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Face à l'érosion marine, le dilemme des habitants de Noirmoutier

Les grandes marées de ce week-end relancent le débat qui fait rage sur l’île de Noirmoutier depuis que l’Etat a publié son plan de prévention des risques littoraux. Comment se protéger d’un drame comme celui qui a touché La Faute-sur-Mer, il y a cinq ans, sans figer toute nouvelle construction sur l’île ? Les habitants sont partagés. Enquête sur place.
Article rédigé par franceinfo
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  (Noirmoutier © Radio France / Anne-Laure Barral)

Près de la plage de Punta Lara, à l’ouest de Noirmoutier, les tractopelles et les camions s’activent jour et nuit pour construire des épis de rochers afin de ramener le sable sur les plages. De ce côté-là, l’île fait face à la pleine mer et à ses coups de vague. Le prix de ses travaux de renforcement des digues d’un côté de l’ile et de construction d’épis de l’autre a coûté 15 millions d’euros depuis trois ans.

"En 1940, la crête des vagues est passée par-dessus la dune et nous avons eu 50 cm d’eau dans le village ", explique Philbert qui habite sur l’île depuis 80 ans. Mais, aujourd’hui, avec les travaux, il se sent bien mieux protégé. D’autres habitants comme Marie Thérèse Beauchêne, de l’association Vivre l’ile 12 sur 12, doute de l’efficacité de ses travaux. "On voit par endroit les enrochements déjà s’effondrer et les tapis qu’il y a sous les cailloux ressortent déjà ", montre-t-elle a la pointe de la Fosse, située juste sous le pont de Noirmoutier.

A chaque tempête, elle pense à Xynthia

"Moi j’aurai les yeux rivés sur le site de Prévimer pour voir s’il n’y a pas de houle et de dépression annoncée ce week-end ", explique Annik Damour, une autre habitante de l’île. A chaque tempête elle pense à Xynthia et aux victimes de La Faute-sur-Mer. Justement en ce moment les habitants de Noirmoutier sont invités à consulter le plan de prévention des risques littoraux que l'Etat a établi pour eux. Une carte consultable en mairie montre les terrains à risque où il sera difficile voire impossible de construire.

"On n'est pas des fous furieux de la construction mais on doute des études pour déterminer ces zones ", tempête Eric Naulleau, le porte-parole des mécontents de ce plan. Sur le cahier de doléances de la mairie de la Guérinière des propriétaires ont laissé leur commentaire pour dire qu’ils ne comprenaient pas que leur terrain soit zoné à risque et devienne quasiment inconstructible.

Sirène, alertes SMS, cellule de crise

Pour autant aujourd’hui il n’est pas question d’exproprier les habitants de maisons pourtant situées en front de mer. Les élus ne veulent non plus que leur projet soit bloqué, ils n’ont pas oublié que le maire de la Faute-sur-Mer s’est retrouvé dans le box des accusés cette année pour le drame de Xynthia. "Nous avons mis en place un plan communal de sauvegarde avec une sirène, des alertes SMS, et une cellule de crise à la mairie en cas d’avis de tempête ", explique la maire de la Guérinière, Marie France Léculée.

Des digues rehaussées, plus d’alerte, est-ce suffisant pour éviter un drame comme Xynthia ? Yves Le Quellec, de France Nature Environnement ne le croit pas. "L’Etat n’arrive pas à imposer sa vision de la mise à l’abri des personnes. Les élus et les mécontents l’embourbent dans des procédures et des contestations d’expertise, alors que la mer monte ".

La mer a grimpée de plus 3mm par an ces 30 dernières années. Les prévisions des climatologues sont plus inquiétantes. Selon une étude du BRGM les tempêtes des hivers 2013-2014 ont fait reculer les dunes de plusieurs dizaines de mettre sur le littoral atlantique. Perdre la vie à cause de la houle, ou perdre sa maison et son terrain jugés en zone trop dangereuse c’est le dilemme des habitants de Noirmoutier aujourd’hui, où 70% du territoire est situé en dessous du niveau de la mer.

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