Le président Polonais
20 ans après la chute du mur, un président polonais pour le parlement européen.20 ans après la chute du mur, un président polonais pour le parlement européen.
Coup de coeur ou coup de gueule? Un peu des deux sans doute...Car l'élection au perchoir du polonais Jerzy Buzek, jolie sur le plan du symbole, est aussi le fruit d'un arrangement politique entre initiés. Et c'est dommage. Vraiment...
Il a été l'un des membres de l'équipe Solidarnosc, le président de son premier congrès en 1981. Ce professeur en sciences techniques, protestant, ce qui n'est pas franchement courant en Pologne, a également été le premier ministre de son pays de 1997 à 2001. Avec à son actif un record de longévité pour son gouvernement et plusieurs grosses réformes internes (retraite, santé et découpage administratif). L'homme est discret mais toujours présent aux moments clefs. Ainsi lorsqu'il a fallu mettre sur pied les structures clandestines de Solidarnosc, ainsi lorsque, arrivé à Bruxelles, il s'est vu confier presque immédiatement les rapports sur le 3ème budget de l'Union européenne, la recherche.
L'homme va désormais devoir convaincre d'autant qu'il apparait aux yeux de certains comme peu ouvert sur le plan des moeurs. Homophobe, disent les uns, anti avortement disent les autres, et coupable d'avoir mis le pied à l'étrier politique à l'un des frères Kaczinski.
D'autre part, 30 ans après les premières élections des eurodéputés au suffrage universel, et surtout 20 ans après que tout un pan de l'Europe se libère, son élection représente à la fois le chemin parcouru par ces nouvelles démocraties et par l'Europe elle-même.Et ce chemin là, ce parcours plus exactement, il faut le saluer. L'Union européenne se constitue, se construit petit à petit, parfois de façon fort cahotique, parfois de façon bien trop hermétique pour le citoyen. Et là, l'élection de Jerzy Buzek prouve, je crois, que ça vaut le coup. Elle a valeur de symbole. D'une Europe qui avance.
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Seulement voilà... Le symbole est terni car il s'agit d'une élection "arrangée".C'est hélas une vilaine habitude. Au nom d'une certaine Réalpolitik, les deux grands groupes du Parlement européen, le centre droit, c'est à dire le PPE et ce qui était le groupe socialiste et qui est devenu le S&D (socialiste et démocrates), s'arrangent entre eux pour en particulier le choix du président du Parlement européen. La mandature est de 5 ans et les présidents se succèdent tous les deux ans et demi...A toi, à moi, Jerzy Buzek le PPE pour débuter, sans doute Martin Schultz, s'il ne fait pas de mauvaise chute dans l'escalier, le patron du S&D la prochaine fois.
Alors bien sûr, on sait que dans le cadre des pouvoirs de codécision du Parlement européen, il faut additionner les voix des deux grands groupes pour faire passer les textes, on sait aussi que dans le cadre des négociations autour de la future Commission européenne et surtout de son Président, les négociations sont nécéssaires. Mais tout de même...
Les dernières élections en juin dernier ont prouvé la désaffection du citoyen européen à l'encontre du projet européen. Et pour cause...tous les analystes l'ont souligné. Les projets ne sont pas visibles, ils ne sont pas clairement identifiés, un peu comme si de toute façon, il n'y avait pas d'alternative. Alors autant laisser filer. En continuant ce petit jeu entre initiés, illustré par l'élection ce 14 juillet à Strasbourg de Jerzy Buzek, les politiques semblent déjà avoir oublié cette analyse. Blanc bonnet et bonnet blanc avait dit en son temps un célèbre dirigeant du Parti communiste Français. Ce n'est pas comme cela que l'on remue les foules, que l'on remobilise le citoyen.
Et pourtant ce sont bien les citoyens, c'est bien la foule, qui, dans les pays comme la Pologne de monsieur Buzek, ont fait tomber le mur. Ne gachons pas trop vite les symboles...
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