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Congrès mondial de la nature à Marseille : "On est en train de perdre toute notre diversité à grande allure", alerte un écologue

A l'occasion de l'ouverture du congrès mondial de la nature vendredi 3 août, Serge Morand, écologue et chercheur au CNRS, juge que "tous les indicateurs" de la biodiversité "se dégradent".  

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Temps de lecture : 3 min
Le congrès mondial de la nature (UICN) ouvre ses portes à Marseille ce vendredi 3 août. (NICOLAS TUCAT / AFP)

Le congrès mondial de la nature (UICN) débute ce vendredi 3 août à Marseille et sera inauguré par Emmanuel Macron en fin de journée. Jusqu'au 10 septembre, ce sont les plus grands spécialistes de l'environnement et de la biodiversité qui se réunissent pour trouver les moyens d'améliorer l'état d'une planète mise à mal par les activités humaines. Selon Serge Morand, écologue, chercheur au CNRS et au CIRAD (Centre de coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement), "on est en train de perdre toute notre diversité à grande allure".

franceinfo : La biodiversité à l'échelle mondiale continue de se dégrader ?

Serge Morand : Elle va très mal, tous les rapports vont dans le même sens. Tous les indicateurs montrent que cela se dégrade. Cela se dégrade aussi au niveau de ce que l'on appelle la diversité bioculturelle, les races animales, les races des plantes que l'on a sélectionnées pendant des millénaires sont en train de disparaître, comme la diversité linguistique. On est en train de perdre toute notre diversité à grande allure.

Pourquoi faut-il une biodiversité riche ?

C'est un support. On s'aperçoit que là où il y a la plus grande diversité, une abondance de populations, une diversité culturelle, c'est dans des pays riches en biodiversité, là où l'on a domestiqué les animaux et les plantes. L'humain est en totale interaction avec cette biodiversité riche. On s'aperçoit que là où on a des impacts forts sur la biodiversité, par la dégradation des habitats, c'est là qu'on a le plus de problèmes sur les sols, le climat et sur la santé avec l'augmentation des épidémies et des maladies infectieuses.

Quand on perd de la biodiversité, on perd des régulations.

Serge Morand, chercheur au CNRS

à franceinfo

La biodiversité, ça veut dire que l'on a des prédateurs qui vont réguler des réservoirs d'agents infectieux ou les moustiques, les tiques. Quand on perd cette biodiversité, on perd cette régulation et on perd la régulation de la transmission des agents pathogènes. Ceux-ci commencent à plus se développer dans des espèces qui aiment bien les changements d'habitat, les rats par exemple. On a une amplification de ces pathogènes qui ne sont plus régulés et viennent en boomerang sur les humains.

Cela fait des années que vous démontrez que les activités humaines bouleversent les écosystèmes. Êtes-vous découragé ?

Je suis un pessimiste de combat. On ne voit pas l'horizon s'éclaircir mais il faut garder le combat. Il se passe quand même quelque chose. Avec ces grandes réunions internationales, ce sont aussi des moments où les politiques se rendent compte des choses avec l'aide des grandes organisations internationales, des grandes ONG. Surtout, je suis assez émerveillé de voir toutes les initiatives locales, territoriales qui se font dans toute la France. Donc là, on a quand même un réel espoir, de réelles avancées parce que finalement il va falloir travailler sur ça, sur des solutions locales basées sur la nature, sur le 'vivre ensemble' mais qui doit s'articuler avec une assistance d'un point de vue international. C'est sur l'échelon des États qu'il va falloir que ça bouge.

On perd beaucoup de choses mais on voit aussi, par exemple en Thaïlande qui a énormément déforesté, qu'on est dans une phase de reforestation communautaire, qui regagne et recrée des conditions. Des espèces ont disparu mais des espèces en danger se retrouvent bien et avec des nouvelles formes de conservation qui associent les communautés. Je pense qu'on a encore le temps d'agir et si on agit sur la biodiversité, on va pouvoir agir très rapidement sur le climat.

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