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Ukraine : sa ville natale regrette le "respectable" Ianoukovitch

Quatre jours après la destitution du président ukrainien Viktor Ianoukovitch, les évènements du week-end dernier suscitent toujours l'incompréhension d'une partie de la population ukrainienne. Et notamment dans la ville d'origine de Ianoukovitch : Yenakievo à une centaine de kilomètres de la frontière russe, dans la région de Donetsk. 
Article rédigé par Mathilde Lemaire
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Eric Damaggio Radio France)

Yenakievo est comme enveloppée dans un nuage de
particules qui pique les yeux et irritent la gorge. Autour de la ville, cinq
puits de mine. Au centre l'usine sidérurgique qui date du XIXe siècle
et fait vivre la majorité de la population et exporte dans le monde entier.
C'est dans cette usine vétuste que Ianoukovitch a commencé sa carrière. Les hauts fourneaux appartiennent maintenant à un de ses proches, l'oligarque qui
est aussi propriétaire du club de foot du Shakhtar
Donetsk.

"Ce qui m'a déçu chez lui, c'est sa mollesse face aux révoltés"

A la sortie des ateliers, les ouvriers nomment Ianoukovitch affectueusement Viktor Feodorovich. Et quand il y a des critiques,
elles sont inattendues, comme celles de Sergueï :

"Ici, on lui doit
la rénovation des routes et la construction de l'église Saint-Georges. Il a aussi fait beaucoup
de choses à la tête du pays, même si les gens  ne s'en rendront compte que
plus tard. Moi, ce qui m'a déçu chez lui, c'est sa faiblesse, sa mollesse face
aux révoltés de Kiev. Il ne devait pas laisser s'installer une telle anarchie. Maintenant s'il
fuit  je serai encore plus déçu : ça sera comme s'il nous abandonnait."
 

A la
présidentielle de 2010, Ianoukovitch avait remporté plus de 80 %
des votes à Yenakievo. Le maire de la ville est un de ses amis, membre comme lui
du Parti des régions. Valery Oleynik nous reçoit dans son bureau entre deux
grands portraits de l'ex-président. Mais il nous reprend tout de suite
quand on dit ex-président et nous prie de cesser les provocations quand on lui
demande s'il l'a eu récemment au téléphone :

"Le président
n'est pas parti. Il est toujours sur le territoire ukrainien. C'est le seul à
être légitime. Les projets de loi promulgués en ce moment par le parlement sont
illégaux et sans valeur. Les gens qui accusent notre président de meurtres
devront avancer des preuves. Mais ils n'y arriveront pas car il n'y en a pas.
Regardez les choses comme elles sont et ne déformez pas la réalité"
.

Ianoukovitch, "quelqu'un de bien, de respectable"

Marina,
mère de deux enfants, écarquille aussi les yeux quand on lui parle de
poursuites judiciaires. Ce qui la préoccupe : les révoltés de Kiev qui
pourraient bientôt mener des représailles jusqu'ici : "J'hésite à répondre
mais sa situation m'inquiète beaucoup. On ne s'attendait pas à tout ce qui se
passe pour monsieur Ianoukovitch. Ça n'augure pas de bonnes choses. Il
était un ouvrier originaire de cette ville-usine, et il a gravi les échelons
jusqu'à devenir président de l'Ukraine, ça en fait quelqu'un de bien, de respectable.
Il a fait une belle carrière, et voilà que maintenant il perd tout. "

Signe de
la fébrilité des autorités et des habitants depuis le week-end dernier,
plusieurs barrages ont été installés sur les axes qui mènent à la ville natale
de l'ancien chef d l'Etat.

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