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La route maritime africaine, principale porte d’entrée clandestine en Europe

Avec le retour du beau temps, l’Europe a les yeux braqués sur la Méditerranée et attend, non sans inquiétude, l’arrivée de nouveaux migrants en provenance d’Afrique du Nord et notamment de Libye, point de départ du périlleux voyage vers l’Italie. Ils seraient entre 200.000 et un demi-million de personnes, selon différentes sources. Géopolis a interrogé Florence Kim, porte-parole de l’OIM.
Article rédigé par Martin Mateso
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Opération de sauvetage de migrants au large des côtes libyennes, le 23 août 2015. Des gardes côtes italiens sont intervenus dans le cadre de l'opération Frontex. (Photo AFP)

Interrogée par Géopolis, la porte-parole de l’Organisation internationale des migrations, Florence Kim, ne confirme pas ces chiffres. Mais elle reconnaît que la Libye a été la principale pourvoyeuse de migrants qui ont déferlé sur l’Europe au cours des cinq dernières années.
 
«C’est vrai qu’une grande partie des migrants que l’on voit désormais sur les côtes européennes étaient partis en Libye parce qu’il y avait une véritable économie, parce qu’il y avait une possibilité de commencer une petite entreprise et la possibilité de pouvoir envoyer de l’argent à leurs familles restées au pays. Depuis la chute du régime (de Kadhafi) depuis cinq ans maintenant, on a vu qu’il y a eu une dégradation de la situation des migrants. Il y a eu un nombre important de tortures, d’emprisonnements. Par conséquent, il était préférable pour ces personnes-là de repartir ou de tenter l’aventure migratoire ailleurs et notamment en Italie.»

Florence Kim, porte-parole de l'OIM, l'Organisation internationale des migrations. (Photo/OIM)
 
Le Niger, un «des pivots» de la route maritime africaine
Selon l’OIM, 60% des migrants qui traversent la Libye pour rejoindre l’Europe par la Méditerranée centrale sont passés par le Niger. En avril 2015, les autorités nigériennes estimaient à 11.000 le nombre de personnes qui, chaque semaine, traversent le désert du Niger pour se rendre en Europe via la Libye.
 
«Il faut rappeler tout de même que le Niger a une superficie qui est deux fois supérieure à celle de la France. On peut imaginer les difficultés qu’il y a dans ce pays à pouvoir mettre en place un système de patrouille dans le désert (plus de la moitié du territoire), devenu une zone difficile à contrôler, à la merci des organisations de passeurs», précise Florence Kim.
 
Le désert nigérien, triangle de la mort
Dans le désert nigérien, comme en Libye, les passeurs ont mis en place une véritable mafia très lucrative. Ils n’hésitent pas à abandonner leurs proies au milieu de nulle part, en plein désert (ou plus loin en plein milieu de la Méditerranée).
 
En juin 2016, 34 migrants, parmi lesquels 20 enfants, ont été retrouvés morts dans le désert du Niger, après avoir été abandonnés par leur passeur. Ils tentaient d’atteindre la Libye pour passer ensuite en Europe.
Depuis le 1er janvier 2016, plus de 3000 migrants ont trouvé la mort sur la route maritime africaine en tentant de rallier l’Europe.

Selon le directeur général de l’OIM, William Lacy Swing, le désert du Sahara pourrait bien être aussi meurtrier que la mer Méditerranée pour cette vague de migrations, mais la plupart de ces morts ne sont pas signalés.
 
Que faire pour stopper le trafic meurtrier des passeurs?
Le Niger a déjà tiré la sonnette d’alarme. Le gouvernement a besoin d’un milliard d’euros pour combattre l’immigration clandestine au départ de son territoire et à destination de l’Europe. Il compte pour cela sur ses partenaires occidentaux et sur l’Union européenne pour réunir cette somme.
 
Le Niger fait partie du premier groupe de pays africains avec lesquels l’Union européenne a proposé de nouveaux partenariats destinés à stopper les traversées mortelles de la Méditerranée. La Commission européenne est prête à débloquer une enveloppe de 60 milliards d’euros à cet effet. Un projet salué par la porte-parole de l'OIM, Florence Kim:
 
«Toute mesure qui permettra d’arrêter ou de limiter le nombre de morts en Méditerranée est une mesure bonne à prendre, estime Florence Kim. A condition, ajoute-t-elle, que «cet argent permette de mettre en place des structures, de renforcer les capacités des autorités locales à gérer les flux migratoires. Mais si c’est uniquement pour limiter le nombre des arrivées sur les cotes européennes, c’est une autre question. Le principal, c’est qu’il n’y ait plus des milliers de morts comme on l’a vu depuis le 1er janvier de cette année».
 
Pour Florence Kim, la façon la plus efficace de combattre le marché des passeurs, c’est d’ouvrir des voies légales de migrations. «Plus on fermera les frontières, plus on élèvera des murs en Europe, plus on favorisera le marché des passeurs», soutient la porte-parole de l’OIM.

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