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Jana Nagyova, celle par qui le scandale arrive en Tchéquie

Le 15 juin, Jana Nagyova était mise en détention provisoire à Prague. Le 17 juin, le Premier ministre tchèque Petr Necas présentait sa démission, mettant à mal son gouvernement. Le lien ? Présentée comme la maîtresse de Necas, sa directrice de cabinet est impliquée dans une affaire de corruption et d’abus de pouvoir. Portrait d’une femme de tête.
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Jana Nagyova, proche collaboratrice du Premier ministre tchèque démissionnaire, Petr Necas, est notamment accusée d'abus de pouvoir. ( AFP PHOTO / MICHAL CIZEK)

Appelée «la Tsarine» par les Tchèques, Jana Nagyova a été interpellée lors d'une vaste opération policière le 13 juin. Motif : utilisation à des fins personnelles du renseignement militaire pour une filature illégale de l'épouse de Petr Necas. Officieusement, un moyen pour faire accélérer leur divorce.
 
«Elle agissait de bonne foi», a affirmé son avocat Eduard Bruna, pour protéger l'épouse du Premier ministre, harcelée par… des Témoins de Jéhovah, selon les dires de Mme Nagyova.

Un scandale d'Etat
Dans la nasse, sept autres personnes, dont deux généraux et un colonel des renseignements. Selon Eduard Bruna, Jana Nagyova manifeste «plus de courage» que les six hommes politiques avec lesquels elle attend derrière les barreaux.
 
L'opération policière visait par ailleurs plusieurs hommes d'affaires et lobbyistes, liés à la mairie de Prague et soupçonnés de malversations. Ils ont pris la poudre d’escampette peu avant le coup de filet de la police. Laquelle croit Mme Nagyova impliquée dans toutes ces affaires.

Autre soupçon pesant sur «la Tsarine», avoir agi en coulisses pour obtenir la démission de trois députés de l'ODS (le parti de M.Necas dont il est aujourd’hui démissionnaire) en échange de postes lucratifs dans l'administration publique.

 
A Prague, les langues se délient et chacun y va de son commentaire sur la «dircab» blonde et flamboyante du Premier ministre, cliente fidèle des boutiques de luxe. Dépeinte par ses détracteurs comme une intime de Petr Necas très influente, elle semble en effet avoir décidé elle-même de nombreuses questions relatives au fonctionnement du gouvernement.
 
«Sa force était directement proportionnelle à la faiblesse de Petr Necas», déclare ainsi l’hebdomadaire Reflex à propos de cette ancienne comptable de 48 ans, énergique, originaire de Bohême occidentale.
 
Et le journal d’ajouter, en évoquant une source proche du gouvernement: «Quand il n'y avait pas de place pour elle dans une calèche qui devait transporter le Premier ministre à l'inauguration d'une exposition agricole, tout le monde devait marcher à pied

Une forte personnalité 
Inséparables depuis 2006 – Radka, l'épouse de Petr Necas se tient à l'écart de la vie publique – ils ont des relations qui dépassent le cadre professionnel. L’avocat de Mme Nagyova confirme: «Ce qui attriste le plus (sa cliente) depuis son arrestation, c'est que la police dispose d'enregistrements de ses conversations téléphoniques et SMS intimes».
 
Jana a très vite gravi les échelons : après avoir dirigé le cabinet de M.Necas au ministère du Travail et des Affaires sociales, elle l'a suivi au siège du gouvernement après sa nomination comme Premier ministre à l’été 2010.
 
Début 2012, elle fait la une des journaux avec l’annonce du montant de ses primes faramineuses. Explications fumeuses de Necas qui provoquent les moqueries: «Elle trime comme un galérien.» D’aucuns remettent en question ses compétences, et jusqu’au niveau de sa thèse, obtenue dans une université privée.

Le Premier ministre démissionnaire, Petr Necas, à Prague, en République Tchèque, le 17 juin 2013. ( AFP PHOTO MICHAL CIZEK)

Crise gouvernementale
Aujourd’hui, l'irrésistible ascension de Jana Nagyova vient de s’arrêter. Elle encourt jusqu'à cinq ans de prison.
 
Et le gouvernement ? Déjà malmené par la crise en Europe, le gouvernement tchèque de centre droit va devoir agir pour éviter d’être davantage déstabilisé par cette affaire.

Les solutions ? Plusieurs options sont possibles, selon les observateurs : nomination d’un nouveau Premier ministre à la tête de la coalition tripartite au pouvoir depuis 2010, mise en place d’un gouvernement intérimaire ou convocation d’élections anticipées.

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