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Coopérative communale, salaire unique, loyers symboliques... Dans ce village d'Andalousie, le débat citoyen, c'est tous les jours

franceinfo vous emmène entre Séville et Cordoue où les habitants de la commune de Marinaleda vivent depuis des décennies la démocratie directe et solidaire.   

Article rédigé par Isabelle Labeyrie, franceinfo
Radio France
Publié
Temps de lecture : 2 min
Dans la ville de Marinaleda (Espagne), partout s'affichent les slogans de l'utopie "un autre monde est possible", ici le 18 mars 2019. (ISABELLE LABEYRIE / RADIO FRANCE)

"C’est un rêve qui est devenu réalité", confie Manolo. L'homme qui s'exprime avec émotion est l'un des habitants de Marinaleda, un village espagnol de 2 700 habitants où toutes les décisions sont prises de manière collective. franceinfo s'est rendu là où le débat citoyen est une habitude, alors que beaucoup, en France, l'ont découvert à l'occasion du grand débat et des conférences régionales. 

Manolo, l'un des ouvriers de l'exploitation collective "El Humoso", dans le moulin qui permet de presser l'huile d'olive, à Marinaleda, le 18 mars 2019. (ISABELLE LABEYRIE / RADIO FRANCE)

"Quand les olives arrivent du champ, on les décharge ici, montre Manolo. Ensuite le tapis les envoie dans cette machine, qui les nettoie." Dans les années 1980, cet ouvrier agricole à la peau tannée par le travail au grand air s'est battu aux côtés des "sans-terre", pour récupérer la propriété agricole d’un riche aristocrate. Désormais, 1 200 hectares de champs d’oliviers, d’artichauts, de poivrons sont exploités en coopérative, et tout le monde touche le même salaire fixé à 1 250 euros.

Le portail de la ferme collective de Marinaleda : "pour tous les travailleurs journaliers au chômage", le 18 mars 2019. (ISABELLE LABEYRIE / RADIO FRANCE)

Jamais je n’aurais imaginé pouvoir conquérir une terre et y travailler. On a mis du temps.

Manolo, habitant de Marinaleda

à franceinfo

Plusieurs fois par mois, le village se réunit pour débattre et voter à main levée. Que ce soit pour les impôts, les transports en commun, les horaires de la piscine municipale, toutes les décisions sont prises de manière collective. Et le dimanche, on donne de son temps pour nettoyer les rues. À Marinaleda, pour l’immobilier, la mairie fournit les matériaux, mais ce sont les habitants qui construisent leur maison, en échange d’un loyer fixe et dérisoire de 15 euros par mois.

Juan Manuel Sánchez Gordillo, maire de Marinaleda, dans son bureau le 12 mars 2019. (ISABELLE LABEYRIE / RADIO FRANCE)

Juan Manuel Sanchez Gordillo, barbe et discours à la Fidel Castro, porte cette utopie à bout de bras. Il est maire depuis 40 ans. "Certains jeunes s'engagent moins, ils trouvent maintenant normal de payer leur maison 15 euros par mois. Mais qu’ils sortent du village, qu’ils aillent à Madrid, à Barcelone, à Séville, ils vont se rendre compte ! s'exclame Juan Manuel Sanchez Gordillo. On a remis l’humain au cœur de l’économie."

S’il n’y avait pas ces gens de l’extérieur, les habitants oublieraient qu’ici on fait quelque chose de différent, d’exceptionnel.

Juan Manuel Sanchez Gordillo, maire de Marinaleda

à franceinfo

Les Français sont particulièrement nombreux à venir observer ce laboratoire de démocratie directe. Francis Banchet, militant alternatif dans le Tarn, a fait le déplacement il y a déjà quelques année : "Il faut s'en inspirer, bien sûr. À mon avis, c'est ce que les 'gilets jaunes' recherchent. Je ne dis pas que tout est parfait, il faudrait y vivre... mais il faut le faire connaître."   

Le panneau d'entrée dans le village : "Marinaleda, en lutte pour la paix". (ISABELLE LABEYRIE / RADIO FRANCE)

Notre modèle peut s’exporter n’importe où dans le monde, assurent les habitants de Marinaleda. Il faut juste de la volonté politique...  

Marinaleda, une utopie en Andalousie - un reportage d'Isabelle Labeyrie

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