Hosni Moubarak a changé de gouvernement et nommé un vice-président, poste qui n'existait pas
Le chef du Renseignement égyptien, Omar Souleimane, a prêté serment samedi en tant que vice-président, poste qui n'existait pas depuis l'arrivée au pouvoir de Hosni Moubarak en 1981.
La police a abattu samedi 17 personnes qui tentaient d'attaquer deux commissariats de police dans le gouvernorat de Beni Souef, au sud du Caire, selon des témoins.
La poursuite des manifestations
Malgré l'avancée du couvre-feu à 16h00 au lieu de 18h00, des milliers de personnes ont continué à manifester au Caire.
En soirée, samedi, des milliers de personnes étaient toujours massées dans les rues du Caire et dans d'autres villes du pays après une journée marquée par des heurts sanglants entre manifestants et forces de sécurité qui ont fait usage de gaz lacrymogènes et de balles caoutchoutées.
Des milliers de manifestants s'étaient à nouveau rassemblés samedi dans la capitale pour obtenir le départ du président Hosni Moubarak, au pouvoir depuis 30 ans. Dégage, dégage", scandaient-ils sur la place Tahrir, sous l'oeil de l'armée déployée en masse au lendemain du . Selon Al Jazira, on notait aussi des manifestations à Alexandrie et à Suez. Des images montraient des scènes de fraternisation entre l'armée et les manifestants samedi soir dans les rues d'Alexandrie.
Dans la soirée cependant, la situation semblait plus calme que la veille dans le centre du Caire, même si de nombreuses personnes continuaient à défier le couvre-feu
Selon le ministère égyptien de la Santé samedi, 38 personnes ont trouvé la mort dans les manifestations de vendredi et 48 depuis mardi. Il y a 1900 blessés, dont 500 policiers, selon les autorités. Le bilan des victimes pourrait être plus important, selon plusieurs sources. Des sources médicales évoquent 73 morts lors des manifestations de vendredi et samedi.
L'armée est intervenue lors d'une tentative d'assaut contre le ministère égyptien de l'Intérieur. Selon des sources officielles, l'intervention de l'armée aurait fait cinq blessés alors que la chaîne Al Jazira parlait de trois morts. Selon des témoins, les manifestants ont été blessés lorsque la police égyptienne a ouvert le feu sur le groupe qui essayait de forcer l'entrée du ministère. On ignore si les forces de l'ordre ont tiré à balles réelles ou fait usage de balles en caoutchouc.
Création d'un poste de vice-président
Le chef du Renseignement égyptien, Omar Souleimane, a prêté serment samedi en tant que vice-président, premier poste du genre depuis que le président Hosni Moubarak a pris le pouvoir en 1981. Le président Moubarak avait refusé depuis son arrivée au pouvoir de créer un tel poste, qu'il occupait lui même lors de l'assassinat de Sadate.
Réputé intègre, le chef du renseignement, régulièrement cité parmi les candidats potentiels à la succession du raïs égyptien, est un proche allié de Moubarak. Il s'est illustré par ses efforts de médiation au Proche-Orient, recherchant notamment à faciliter le dialogue interpalestinien entre le Fatah et les islamistes du Hamas.
Nouveau gouvernement
A la suite de son annonce faite dans la nuit de vendredi à samedi, le président a nommé un nouveau gouvernement, après la démission du précédent. Il a nommé Ahmad Chafic premier ministre. Il s'agit d'un ancien commandant de l'armée de l'air qui occupait le poste de ministre de l'aviation de civile dans le gouvernement sortant.
Appel des Frères musulmans à une "passation pacifique" du pouvoir
Samedi, les Frères musulmans ont appelé à une passation pacifique du pouvoir.
La confrérie a affirmé par communiqué son soutien au "soulèvement pacifique béni" et appelé à la mise en place d'"un gouvernement de transition sans le Parti national démocrate (au pouvoir) qui organise des élections honnêtes et une passation pacifique du pouvoir".
ElBaradei : Moubarak "doit partir"
Le président égyptien Hosni Moubarak "doit partir", a déclaré samedi l'opposant le plus en vue et Nobel de la Paix Mohamed ElBaradei, sur plusieurs médias. Il a ajouté que la nomination vice-président et Premier ministre n'était pas suffisante.
Le pouvoir fait appel à l'armée
L'armée égyptienne, appelée en renfort de la police débordée par les manifestations, a pris position aux principaux carrefours et près des bâtiments officiels.
Elle a enjoint samedi le "grand peuple d'Egypte" à "respecter le couvre-feu" et à ne pas se rassembler dans les lieux publics, dans un communiqué reproduit par l'agence officielle Mena.
"Allahu Akbar!" (Dieu est le plus grand), "le peuple veut la chute du président", scandaient aussi les manifestants, au milieu d'une ville aux allures de champ de bataille avec épaves de voitures calcinées en travers des rues, gravats jonchant le sol, et une épaisse fumée noire émanant du siège du parti au pouvoir.
Selon l'AFP, un supermarché Carrefour a été pillé samedi matin à la périphérie du Caire.
Le siège de la Sûreté de l'Etat attaqué à Rafah
Le siège de la Sûreté de l'Etat de la ville égyptienne de Rafah , à la frontière avec la bande de Gaza, a été attaqué samedi lors d'accrochages entre manifestants et policiers qui ont fait trois morts dans les rangs de la police, selon des témoins. Ils ont ajouté que la police avait fait usage de balles réelles.
Heurts à Ismaïliya (canal de Suez)
Des heurts violents ont éclaté samedi dans la grande ville d'Ismaïliya, sur le canal de Suez, entre les forces de l'ordre et des milliers de manifestants demandant le départ du président égyptien Hosni Moubarak, ont indiqué des témoins.
Des momies endommagées au Musée du Caire
Des pillards se sont introduits vendredi soir dans l'enceinte du Musée du Caire, qui regorge de trésors de l'Antiquité égyptienne, et ont détruit deux momies, a annoncé Zahi Hawass, président du Conseil des antiquités égyptiennes. Il a précisé que des civils aidés par des agents de la police touristique avaient stoppé les pilleurs. Des images diffusées sur Al Jazira montraient des vitrines cassées, des objets abimés ou cassés.
Départ d'Israéliens
Les familles de diplomates israéliens en poste en Egypte et 40 autres ressortissants ont été évacués du Caire samedi à bord d'un vol spécial, a annoncé le ministère israélien des Affaires étrangères. Le ministère précise qu'il n'existe pour l'heure aucun projet de rapatriement des diplomates israéliens basés en Egypte et des informations faisant état d'une fermeture de l'ambassade ont été démenties.
La situation en Egypte est suivie de près en Israël en raison du poids de l'Egypte dans la région et des accords de paix entre les deux pays qui ont une frontière commune. Selon Haaretz, le premier ministre israélien a demandé à ses ministres de ne pas faire de commentaires sur la situation égyptienne.
Manifestation à l'étranger
Quelque trois cents personnes, des étudiants pour la plupart, ont manifesté dans le calme samedi après-midi devant l'ambassade d'Egypte à Beyrouth, réclamant le départ d'Hosni Moubarak. Quelques dizaines de personnes ont réclamé samedi à Londres aux abords de l'ambassade d'Egypte le départ du président Moubarak. Les manifestants étaient réunis en deux groupes séparés, tenus à distance l'un de l'autre par les forces de l'ordre. Le premier était rassemblé à l'appel de l'organisation islamiste "Hizb-ut-Tahrir". Non loin de là, un autre groupe se disant sans affiliation politique a réuni quelques dizaines de personnes, dont des étudiants.
Les services de téléphonie mobile partiellement rétablis
Les services de téléphonie mobile étaient partiellement rétablis en Egypte samedi en milieu de matinée au lendemain d'une journée de manifestations sans précédent pour lesquelles ces services et l'internet avaient été coupés, selon des journalistes de l'AFP.
Le Quai d'Orsay conseille de différer les voyages vers l'Egypte
"Il est conseillé de différer tout voyage qui n'aurait pas un caractère d'urgence" vers l'Egypte , souligne la rubrique Conseils aux voyageurs du site du Quai d'Orsay www.diplomatie.gouv.fr.
Appel de responsables européens
Le président Nicolas Sarkozy, la chancelière allemande Angela Merkel et le Premier ministre britannique David Cameron ont appelé le président égyptien Hosni Moubarak à "éviter à tout prix l'usage de la violence contre des civils", samedi dans une déclaration conjointe. "Nous appelons le président Moubarak à engager un processus de changement qui se traduise à travers un gouvernement à représentation élargie et des élections libres et justes", ajoutent-ils.
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