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La ministre de l'Economie Christine Lagarde souhaite que l'Irlande relève sa fiscalité pour réduire son déficit

"Je l'ai indiqué, d'autres partenaires européens l'ont mentionné également: il est tout à fait souhaitable que l'Irlande utilise le levier fiscal pour réduire son déficit budgétaire", a-t-elle déclaré mardi à l'Assemblée.L'UE et le FMI négocient un plan de soutien financier avec l'Irlande qui s'efforce de préserver son faible taux sur les sociétés.
Article rédigé par France2.fr avec agences
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Brian Lenihan, ministre irlandais des Finances (AFP)

"Je l'ai indiqué, d'autres partenaires européens l'ont mentionné également: il est tout à fait souhaitable que l'Irlande utilise le levier fiscal pour réduire son déficit budgétaire", a-t-elle déclaré mardi à l'Assemblée.

L'UE et le FMI négocient un plan de soutien financier avec l'Irlande qui s'efforce de préserver son faible taux sur les sociétés.

L'Union européenne (UE) et le Fonds monétaire international (FMI) ont répondu favorablement dimanche soir à une demande d'aide financière de Dublin pouvant aller jusqu'à 90 milliards d'euros. L'Irlande va ainsi devenir le 2e pays de la zone euro à bénéficier cette année d'un soutien de ses partenaires, après la Grèce.

Alors que l'Allemagne s'était faite prier au printemps dernier pour aider la Grèce, elle a été plus clémente avec l'Irlande, du moins publiquement.

Les difficultés de l'Irlande "sont tout à fait différentes de celles de la Grèce", a répété Mme Merkel mardi. Mais comme avec la Grèce, l'aide accordée à l'Irlande sera soumise à conditions "afin que les causes (des problèmes) soient soignées", a-t-elle ajouté.

Mme Merkel a réaffirmé sa détermination à contribuer à la mise en place en Europe d'un "mécanisme de résolution de crise", qui prendrait à partir de 2013 le relais du fonds de soutien européen existant et règlerait les modalités de sauvetage d'un pays en déroute financière.

L'euro était instable face au dollar lundi, après la décision d'une aide à l'Irlande. La faiblesse de l'euro montre que les marchés restent inquiets sur la situation financière en Europe après la décision sur l'Irlande.

L'aide à l'Irlande "est justifiée afin de sauvegarder la stabilité financière de l'UE et de la zone euro", ont déclaré dans un communiqué les ministres des Finances de la zone euro et de toute l'Union européenne, à l'issue d'une réunion convoquée en urgence, alors qu'au même moment Dublin officialisait sa demande de soutien.

La BCE a salué la réponse des autorités européennes, tout comme le FMI qui s'est dit prêt à apporter sa contribution par le biais d'un prêt sur plusieurs années. Le montant n'a pas été précisé immédiatement, mais devrait tourner autour de 90 milliards d'euros.

Renflouer les banques irlandaises en crise
Une enveloppe pas très éloignée de celle accordée au printemps à la Grèce. Elle avait obtenu un prêt de 110 milliards d'euros sur trois ans, étant alors dans l'impossibilité d'emprunter à des taux d'intérêt abordables pour refinancer sa dette.

L'objectif est similaire pour l'Irlande. Mais il s'agit cette fois principalement d'aider les banques irlandaises en crise, que Dublin a déjà dû renflouer à hauteur de 50 milliards d'euros, faisant du coup grimper son déficit public à des sommets: 32% du Produit intérieur brut attendu cette année.

Dans le détail, l'Irlande va pouvoir bénéficier d'un plan d'aide pour les pays de la zone euro en difficulté mis sur pied au printemps dernier suite à la crise de la dette en Grèce, doté au total de 750 milliards d'euros et comprenant trois volets: prêts de l'UE, de la zone euro et du FMI. Il est prévu que le Royaume-Uni et la Suède - deux pays non membres de la zone euro - accordent en complément des prêts bilatéraux à l'Irlande.

L'éclatement de la bulle immobilière
L'objectif est principalement de mettre en place un Fonds pour aider à recapitaliser les banques irlandaises qui auraient besoin d'argent frais, selon le communiqué de l'UE. Ces banques sont plombées par l'éclatement d'une bulle immobilière consécutive à la crise financière mondiale. Et Dublin a vu son déficit exploser en raison des injections de liquidités auxquelles il a dû procéder pour les sauver. Ce déficit doit revenir dans la limite européenne de 3% du PIB d'ici 2014.

Elections en janvier, nouveau plan d'austérité
La crise financière qui secoue l'Irlande a fait une victime, le gouvernement du Premier ministre Brian Gowen. Celui-ci a annoncé lundi des élections législatives en début d'année prochaine, après le vote du budget et l'adoption d'un plan du sauvetage international.

L'opposition a demandé sa démission immédiate alors que les Verts, membres clés de la coalition au pouvoir ont réclamé des élections anticipées "dans la deuxième quinzaine de janvier".

M. Cowen a confirmé que son gouvernement présenterait mercredi son plan d'austérité sur quatre ans. Ces efforts budgétaires provoquent déjà la colère de l'opinion dans l'île. Ces mesures d'austérité visent à économiser 15 milliards d'euros sur quatre ans, soit près de 10% de l'ensemble du PIB irlandais. Conséquence: suppression de 100.000 emplois publics et des coupes dans les allocations chômages et familiales. Le salaire minimum, jusqu'alors tabou, devrait être touché.

Des discussions sur les détails de l'aide et les contreparties exigées doivent encore avoir lieu à Dublin dans les jours à venir avec l'équipe d'experts européens et du FMI qui s'y trouve déjà. L'Irlande a exclu toute hausse de sa fiscalité très avantageuse des entreprises, réclamée par plusieurs pays dont la France.

Aide: mode d'emploi

QUELLES AIDES SONT DISPONIBLES POUR L'IRLANDE ?

Le filet de sécurité européen est composé du Mécanisme européen de stabilité financière (MESF), qui peut prêter jusqu'à 60 milliards d'euros, et du Fonds européen de stabilité financière (FESF), doté de l'équivalent de 440 milliards d'euros en garanties des différents Etats européens.

Le MESF est disponible pour l'ensemble des 27 pays de l'Union européenne, mais le FESF est réservé aux 16 membres de la zone euro. Dans le cas irlandais, les ministres des Finances de l'UE ont indiqué que les deux sources seraient utilisées. En plus de ces aides, le Fonds monétaire international (FMI) s'est dit disposé à prêter une aide supplémentaire, négociée au cas par cas, pouvant atteindre jusqu'à 50% de la somme fournie par l'UE.

Les fonds provenant du FESM seront versés en premier, puis ceux du FESF et du FMI.
Les banques irlandaises n'ont pas un accès direct aux fonds de l'UE mais Dublin peut très bien mobilier le FESM ou le FESF pour soutenir financièrement son système bancaire. Les ministres des Finances de l'UE ont dit dimanche que le programme d'aide comporterait un fonds destinés aux futurs et éventuels besoins en fonds propres du secteur bancaire.

QUEL SERAIT LE PROCESSUS ?

C'est la première fois que le mécanisme est utilisé. Selon des responsables de l'UE, trois à cinq semaines pourraient s'écouler entre la demande irlandaise et le versement des premiers fonds. Le plan d'aide s'appuie sur un projet budgétaire de quatre ans que Dublin doit présenter mercredi.

Calendrier probable pour l'entrée en vigueur de l'aide:
1. L'Irlande devra en premier lieu soumettre une demande à la Commission européenne et au Comité économique et financier (CEF), précisant le montant dont elle a besoin et la façon dont elle entend restaurer sa stabilité financière.
2. La Commission européenne, en liaison avec la banque centrale européenne (BCE), évaluera la demande et recommandera aux ministres des Finances de l'UE de l'accepter ou de la rejeter.
3. Vote à la majorité qualifiée des ministres des Finances.
4. En cas d'approbation, les ministres préciseront le montant de l'aide, sa répartition en tranches et les conditions dont elle sera assortie, telles que déterminé par la Commission et la BCE.
5. Signature d'un protocole d'accord entre l'Irlande et la Commission.
6. La Commission lèvera les fonds nécessaires par des émissions obligataires garanties par le budget européen, et les reversera par tranches à l'Irlande.
7. Si Dublin a besoin de fonds supplémentaires du FMI, la Commission devra en être informée au préalable.
8. Le versement de l'aide se poursuivra ensuite, accompagné de contrôles réguliers sur les progrès des réformes menées en Irlande.

QUELLES CONDITIONS POURRONT ÊTRE EXIGÉES ?

L'UE et le FMI exigeront probablement de Dublin une hausse des impôts et une réduction des dépenses qui auraient été jugées impensables auparavant. Le programme actuel d'ajustement budgétaire de l'Irlande vise 15 milliards d'euros d'économie d'ici 2014, soit deux fois plus que l'objectif précédent. Le programme d'aide pourrait durcir encore plus cet objectif. Sur ce point, Bruxelles va-t-il en profiter pour demander à Dublin d'augmenter l'impôt sur les sociétés, qui est actuellement considéré comme très bas, à 12,5%, un taux que Dublin affirme vouloir maintenir envers et contre tout ?

La Grèce avait dû porter son taux de TVA de 19 à 23% et il se peut que l'Irlande doive faire de même avec sa TVA à 21%.

QUEL SERA LE COÛT POUR L'IRLANDE ?

En suivant le modèle adopté pour la Grèce, Dublin devrait rembourser les prêts suivant un taux variable basé sur l'Euribor à trois mois et ceux à taux fixe se fonderaient sur les taux de swaps correspondant aux échéances concernées. A cela s'ajoute une hausse de 300 points de base pour les emprunts d'une maturité inférieure ou égale à trois ans, et de 100 points de base par année supplémentaire au-delà, à quoi il faut ajouter 50 points de base au titre des frais opérationnels.

Le coût d'emprunt est de l'ordre de 5% (soit supérieur aux taux allemands).

Il n'y a théoriquement pas de limite à la maturité des emprunts accordés. Dans le cas grec, ils étaient assortis d'échéances de trois à cinq ans.

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