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"La sécurité s'est améliorée, pas les conditions salariales" : dix ans après, le drame du Rana Plaza au Bangladesh a-t-il fait évoluer la "fast fashion" ?

Le 24 avril 2013, un immeuble d'ateliers de l'industrie textile s'effondrait au Bangladesh, faisant plus de 1130 morts. Une décennie plus tard, la situation des ouvriers semble s'améliorer très lentement.
Article rédigé par Sophie Auvigne
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3min
Les décombres du Rana Plaza, près de Dacca, au Bangladesh, le 26 avril 2013. (MUNIR UZ ZAMAN / AFP)

"J'ai vu sur place que la sécurité s'est améliorée dans les usines qui exportent, parce qu'il y a une pression internationale, mais les conditions salariales, elles, n'ont pas évolué" : Valérie Hayer a voulu voir elle-même la situation des ouvriers. La parlementaire européenne revient de Dacca, au Bangladesh, numéro 2 mondial de l'industrie textile. Il y a dix ans jour pour jour, le 24 avril 2013, avec l'effondrement du Rana Plaza, on découvrait l'origine de nos vêtements, fabriqués dans des conditions indécentes. Plus de 1130 personnes sont mortes, on compte également plus de 2000 blessés parmi les ouvriers du textile.

>> La Commission européenne veut démoder la "fast fashion" en renforçant le recyclage des textiles

"J'ai vu des ouvriers travailler six jours sur sept, huit à dix heures par jour, payés 2,50 dollars par jour, alors que le seuil d'extrême pauvreté est à 3,65 dollars par jour dans une usine pourtant considérée comme modèle au Bangladesh, décrit Valérie Hayer. Cette usine travaillait pour des marques australiennes, américaines, pour H&M, pour La Halle. J'ai rencontré H&M et Zara. Les deux grandes marques m'ont assuré qu'elles payaient au-delà du seuil de pauvreté. Néanmoins, elles n'ont pas voulu me dire combien elles payaient."

"Pourquoi ces vêtements neufs ne sont pas cher ?"

Valérie Hayer propose une taxe aux frontières pour les marques importatrices qui ne respecteraient pas ce niveau de salaire. Les petits prix font d'ailleurs partie du problème pour Fashion Revolution France, une association née de l'émotion du drame du Rana Plaza. "Je me rends compte que, dans les jeunes générations, peu de gens connaissent le Rana Plaza, constate Catherine Dauriac, la présidente de l'association. On fait des masterclasses dans les collèges, les lycées, dans les écoles de mode, les écoles de commerce... Le Rana Plaza, on est encore obligés d'expliquer ce qui s'est passé, pourquoi ce n'est pas admissible."

"Aujourd'hui, c'est surconsommer, acheter des vêtements neufs et ça n'a pas d'importance parce que ce n'est pas cher. Mais pourquoi ce n'est pas cher ? Parce que c'est l'ouvrier qui paye au bout de la chaîne. 80 % de femmes et d'enfants travaillent sur cette chaîne de valeur. Et ça, il faut le répéter."

Catherine Dauriac, présidente de Fashion Revolution France

à franceinfo

La production mondiale n'a pas diminué, avec 100 milliards de vêtements neufs chaque année. Pour fabriquer autrement, la France a été pionnière en 2017 avec la loi sur le devoir de vigilance sur les sous-traitants. "L'idée, c'est de responsabiliser les multinationales pour les impacts sociaux et environnementaux tout au long de leur chaîne de valeur, détaille Nayla Ajaltouni, déléguée générale du collectif Éthique sur l'étiquette. Depuis quelques années, on se concentre sur l'adoption de règles contraignantes comme la loi sur le devoir de vigilance, qui a été une grande avancée après le Rana Plaza en France."

Ces règles pourraient être adoptées au niveau européen avant la fin de l'année, soit une décennie après le drame du Rana Plaza.

Bangladesh : dix ans après l'effondrement du Rana Plaza, les conditions salariales ont-elles évolué ? - Reportage de Sophie Auvigne

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