Cet article date de plus de deux ans.

Guerre en Ukraine : la France pourrait-elle se passer de gaz russe ?

Alors que le prix du mégawattheure a atteint un niveau historiquement haut, franceinfo passe en revue les alternatives envisageables si la Russie décidait de limiter ses approvisionnements ou si de nouvelles sanctions empêchaient les livraisons.

Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Illustration d'une gazinière. (DAREK SZUSTER / MAXPPP)

Que feraient l'Europe et la France sans gaz russe ? C'est la question qui affole les marchés européens, lundi 7 mars, alors que la guerre en Ukraine et la menace de nouvelles sanctions économiques contre la Russie font flamber les prix. Le mégawat-theure a atteint les 345 euros il y a deux jours, en hausse de 60%. Rien n'empêche actuellement les livraisons de gaz russe en Europe - 40% des approvisionnement du continent - et Moscou n'a pas décidé de couper ou de limiter le robinet. Mais cette possibilité est de moins en moins improbable . Si tel était le cas, quelles sont les alternatives envisageables ?

Le gaz russe représente 20% de notre consommation 

Si l'on en croit les principaux opérateurs français de gaz, il n'y a pas de quoi être optimiste, selon Catherine Mc Gregor, patronne d'Engie. "Si une telle décision devait être prise, alors l’hiver prochain on pourrait venir, l’Europe pourrait venir à manquer de gaz", a-t-elle déclaré sur France Inter, lundi matin. Patrick Pouyanné, PDG de Totalenergie, n'était pas plus rassurant il y a 10 jours, lors d'un forum spécialisé : "Le gaz, il y a un problème d’infrastructure. Et donc quand on me dit comment vous faites si les 40 % de gaz russe disparaissent, alors là, je peux vous dire, je ne sais pas faire."

La France fait face à deux problèmes : remplacer les quantités manquantes et surtout maintenir les prix à un niveau acceptable. Pour les quantités, nous ne sommes pas, sur le papier, dans la pire des situations. La Russie est notre deuxième fournisseur. Elle nous envoie un peu moins de 20% du gaz que l'on consomme, loin derrière notre premier fournisseur, la Norvège, dont nous dépendons pour plus de 40% de notre consommation. Mais ces chiffres sont en trompe l'oeil car d'une part, la production de la Norvège est déclinante, comme toutes celles des pays d'Europe du Nord, et d'autre part, le réseau de gaz étant européen, la France est interconnectée avec ses voisins. Et elle est tenue au principe de solidarité : si les consommateurs allemands n'ont pas assez de gaz, ils pourront en puiser en France.

L'option du gaz naturel liquéfié

Il y a tout de même du gaz ailleurs qu'en Europe, mais encore faut-il pouvoir l'acheter. Par exemple, pour le gaz liquéfié américain, il faut offrir des prix plus intéressants que les Chinois, les Japonnais ou les Coréens, qui bénéficient en plus de contrats sécurisés. Enfin, il y a les infrastructures. Si l'on veut du gaz naturel liquéfié, il faut aussi les usines, les terminaux gaziers, qui permettent de faire repasser le gaz de l'état liquide à l'état gazeux, étape indispensable pour pouvoir l'utiliser.

>> La France importe-t-elle du gaz de schiste américain, comme l’assure Fabien Roussel ?

La France dispose de quatre terminaux mais ils ont tous quasiment atteint la saturation. Or pour en construire d'autres, il faut trois à quatre ans. L'allemagne, par exemple, n'a pas de terminal gazier. Cela dit, côté prix, la France a beau être moins dépendante de la Russie pour se fournir, elle paye tout de même le prix du marché européen.

Diminuer la consommation 

Face aux difficultés actuelles, il y a au moins des propositions. La première c'est de jouer sur la consommation. Les européens, français compris, pourraient être invités à baisser le chauffage l'hiver prochain. Un degré en moins en Europe, c'est 10 milliards de mètres cubes économisés, selon l'Agence internationale de l'énergie. L'AIE demande aussi aux consommateurs de ne pas renouveler leurs contrats arrivant à terme avec Gazprom.

D'autres énergies pourraient remplacer le gaz naturel mais il n'y a pas non plus de solution miracle de ce côté. Le charbon ? C'est l'énergie la plus polluante et qui plus est, la Russie est aussi le premier producteur. Les énergies renouvelables ? L'AIE recommande d'accélérer, d'assouplir les procédures. Mais Catherine Mc Gregor, PDG d'Engie, estime que même dans ce cas, il ne sera pas possible de compenser le gaz dès l'hiver prochain. Enfin il y a le biométhane, le gaz vert, produit à partir de matières agricoles. Il est encore peu exploité et ne permettra pas de compenser le gaz russe s'il venait à manquer.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.