Benoît XVI : un ardent défenseur de la doctrine catholique
La vie de Joseph Ratzinger était écrite dès le début, à sa
naissance le 16 avril 1927 dans le village haut-bavarois de Marktl, à quelques
encablures seulement de la frontière autrichienne. Après tout, ses parents ne s'appelaient-ils
pas Joseph et Maria ?
Une enfance au cœur de la guerre
La jeunesse de Joseph Aloisius Ratzinger se déroule au
rythme des bouleversements de l'Allemagne des années 30. Dans sa famille,
constituée de ses deux parents, son grand frère et sa grande sœur, la prière
est une valeur fondamentale, tout comme, selon Joseph Ratzinger lui-même, l'hostilité
viscérale du père au nazisme.
Dès 1936, comme tous les petits Allemands, il intègre les
Jeunesses hitlériennes, prémice à son engagement dans la Seconde Guerre
mondiale au sein de la Wehrmacht. Cette période de sa vie est sujette depuis
plusieurs années à de nombreuses polémiques.
Toujours est-il que Joseph Ratzinger, 18 ans, passera six
semaines dans un camp de prisonniers de guerre, jusqu'à sa libération le 19
juin 1945.
L'appel de la religion
Après sa libération, le jeune Joseph Ratzinger se lance dans
une formation de prêtre. Il suit notamment des études de philosophie et de
théologie à l'université de Munich, puis à l'Ecole supérieure de Freising.
Comme les autres étudiants, il se plonge dans l'étude des
grands théologiens. Il développe alors une conception propre de la religion, qu'il
gardera toute sa vie, à partir de l'étude de la Bible et de la liturgie. Il est
ordonné prêtre le 29 juin 1951.
Devenu par la suite docteur en théologie, il sera nommé maître
de conférence à l'université de Munich, puis, de 1959 à 1963, exercera en tant
que professeur de théologie fondamentale à l'université de Bonn. Devenu l'un
des plus jeunes théologiens d'Allemagne, il participe même au concile de
Vatican II, exposant ses vues de réformateur, tout en prônant un retour aux
sources de la religion catholique.
Le cardinal Ratzinger
Après avoir occupé de multiples postes à l'université de Tübingen
ou Ratisbonne, Joseph Ratzinger devient archevêque de Munich et Freising le 24
mars 1977. Trois mois plus tard, il est promu cardinal par Paul VI. Joseph
Ratzinger fait son entrée dans les plus hautes sphères du catholicisme, où il
rencontre un certain Karol Wojtyla, qui deviendra en 1978 le 264ème pape,
Jean-Paul II.
Le 25 novembre 1981, ce dernier le nomme préfet de la
congrégation pour la doctrine de la foi, un poste éminemment important :
il s'agit de promouvoir et de protéger la doctrine. Joseph Ratzinger devient l'une
des figures de la défense de la religion dans toute sa rigueur, proche des plus
conservateurs au sein de l'Eglise, ce qui lui vaut de nombreuses oppositions.
Le 18 mai 2001 ; le cardinal Joseph Ratzinger prend
certainement sa décision la plus importante à la tête de la Congrégation. La
lettre De Delictis Gravioribus , envoyée à tous les évêques, oblige le
signalement des délits les plus graves commis contre les mœurs au sein de l'Eglise.
Parmi ces délits sont clairement pointés les abus sexuels sur les mineurs. En
la matière, Joseph Ratzinger change de "philosophie" ; comme
beaucoup d'autres avant lui, il prônait auparavant une certaine discrétion en
interne.
Beaucoup plus polémique, un an plus tôt, il avait dans une
déclaration affirmé la supériorité du catholicisme sur les autres religions.
Certains le surnomment alors le "Panzercardinal", une expression
qui "raconte" bien son intransigeance et sa rigueur en matière de doctrine de la
foi.
Le pape Benoît XVI
Après avoir passé plus de vingt ans aux côtés de Jean-Paul
II, Joseph Ratzinger est élu pape le 19 avril 2005, sans véritable surprise. Il
choisit son patronyme, Benoît XVI, en filiation avec Benoît XV, pape de 1914 à
1922, engagé contre la Première Guerre mondiale. Il est alors âgé de 78 ans et
devient le pape le plus âgé lors de sa prise de fonctions depuis Clément XII en
1730.
Pour devise, il choisit une parole extraite de la troisième
épître de Saint-Jean :* " Nous devons servir de cette manière, et être
coopérateurs de la vérité "* . Il s'engage à mettre en œuvre le concile
Vatican II.
A lire aussi : les temps forts de son pontificat
Dès le mois suivant son élection, Benoît XVI lance le procès
en béatification de Jean-Paul II, sans attendre le délai de cinq ans prévu
normalement par l'Eglise.
Des prises de position critiquées
Le temps des polémiques ne tarde pas. Dès le début de son
pontificat, Benoît XVI suscite la critique après certaines de ses déclarations.
Le 12 septembre 2006, à l'université de Ratisbonne, il cite l'empereur byzantin
Manuel II Paléologue : " Montre-moi donc ce que Mahomet a apporté de
nouveau, et tu y trouveras seulement des choses mauvaises et inhumaines, comme
son mandat de diffuser par l'épée la foi qu'il prêchait " . Malgré les
tentatives d'apaisement du Vatican, qui affirme que cette citation ne
représente pas les convictions du pape, ses paroles enflamment le monde
musulman.
Autre prise de position qui fait scandale, sur le sida. Le
17 mars 2009, dans un avion en route vers l'Afrique, il affirme qu'on ne peut
résoudre le problème du sida " en distribuant des préservatifs " . Il
ajoute même : " au contraire, ils augmentent le problème " . Pour
le Saint Père, la seule solution face au sida est l'abstinence et la fidélité,
une vision dans la droite lignée de celle de son prédécesseur. Cette phrase
provoque un véritable tollé, notamment chez les associations humanitaires qui
luttent contre l'épidémie en Afrique.
Coulisses et politique
A la fin de l'année 2012, Benoît XVI innove en créant un compte Twitter en plusieurs langues, pour livrer sa vision de la religion.
Le pontificat de Benoît XVI est aussi celui du rapprochement
avec la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X. La communauté suisse n'est plus
reconnue par l'Eglise depuis 1975, et ses quatre évêques nommés sans l'accord
du pape en 1988 ont été excommuniés. Le sujet est sensible dans la religion
catholique. Le 21 janvier 2009, les quatre évêques sont réintégrés. Parmi eux,
le Britannique Richard Williamson, connu pour des propos ouvertement
négationnistes lors d'un entretien à la télévision suédoise. Benoît XVI, à la
suite de ces propos, sera obligé de réaffirmer son opposition totale au
négationnisme et à l'antisémitisme.
L'affaire Vatileaks
Autre affaire révélant les coulisses peu glorieuses du
Vatican : l'affaire "Vatileaks". Des documents rendus publics
en mai 2012 donnent une image peu reluisante des nominations au sein de l'Etat,
entre corruption et clientélisme. Le majordome du pape, Paolo Gabriele, est
accusé d'être à l'origine de ces fuites, arrêté puis gracié par Benoît XVI le
22 décembre dernier.
Benoît XVI, l'un des très rares papes à renoncer à exercer
son pontificat, restera comme un ardent défenseur de la foi et des "valeurs" catholiques. Pour certains, ses prises de position critiquées ont confirmé la
vision rigoriste du personnage. Pour d'autres, il aura su aborder les problèmes
contemporains de l'Eglise, comme les abus sexuels sur mineurs. Reste qu'avec
huit ans de pontificat, il n'aura pas eu le même impact que son prédécesseur
tant admiré, Jean-Paul II.
> la démission annoncée de Benoît XVI : le film de la journée
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