OGM : deux instances sanitaires réfutent les conclusions du Pr Séralini
Le Haut Conseil des biotechnologies et l'Agence nationale de sécurité sanitaire ont rendu leur avis aujourd'hui sur cette étude publiée en septembre, qui affirme que des rats nourris au maïs OGM NK603 meurent plus jeunes.
SANTE - Le Haut Conseil des biotechnologies (HCB), une instance indépendante placée auprès du gouvernement, et l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) ont réfuté, lundi 22 octobre, les conclusions de l'étude du Pr Gilles-Eric Séralini sur la toxicité d'un maïs OGM.
Le HCB estime qu'il n'y a "pas de causalité entre les événements observés et la consommation de maïs NK603, traité ou non avec l'herbicide Roundup". L'étude du Pr Séralini assurait que des rats nourris au maïs OGM NK603 (produit par Monsanto) mouraient plus jeunes et souffraient plus souvent de cancers que les autres. De son côté, l'Anses pointe des "faiblesses" dans ces recherches.
Enfin, lundi, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a déploré le refus de Gilles-Eric Séralini de lui fournir des compléments d'information pour finaliser son avis définitif sur ces travaux. Une documentation pourtant "nécessaire pour la seconde phase du processus d'évaluation, qui inclura également les avis des autorités des Etats membres et une étude de l'autorité sanitaire sur le glyphosate", connu sous le nom de Roundup, a rappelé l'EFSA.
Que reproche le HCB à l'étude ?
L'espèce-souche de rats, leur nombre et la publication des données. "Le dispositif expérimental mis en œuvre est inadapté aux objectifs de l'étude", juge le HCB, mandaté par le gouvernement pour examiner l'étude controversée. L'une des principales critiques concerne la souche de rats utilisée pour les besoins du test, dite de Sprague-Dawley. "Cette souche n'est jamais utilisée pour des études de cancérogénèse" car elle développe spontanément des tumeurs, expliquait Gérard Pascal, consultant pour l'industrie et ancien spécialiste des OGM à l'Institut national de la recherche agronomique (Inra), dans un entretien accordé au Monde en septembre.
Les détracteurs de l'étude s'interrogent aussi sur l'absence de certaines données dans le rapport ou sur le faible nombre de rats utilisés.
"Les conclusions d'effets délétères de la consommation de maïs NK603 ne sont pas soutenues par l'analyse des résultats présentés dans l'article", publié dans la revue scientifique Food and Chemical Toxicology le 19 septembre, poursuit le HCB. L'instance estime donc que "cet article ne remet pas en cause les conclusions des évaluations précédentes sur cet OGM".
Quelle est la critique de l'Anses ?
Manque d'études à long terme. Saisie par le gouvernement, l'Anses souligne "le nombre limité de publications traitant des effets potentiels à long terme d'une consommation d'OGM associés à des pesticides". Selon elle, "la faiblesse centrale de l'étude réside dans le fait que les conclusions avancées par les auteurs sont insuffisamment soutenues par les données [qui] ne permettent pas d'établir scientifiquement un lien de cause à effet entre la consommation du maïs OGM et/ou de pesticide et les pathologies constatées".
Cependant, l'Anses note "l'originalité" de l'étude du Pr Séralini "qui aborde un sujet jusqu'ici peu étudié : celui des effets à long terme des OGM associés aux préparations phytopharmaceutiques".
Que répond Gilles-Eric Séralini à ses détracteurs ?
Il soupçonne le HCB de conflit d'intérêts. "Je vis dans une tornade mais je suis serein." Contacté par le Journal du dimanche, lundi, Gilles-Eric Séralini a déjà lancé sa défense. Il attaque à son tour le HCB, qu'il accuse d'être en proie à des conflits d'intérêts : "Ces avis sont formulés par de petits groupes, dont certains membres ont participé à des évaluations ayant conduit à la mise sur le marché de ces produits", comme le pesticide Roundup, mis en cause dans l'étude.
Il assure que son étude est (presque) imparable. Il a recueilli, dit-il, un large soutien dans la "communauté scientifique vraie". "Mon étude est la première au monde à étudier de manière détaillée un OGM et un pesticide, le Roundup, tel qu’il est vendu et non pas un seul de ses composants", ajoute-t-il sur le JDD.fr. Il reconnaît tout au plus que le nombre de rats testés peut encore être amélioré. Mais pas de quoi jeter les résultats de l'étude à la poubelle. "Nous avons fait les meilleurs tests au monde de ce type, c'est-à-dire sur dix rats par groupe", a-t-il expliqué sur RTL, lundi.
Et maintenant ?
Le HCB recommande une nouvelle étude. Le HCB préconise qu'une "étude de long terme, indépendante et contradictoire soit entreprise sous l'égide des pouvoirs publics quant à la sécurité sanitaire du maïs NK603" . Pour faire acte de transparence, l'autorité propose d'ailleurs au Pr Séralini de se joindre aux travaux.
Le gouvernement souhaite une "remise à plat du dispositif européen". Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, a indiqué lundi que l'exécutif voulait revoir le mécanisme "d'évaluation, d'autorisation et de contrôle des OGM et des pesticides". Le ministère ajoute que "le gouvernement retient la proposition formulée par l'Anses de renforcer les études sur les effets à long terme de la consommation des OGM et des pesticides, qui doivent intégrer ces thèmes au niveau national et communautaire".
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