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Chez les mammifères marins, les "gènes capables de lutter contre les pesticides ne fonctionnent plus"

Une étude publiée la semaine dernière a révélé les effets néfastes des pesticides sur les mammifères marins. Le premier d'entre eux est de les rendre stériles, explique Olivier Chastel, écotoxicologue au Centre d'études biologiques de Chizé sur franceinfo.

Article rédigé par franceinfo
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Les lamantins menacés de stérilité, comme les autres mammifères marins, à cause des pesticides.  (ALAN C EGAN  / MEDIADRUMWORLD.COM / MAXPPP)

Une étude publiée la semaine dernière dans la revue Science, sur les effets néfastes des pesticides sur les mammifères marins, révèle que ces animaux sont particulièrement exposés. Un mécanisme de défense face à ces pesticides a disparu au fil du temps chez ces espèces.

Olivier Chastel, écotoxicologue au Centre d'études biologiques de Chizé, explique jeudi 16 août sur franceinfo que chez ces mammifères, les "gènes capables de lutter contre ces pesticides ne fonctionnent plus". Cela a des conséquences car "on voit des cas de stérilité chez des grands mammifères marins".

franceinfo : Que révèle exactement cette étude ?

Olivier Chastel : Cette étude montre que [le fait de] s'adapter à des milieux contraignants, comme celui de la vie aquatique, a éteint des gènes qui se trouvent être présents chez tous les mammifères. Ces gènes sont, chez les espèces non-aquatiques, capables de lutter contre certains pesticides organophosphorés. Ce sont en fait des pesticides qui attaquent le système nerveux. Au fil de l'évolution, il y a une adaptation à cause des contraintes de la vie aquatique, c'est-à-dire le froid, la nécessité d'avoir des réserves graisseuses bien spécifiques et donc, ce gène fonctionne plus ou moins bien. Et actuellement, l'exposition aux pesticides les rend plus vulnérables parce qu'ils ont moins de capacités à lutter contre ces pesticides.

Quelles sont les conséquences de cette absence d'arme chez les animaux marins ?

Chez les lamantins, qui sont des mammifères marins côtiers, 70% présentent des traces de résidus de ces pesticides. Ils ont cela dans le sang. On connaît les conséquences pour les humains et pour d'autres espèces mais c'est plus difficile de voir les effets sur la reproduction ou sur le comportement en milieu sauvage. Il est tout de même certain qu'il y a des conséquences néfastes pour ces animaux. Plus les animaux sont hauts dans la chaîne alimentaire, plus ils sont exposés car ils accumulent des pesticides à chaque étape de la chaîne. On parle des organophosphorés mais il y a plein d'autres polluants historiques comme le DDT, les PCB, etc auxquels ils sont particulièrement exposés et on voit notamment des cas de stérilité chez des grands mammifères marins.

Est-ce-que cela nous apprend quelque chose sur nous ?

Ces espèces sentinelles nous informent sur la qualité de l'environnement. Tous ces prédateurs qui sont en haut de la chaîne alimentaire nous donnent une information sur la santé des mers et des océans. Cela dit aussi que l'on peut créer des réserves marines, mais si elles sont à proximité de centres agricoles, même avec des efforts de protection et d'encadrement des activités humaines, il n'en reste pas moins que l'activité humaine via ces pesticides viendra altérer ces actions de protection.

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