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Montée de l'extrême-droite en Allemagne : "Économiquement, le pays marche bien, on comprend mal cette frustration"

Le spécialiste de l'Allemagne contemporaine Hans Stark décrypte la situation dans le pays, à la veille d'élections locales en Bavière.

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Des dizaines de milliers de personnes ont défilé à Berlin samedi 13 octobre pour protester contre la haine et le racisme. (JOHN MACDOUGALL / AFP)

Des milliers d'Allemands ont dénoncé, samedi 13 octobre dans les rues de Berlin, l'exclusion, le racisme et la montée de l'extrême-droite, à la veille des élections régionales en Bavière. L'extrême-droite, le Parti alternatif pour l'Allemagne (AfD), pense faire un score très important dans le fief historique de l'Union chrétienne sociale (CSU). "Économiquement, le pays marche bien, on comprend mal cette frustration" exprimée à travers le vote d'extrême-droite, explique sur franceinfo Hans Stark, spécialiste de l'Allemagne contemporaine à l'Institut français des relations internationales (Ifri), professeur de civilisation allemande à la Sorbonne.

franceinfo : Comment peut-on expliquer cette percée de l'extrême-droite en Allemagne ?

Hans StarkCela s'inscrit dans une montée généralisée [de l'extrême-droite] en Europe. Il y a une sensibilité particulière en Allemagne de l'Est, en ex-RDA, pour les thèses populistes qui se traduisent par un rejet de l'immigré et par un ras-le-bol de la façon avec laquelle on a mené l'unification de l'Allemagne. Les Allemands de l'Est se sentent exclus, comme des citoyens de seconde zone et ils sanctionnent la politique du gouvernement fédéral en votant pour l'extrême-droite, ce qui ne fait pas d'eux à 100% des nazis.

Est-ce que la situation politique en Italie a amplifié le phénomène, est-ce que les Allemands craignent de voir arriver chez eux les migrants refoulés par l'Italie ?

Évidemment, mais c'est peu probable. D'ailleurs, les chiffres montrent que les arrivées de réfugiés en Allemagne ont beaucoup baissé ces derniers temps. On voit aussi, à travers les sondages, que la grande majorité des Allemands, aujourd'hui, ont d'autres préoccupations que l'immigration. Et cela traduit d'ailleurs l'un des problèmes de la CSU qui ne mène campagne que sur un seul sujet : l'immigration. Cela énerve les électeurs les plus modérés de ce parti. Il y a en Allemagne une frange de la population remontée comme les immigrés, mais ça reste relativement marginal, même si ça représente à peu près 15%. En Bavière, dans les sondages, l'AfD est à 10%. C'est toujours beaucoup car ce groupe, ce parti arrive au Parlement... Mais c'est très en dessous des scores qu'ils font en Allemagne de l'Est, voire à l'échelle nationale où ils sont aujourd'hui, dans les sondages, à 18%. Donc c'est un mauvais score qu'ils feront sans doute dimanche [lors des élections régionales en Bavière].

L'AfD a pignon sur rue aujourd'hui : le mouvement est entré au Bundestag, dans les parlements régionaux, est-ce inquiétant ?

Bien sûr que c'est inquiétant. D'abord, parce que l'Allemagne est un pays qui marche bien économiquement. Rien à voir avec la situation de l'Italie, qui exprime son inquiétude face à la dégradation de ses conditions économiques. En Allemagne, nous avons le plein emploi, nous avons une situation économique stable avec 2% de croissance depuis plusieurs années. C'est un pays qui exporte énormément. Économiquement, le pays va bien, même si toute la population n'en profite pas de façon égale. De ce point de vue, on comprend mal cette frustration qui s'exprime à travers le succès de l'AfD.

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