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Aie confiance

J’ai toujours entendu parler de Mario Monti comme d’un politique averti. J’ai pu le vérifier cette semaine au cours du petit déjeuner organisé par l’IFRI. La vision de la France et de l’Allemagne qu’a l’ancien commissaire européen et ancien Président italien du Conseil des ministres éclaire tout le jeu européen.
Article rédigé par Véronique Auger
France Télévisions
Publié Mis à jour
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  (Disney)

L’homme est très grand. Il a l’air timide mais l’humour à fleur de peau. Il pèse ses mots mais parle un français impeccable. C’est lui qui a pris l’Italie à bras le corps en 2011 au pire moment de la tourmente financière et qui l’a empêché de faire faillite en réformant les retraites et les impôts à la hache.
C’est lui qui, en juin 2012, a osé s’affronter à Angela Merkel lors d’un Conseil européen, la menaçant d’un veto si, en échange du Pacte de croissance, l’Italie n’obtenait pas un coup de main de la Banque Centrale Européenne pour desserrer la pression des marchés financiers sur sa dette. Une première. Il connait bien, très bien, la Chancelière allemande et le Président de la République français. Voici son point de vue. Utile pour analyser le week end sur la Baltique du Président français chez la Chancelière allemande.
 
François Hollande
« Si j’étais un vrai politique, suggère Mario Monti, je me demanderai si je veux me battre à tout prix pour être réélu ou pour laisser un signe positif ». Suivez mon regard… Suivent quelques excuses pour expliquer les difficultés des Présidents français. Il les trouve dans le régime présidentiel et le quinquennat qui empêchent la création de coalition, seul moyen selon lui de réformer un pays. « Je n’aurai rien pu faire sans cette coalition de partis qui ne se parlaient pas avant » avoue-t-il. Autre excuse (encore que…) : François Hollande, qu’il respecte beaucoup, a du mal à imposer des sacrifices aux Français parce que, contrairement à lui en son temps, les marchés financiers n’exercent plus aucune pression cathartique (sic) sur la France.
« La France doit reprendre confiance en elle-même », dit-il. « On peut comprendre une attitude d’aliénation d’Athènes ou de Lisbonne dans l’Eurozone, mais pas de Paris. La France a voulu plus que tout autre l’euro. Si elle ne s’approprie pas cette construction, c’est un problème pour tous ». Manifestement, il trouve que le couple franco-allemand bat de l’aile du fait de l’inexistence de la France dans le débat européen. « Il faut que la France redevienne la France et qu’elle retrouve son poids dans les négociations ».  Et comme la nature a horreur du vide Mario Monti sent monter des désirs d’alliance entre pays du sud de l’Union européenne contre l’Allemagne. Une erreur.
 
Angela Merkel
Manifestement il a fait le tour du personnage et sait comment la prendre. Il l’a même expliqué à Obama, lorsque celui-ci entamait son premier mandat. « Les Allemands, et donc la première d’entre eux, considèrent encore que l’économie est une branche de la philosophie morale. La croissance est pour eux la récompense d’un comportement vertueux. » Et voici le conseil du Doctore Mario pour emporter le morceau avec Angela Merkel : il faut la convaincre qu’on a fait ses devoirs à la maison. Qu’elle constate que le pays a contribué, même partiellement, à l’aboutissement de la politique décidée en commun.
 
Mario Monti vient de devenir membre associé étranger de l’Académie des Sciences morales et politiques à l’Institut de France. A quatre stations de métro de l’Elysée après la traversée du Pont des Arts. Espérons qu’il ait envie de faire le parcours.

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