Une réforme du système bancaire qui indigne les Espagnols
Ce mouvement spontané de jeunes, de chômeurs, de retraités et de salariés, qui s'est répandu via les réseaux sociaux sur la toile et dans le monde entier, a campé un mois durant sur la Puerta del Sol en plein centre de Madrid en 2011.
On le disait affaibli (lien en espagnol) faute de pouvoir se structurer autour d’une idéologie. Pourtant, un an plus tard des milliers de manifestants ont occupé les rues des villes espagnoles et ce, malgré l’interdiction du gouvernement conservateur de Mariano Rajoy de créer de nouveaux campements.
Un pays exangue
Aujourd’hui, les militants de la première heure vivent dans une Espagne où le malaise s’est accru en même temps que l’augmentation du taux de chômage – près de 25% de la population active et un jeune sur deux sont au chômage – et balancent entre résignation et désespoir.
D’autant que les mesures d’économies drastiques de 42 milliards d’euros et la 2e récession en trois ans plombent le pays et sapent l’espoir d’un retour prochain à une embellie durable.
Les Indignés ne s’en laissent pas compter
Pour enfoncer le clou, à la veille de la date anniversaire de leur mouvement, les Indignés ont appelé les clients de Bankia, 4e banque espagnole partiellement nationalisée, à clôturer leurs comptes bancaires.
Selon eux, «cette banque ment, trompe» et il faut la mettre, comme toutes les autres, «sous contrôle social».
Les Espagnols s’interrogent en effet sur le bien-fondé de renflouer une banque avec l’argent du contribuable (le renflouement atteindrait de 5 à 10 milliards, selon les sources), alors même qu’elle paye une mauvaise gestion. L’Etat a déjà versé 16 milliards d’euros au système bancaire.
Les Indignés ciblent Bankia
Euronews, le 14 mai 2012
Une réforme bancaire plus tard…
Si la population a accueilli avec scepticisme ou colère l’annonce d’une réforme bancaire, le 11 mai 2012, les acteurs de la finance sont quant à eux restés perplexes.
Depuis l'explosion de la bulle immobilière en 2008, les banques espagnoles croulent sous les actifs immobiliers à risques évalués à 184 milliards. La réforme leur impose de provisionner une trentaine de milliards dans leurs comptes pour en couvrir le risque.
Les investisseurs s’inquiètent des capacités des quatre plus grands établissements financiers espagnols – Santander, BBVA, CaixaBank et… Bankia – à fournir un effort durable pour se protéger des pertes croissantes sur leurs prêts toxiques. Et dans le même temps, à s'engager à apporter une aide limitée aux établissements en difficultés via des prêts à taux élevés.
Chacun d'entre eux devra mettre de côté plus de 11 milliards, qui s'ajoutent aux mesures de février imposant déjà aux banques quelque 54 milliards d'euros de provisions de plus pour 2012.
Tour de vis dans la banque: explications
Euronews, le 9 mai 2012
L’Espagne peine à convaincre
Saluée par Bruxelles, la réforme interroge également de nombreux observateurs qui se demandent si Madrid n'aura pas besoin d'aide pour recapitaliser ses banques. Ils doutent de la capacité de l’Espagne à tenir ses engagements budgétaires, bien qu’elle ait promis de retrouver un déficit égal à 3% du PIB en 2013.
Plus réaliste, la Commission européenne prévoit que son déficit public devrait s'élever à 6,3%, sans de nouvelles mesures de réduction des dépenses.
Magnanime, Bruxelles pourrait lui accorder plus de temps pour atteindre ses objectifs budgétaires. Mais à une seule condition, cependant : que Madrid présente un plan qui tienne la route, même s’il s’étale sur trois ou quatre ans. La réforme du secteur bancaire en est l'une des mesures phare.
Une cure de rigueur dans des secteurs sensibles
Quant aux Indignés, en particulier, et aux Espagnols, en général, ils devront continuer à se serrer la ceinture, le gouvernement a ordonné des coupes franches dans les secteurs comme la santé ou l’éducation d’un montant qui correspond au chiffre pressenti pour renflouer Bankia.
De quoi alimenter le sentiment d’injustice qui prévaut dans la population (lien en allemand).
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