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Un nouveau virus géant découvert dans les sols gelés en Sibérie

Le "Mollivirus sibericum", découvert par une équipe franco-russe, inquiète les chercheurs quant à l'exploitation des sols de la région arctique.

Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Cellule de "Mollivirus sibericum" vue au microscope. (IGS / AMU / CNRS / AFP)

Mollivirus sibericum. C'est le nom d'un virus géant, vieux de 30 000 ans et baptisé ainsi parce qu'il est tout mou et qu'il a été découvert dans les sols gelés de la Sibérie (Russie). Des chercheurs sont parvenus à réveiller ce virus venu du permafrost, pour l'étudier en profondeur et publier leurs travaux, lundi 7 septembre 2015.

Qu'est-ce qu'un virus géant ?

Les virus géants ont un diamètre supérieur à 0,5 micron (0,5 millième de millimètre) et sont donc visibles avec un simple microscope optique, contrairement aux autres virus. On peut ainsi facilement les confondre avec des bactéries. Les chercheurs les font revivre en laboratoire en se servant d'amibes (organisme unicellulaire) comme cellules hôtes. 

Le monde scientifique, qui a longtemps pensé que les virus étaient forcément très petits et composés seulement d'une poignée de gènes, a découvert, en 2003, avec surprise, un premier virus géant, riche d'un millier de gènes et baptisé Mimivirus (famille des Megavirus). Une autre famille de virus géants, les Pandoravirus, avec 2 500 gènes, a été décrite dans la revue Science en 2013.

L'an dernier, la même équipe de chercheurs, qui comprend Jean-Michel Claverie, professeur de médecine à l'Université Aix-Marseille (Bouches-du-Rhône), et Chantal Abergel, du CNRS, avait déjà réussi à faire revivre un autre type de virus géant conservé dans le même échantillon de permafrost et nommé Pithovirus.

Qu'a-t-il de particulier, ce "Mollivirus sibericum" ?

Mollivirus sibericum, découvert dans du pergélisol (ou permafrost, sol gelé en permanence) prélevé par des équipes russes dans l'extrême nord-est sibérien, possède plus de 500 gènes. Il ressemble à une coque oblongue de 0,6 micron de long.

La découverte réalisée par une équipe franco-russe démontre que les virus géants "ne sont pas rares et sont très diversifiés", explique Jean-Michel Claverie, un des coordinateurs de l'étude. La découverte du Mollivirus porte à quatre le nombre de familles de virus géants identifiés depuis 2003, dont deux ont déjà été retrouvés dans le permafrost, souligne le professeur de médecine à l'Université Aix-Marseille et directeur du laboratoire Information génomique et structurale de Marseille.

Cette découverte prouve aussi que la capacité des virus à survivre dans le permafrost sur de très longues périodes n'est pas limitée à un type particulier de virus, mais couvre probablement des familles virales aux stratégies de réplication très variées, et donc potentiellement pathogènes.

Faut-il s'inquiéter de cette découverte ?

S'inquiéter, peut-être pas, mais garder un œil dessus, oui. Selon le chercheur, la découverte du Mollivirus doit conduire à s'interroger sur le risque éventuel que certains de ces virus géants ne se réveillent un jour, si les hommes se mettent à trop remuer en profondeur les sous-sols des régions arctiques. "Quelques particules virales encore infectieuses peuvent être suffisantes, en présence de l'hôte sensible, à la résurgence de virus potentiellement pathogènes dans les régions arctiques de plus en plus convoitées pour leurs ressources minières et pétrolières et dont l'accessibilité et l'exploitation industrielle sont facilitées par le changement climatique", relève le CNRS dans un communiqué.

Le réchauffement climatique libère, en effet, de plus en plus de glaces marines polaires, ce qui permet d'accéder à la Sibérie orientale et du nord par des routes maritimes qui n'existaient pas. "Si on n'y prend pas garde et qu'on industrialise ces endroits sans prendre de précautions, on court le risque de réveiller un jour des virus comme celui de la variole qu'on pensait éradiqués", relève Jean-Michel Claverie.

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