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Radovan Karadzic : coupable de génocide, crimes de guerre et contre l'humanité

C'est la fin d'un procès de 8 ans. L'ancien président de la république autoproclamée serbe Radovan Karadzic est déclaré pénalement coupable de meurtres, persécutions, prise d'otages, crimes de guerre et crimes contre l'humanité. Un verdict, tombé le 24 mars qui rejette un des chefs de génocide, mais qui le reconnaît responsable des exactions commises de 1992 à 1995 en Bosnie-Herzégovine.
Article rédigé par Frédérique Harrus
France Télévisions
Publié Mis à jour
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La Haye (Pays-Bas), le 11 juillet 2013. Radovan Karadzic comparaît devant le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie


 (MICHAEL KOOREN / POOL / AFP)

Coupable ! C'est le verdict qui vient de tomber au terme de 8 ans de procès. Coupable des chefs d'accusation de crimes contre l'humanité, crimes de guerre et au vu d'un dossier d'un million de pages et l'audition de centaines de témoins. Pleinement responsable de dix chefs d'inculpation sur onze, il vient d'être condamné à 40 ans de prison.

Ce médecin, qui a dirigé la République autoproclamée des Serbes de Bosnie, tour à tour poète, psychiatre, épurateur ethnique, guérisseur et avocat en se défendant seul devant le Tribunal pénal international pour l'Ex-Yougoslavie (TPIY), présente une personnalité aux aspects tellement multiples que son mentor, le psychiatre Ismet Ceric, en parle comme d'un homme possédant «mille visages différents» et souffrant vraisemblablement d'un trouble de la personnalité. 

Arrêté en 2008 au terme de 13 ans de cavale, Radovan Karadzic doit répondre de l'assassinat de 8.000 hommes et adolescents bosniaques musulmans en 1995 à Srébrénica. Il est accusé d'avoir tenté, selon l'acte d'accusation, de «chasser à jamais les Musulmans et Croates de Bosnie des territoires revendiqués par les Serbes de Bosnie», mais aussi d'avoir organisé le siège de Sarajevo, au cours duquel plus d'un million de non-Serbes sont expulsés de leurs maisons. Le conflit fait au total près de 100.000 morts. Plus 20.000 femmes ont été violées. Pour ce faire, le général Ratko Mladic est à la manoeuvre. Ce dernier, poursuivi au même titre que Karadzic, tente d'ailleurs de lui laisser la seule paternité de ces exactions. Les deux hommes se renvoient mutuellement la responsabilité de ce que le TPIY a qualifié de «plus grand massacre en Europe depuis la fin de la Seconde guerre mondiale». 

Il se décrit comme un homme «doux, tolérant, avec une grande capacité à comprendre les autres». Dans un premier temps, il affirme même n'avoir jamais rien éprouvé contre les Musulmans et les Croates et nie toute volonté d'épuration ethnique. Dans un deuxième temps, il déclare que les forces serbes se battaient contre l'armée bosniaque levée pour «créer un Etat islamique au coeur de l'Europe», il affirme même qu'«Al Qaïda utilisait la Bosnie comme base de recrutement et d'entraînement», comme le rapporte Le Monde. 

Radovan Karadzic n'hésite pas, alors qu'il affirme n'avoir rien fait, à adopter une ligne de défense plutôt surprenante détaillée dans Le Monde. En effet, il accuse la communauté internationale d'avoir livré des armes à la Bosnie sous embargo, depuis l'Iran et d'autres pays islamiques, avec l'aval des Etats-Unis et sous couvert d'aide humanitaire. Et de citer à comparaître pour sa défense  -sur les conseils de Peter Robinson, un avocat chevronné- le président grec, le ministre iranien de la Défense, un ex-patron de l'OTAN, des marchands d'armes, des espions, voire Bill Clinton. 

Interrogé sur le bombardement de la place du Marché de Markale qui à fait 67 morts à Sarajevo, il se déclare victime d'un coup monté et répond que «des corps de personnes qui étaient mortes de manière naturelle avaient été pris à la morgue et mis sur la place du marché pour créer un sentiment de catastrophe». Les victimes survivantes et les familles des autres, venues assister au procès, n'arrivent pas à sourire de toutes ses allégations rocambolesques «en témoignant contre lui (devant le TPIY, ndlr), j'ai remarqué que cet homme n'avait aucun remords», a dit à l'AFP Mirsada Malagic, dont deux fils et le mari ont péri dans le massacre de Srebrenica.

Les uns voient en Radovan Karadzic un héros de la cause serbe et «son procès est une humiliation pour la République serbe (...), intenté par une justice sélective» souligne Milorad Dodik, dirigeant de l'entité serbe de Bosnie. Les autres, comme le général britannique Michael Rose, commandant des forces de l'ONU en Bosnie en 1994 voient en lui «un menteur accompli, intrinsèquement paranoïaque, un buveur invétéré qui s'était adonné à l'alcoolisme», ou décrivent «un des pires» hommes du monde. ll «croyait vraiment aux théories racistes (...) Il aurait fait un bon nazi», selon le diplomate américain Richard Holbrooke, architecte des accords de Dayton (Etats-Unis) qui ont mis fin à la guerre en Bosnie.

Lui déclarait benoîtement au TPIY en 2012: «J'ai fait tout ce qui était humainement possible pour éviter la guerre et réduire la souffrance humaine». Malgré un verdict historique, et une condamnation à 40 ans de prison, la Bosnie de 2016, regrette Srdjan Susnica commentateur bosno-serbe, porte l'«héritage politique» de Karadzic . «Tout est là: les frontières, le nom, les symboles, la légitimité juridique et politique, les municipalités ethniquement purifiées en Republika Srpska, au point que je pense qu'il a obtenu tout ce qu'il voulait», dit-il à Reuters. «Quel que soit le verdict, cela ne produira aucune différence significative parce que le territoire politique, qui a été créé sur un génocide et une homogénéisation nationale, d'abord des Serbes puis de tous les autres, survit», ajoute-t-il.

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