. La polémique rebondit régulièrement, mais les premiers financements - la moitié des 7 millions d’euro nécessaires- sont arrivés, l'architecte doit être nommé en juin et les premiers coups de pioche seront donnés fin 2018.
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