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Barack Obama a dénoncé mardi un "échec inacceptable" des services de sécurité intérieure et du renseignement

Pour le président américain, qui s'exprimait pour la deuxième fois depuis Hawaï où il passe ses vacances, les services de renseignement n'ont su empêcher l'attentat manqué contre le vol Amsterdam-Detroit le jour de Noël.CNN a révélé que la CIA savait que l'auteur de la tentative représentait une menace, mais n'avait pas transmis l'information.
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Barak Obama demande des comptes aux services de renseignement. (F2)

Pour le président américain, qui s'exprimait pour la deuxième fois depuis Hawaï où il passe ses vacances, les services de renseignement n'ont su empêcher l'attentat manqué contre le vol Amsterdam-Detroit le jour de Noël.

CNN a révélé que la CIA savait que l'auteur de la tentative représentait une menace, mais n'avait pas transmis l'information.

Le père d'Omar Farouk Abdulmutallab, le jeune Nigérian accusé d'avoir voulu détruire un avion en vol le 25 décembre, avait alerté sur la radicalisation de son fils à un agent de la CIA, a rapporté mardi la chaîne CNN. Cet agent avait rédigé un rapport sur l'entretien, mais ce document n'est pas remonté jusqu'au siège de l'agence de contre-espionnage américaine, rapporte CNN, citant une source non-identifiée. Résultat: le nom de son fils n'a jamais été placé sur une liste d'interdiction de vol ("no-fly list").

"Lorsque notre gouvernement détient des informations sur un extrémiste connu et que cette information n'est pas partagée et suivie d'action comme cela aurait dû être le cas, de sorte que cet extrémiste embarque dans un avion avec de dangereux explosifs qui auraient pû coûter près de 300 vies, il y a faille dans le système et je considère que c'est totalement inacceptable", a martelé le président américain, dénonçant une combinaison d'"erreurs humaines et systémiques".

"Il faut que nous tirions les leçons de cet événement et que nous agissions pour supprimer les défauts de notre système, parce que notre sécurité et des vies sont en jeu", a insisté Barack Obama.

Le Nigérian avait séjourné au Yémen
Plus tôt mardi, le Yémen avait confirmé que Umar Farouk Abdulmutallab résidait encore à Sanaa quelques jours avant sa tentative d'attentat. Le Nigérian de 23 ans "a séjourné au Yémen entre début août et début décembre, après avoir obtenu un visa pour étudier la langue arabe dans un institut de Sanaa où il avait suivi auparavant des cours", a indiqué la diplomatie yéménite.

Pour mener à bien son projet, quelques minutes avant que l'avion atterrisse à Detroit, le jeune homme a voulu utiliser de la penthrite (PETN), un explosif de la famille de la nitroglycérine, en la mélangeant à un produit contenu dans une seringue. Le Nigérian aurait caché 80 grammes de cette poudre dans une petite poche d'environ 15 cm de long cousue au milieu de son slip, indiquent des clichés obtenus par les médias américains auprès du FBI, la police fédérale. Al-Qaïda dans la Péninsule arabique a revendiqué cet acte lundi, le présentant comme "une réplique directe à l'injuste agression américaine".

Lors de son séjour au Yémen, Umar Farouk Abdulmutallab aurait été entraîné dans le réseau d'Oussama ben Laden, selon les médias américains, qui affirment qu'il a fait ces déclarations au FBI après son arrestation. Ce musulman, fils d'un riche banquier et étudiant brillant, n'avait pourtant rien de suspect selon ses camarades d'un institut de langue arabe qu'il fréquentait à Sanaa. Habitant dans une résidence étudiante, il "ne s'isolait pas. Il côtoyait les filles et se comportait d'une façon normale", a déclaré à l'AFP une étudiante américaine qui a requis l'anonymat.

Obama promet de traquer les "extrémistes violents"
Lundi, Barack Obama avait déjà interrompu ses vacances à Hawaï pour promettre qu'il traquerait sans relâche les "extrémistes violents", d'où qu'ils viennent. "Nous ne baisserons pas les bras tant que nous n'aurons pas trouvé tous ceux qui sont impliqués pour les faire répondre de leurs actes." Le président des Etats-Unis s'exprimait pour la première fois, trois jours après la tentative d'attentat à bord d'un avion à Détroit, revendiquée par Al-Qaïda.

Les Etats-Unis vont "continuer à utiliser tous les éléments en notre pouvoir pour intercepter, détruire et vaincre les extrémistes violents qui nous menacent, qu'ils soient d'Afghanistan, du Pakistan, du Yémen ou de Somalie, ou de partout où ils préparent des attaques contre le sol américain", a assuré Barack Obama sans toutefois nommément mentionner Al-Qaïda.

Peu de temps avant, Al-Qaïda dans la péninsule Arabique (fusion des branches yéménite et saoudienne en janvier 2009, ndlr) avait, dans un communiqué publié sur des sites islamistes, revendiqué l'attentat manqué et expliqué qu'il voulait venger des attaques menées contre lui par les Américains au Yémen. Le groupe a dit avoir fourni au jeune Nigérian interpellé dans l'avion un "engin techniquement perfectionné" mais que cet engin n'a pas explosé en raison d'un problème technique.

Le jeune Nigérian voulait étudier la charia au Yémen
Le jeune Nigérian avait confié à ses parents vouloir étudier la charia (loi coranique) au Yémen. Selon la ministre nigériane de l'Information, Dora Akunyili, Umar Farouk A1bdulmutallab était étudiant à Dubaï lorsqu'il a annoncé à ses parents qu'il se rendait au Yémen pendant quelques semaines pour étudier le droit islamique. Par la suite, il leur avait envoyé un message pour leur dire qu'il comptait finalement rester au Yémen pour sept ans. Il avait coupé les ponts avec sa famille lorsque ses parents lui ont fait savoir qu'il s'opposaient fermement à son séjour yéménite. "C'est alors qu'ils ont signalé son cas aux services de renseignement nigérians."

Umar Farouk Abdulmutallab, un Nigérian de 23 ans, est accusé d'avoir introduit des explosifs à bord d'un vol d'un avion qui se rendait d'Amsterdam à Detroit avec près de 290 personnes à bord et d'avoir tenté de les faire exploser. La tentative de vendredi a fait s'interroger sur les mesures de sécurité à bord des vols, plus de huit ans après les attentats du 11septembre 2001 qui avaient fait près de 3000 morts.

L'influence croissante d'al-Qaïda
Le président Obama "a posé au ministère de la Sécurité intérieure la question très concrète de savoir comment quelqu'un avec quelque chose d'aussi dangereux que de la penthrite a pu monter dans un avion à Amsterdam", avait souligné dimanche le porte-parole de la Maison Blanche Robert Gibbs.

Lundi, la secrétaire américaine à la Sécurité intérieure, Janet Napolitano, a quant à elle dit vouloir savoir comment le suspect avait pu prendre l'avion avec un visa américain alors que son père avait alerté les autorités américaines sur la radicalisation de son fils. Cette question "fera partie du processus" de révision des mesures censées éviter qu'un passager dangereux puisse embarquer pour les Etats-Unis, a-t-elle affirmé, expliquant vouloir revoir le système des listes qui permet aux Etats-Unis d'interdire de vol certains individus.

L'opposition républicaine a critiqué la manière dont Obama a réagi à l'attentat manqué de Noël et elle s'est demandée si son administration agissait suffisamment pour contrer les menaces.

Cette affaire a mis l'accent sur l'influence croissante d'Al-Qaïda au Yémen et sur le rôle de plus en plus important de l'armée et des agences de renseignement américaines dans la lutte contre le groupe. Al-Qaïda s'est fait connaître au Yémen avec l'attaque suicide en octobre 2000 contre le destroyer américain USS Cole dans le port d'Aden. Après de nombreuses opérations dans le pays, le groupe est resté discret entre 2003 et 2007.

Mais le groupe se manifeste de nouveau depuis juillet 2007. Une série d'attaques ont visé des touristes étrangers au Yémen entre juillet 2007 et janvier 2008. En mars 2009 le groupe a également visé l'ambassade américaine à Sanaa, capitale du Yémen. Après ces différentes attaques récentes, la tentative d'attentat sur le vol Amsterdam-Detroit vient confirmer qu'Al-Qaïda s'est renforcé dans la péninsule arabique. Selon un expert militaire de Dubaï, Riad Kahwaji, "l'incident de l'avion américain montre que ce groupe est capable de planifier et de mener des opérations à l'étranger".

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