Des milliers de manifestants pour sauver le Mur de Berlin
Des milliers d'habitants se sont mobilisés dimanche pour sauver l'un des derniers vestiges du Mur de Berlin, menacé d'être amputé pour permettre de nouveaux aménagements urbains.
C'est une histoire de vieille pierre, menacée par le logement neuf. Jusqu'à 6 000 personnes se sont rassemblées à Berlin, dimanche 3 mars, pour manifester contre la disparition d'une partie des restes du Mur de Berlin. Vendredi, 200 manifestants avaient déjà stoppé les travaux de percement d'une tranchée dans l'East Side Gallery, le plus long vestige du Mur. Un promoteur immobilier souhaite notamment y construire un couloir menant à une de ses tours d'habitation. Francetv info revient sur ce projet et l'opposition virulente qu'il suscite.
Pourquoi le Mur est menacé
Ce vestige de la Guerre froide doit faire l'objet de deux percées, sur un total d'une trentaine de mètres. D'une part, un promoteur immobilier souhaite offrir un accès à une tour d'habitation de grand luxe de 63 m de haut, qui doit prochainement sortir de terre sur les berges de la Spree, une rivière qui traverse Berlin. De l'autre, la ville veut assurer l'accès à un pont pour piétons et cyclistes qui doit enjamber la rivière d'ici 2015.
Percer le Mur s'impose pour des raisons de sécurité, selon le promoteur immobilier. "Cela n'a rien à voir avec notre immeuble mais avec les directives de l'arrondissement", soutient-il. Pour certains Berlinois, la capitale, très endettée, brade ses derniers terrains à des sociétés immobilières avides de gains. La ville réplique que la parcelle où doit être construit le nouvel immeuble de grand luxe a été vendue dès le début des années 90.
Pourquoi l'affaire prend de l'ampleur
Des 155 km du Mur, qui sépara Berlin du 13 août 1961 au 9 novembre 1989, seuls trois kilomètres sont encore debout. Ils se trouvent notamment sur l'East Side Gallery, dont les pans de béton de 3,6 m de hauteur ornés de fresque s'étirent sur 1,3 kilomètre. C'est devenu l'une des attractions touristiques majeures de la capitale allemande.
Parmi les fresques les plus connues, figurent le "Baiser fraternel" entre les dirigeants soviétique Brejnev et est-allemand Honecker, ou les têtes multicolores de l'artiste français Thierry Noir.
Comment l'opposition au projet s'organise
Arborant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire "Indignez-vous !" ou "L'argent fait tomber le Mur!", jusqu'à 6 000 contestataires ont manifesté leur courroux dimanche. Vendredi, quelque 200 manifestants avaient commencé à se rassembler à l'aube, certains affichant des pancartes, d'autres criant ou huant, après qu'un premier panneau de quelques mètres de large eut été retiré dans la nuit. Afin de calmer la situation, la police avait annoncé la suspension des travaux "pour la journée et jusqu'à nouvel ordre".
"On procède à la destruction d'une œuvre d'art", s'est insurgé vendredi Kani Alavi, un artiste allemand d'origine iranienne qui a peint l'une des fresques et dirige l'Association qui gère le lieu. Ces restes de l'ancien Mur appartiennent "au patrimoine culturel mondial", selon Robert Muschinski, membre du collectif "Sauver l'East Side Gallery".
Vendredi, un ouvrier avait retiré symboliquement la pince de la grue qui était fixée sur un deuxième panneau, un geste salué par la foule, qui restait néanmoins sceptique. "J'y vois une première victoire, mais nous devons voir si cela amorce un changement, avait réagi Robert Muschinski. Dès que la grue sera de retour, nous serons là, nous sommes assez nombreux pour revenir."
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