Une transsexuelle candidate aux législatives aux Philippines, pays ultra-catholique
Geraldine Roman, 49 ans, devenue une femme dans les années 1990, est candidate pour le Parti libéral dans un pays où la religion catholique tient une place prépondérante.
Geraldine Roman assure qu'elle défendra d'abord sa circonscription si elle est élue lundi 9 mai. A 49 ans, cette femme, qui a changé de sexe dans les années 1990, n'est pas une militante acharnée de la cause LGBT. Mais elle sait aussi que l'entrée, pour la première fois, d'une transsexuelle au Congrès des très catholiques Philippines serait un grand pas pour la lutte contre les discriminations.
Candidate du Parti libéral du président sortant Benigno Aquino, Geraldine Roman a de très bonnes chances d'être élue à la Chambre des représentants, notamment du fait de l'enracinement politique de sa famille dans le district de Bataan, à l'ouest de Manille, où elle se présente.
Une révolution dans un pays très conservateur
Cela représenterait une révolution dans un pays à 80% catholique, où l'influence de l'Eglise demeure prépondérante, où divorces, avortements et mariages homosexuels sont illégaux, où aucun homosexuel déclaré n'occupe de poste politique de premier plan.
En 2001, une loi a été votée pour interdire aux transsexuels philippins de changer de nom et de sexe. En 2010, au nom de la morale, la commission électorale a interdit au parti Ang Ladlad, représentant la communauté LGBT, de présenter des candidats. La Cour suprême a cassé cette décision, mais aucun candidat d'Ang Ladlad n'a été élu lors des scrutins de 2010 et 2013.
Ces dernières semaines, pendant sa campagne, Geraldine Roman a essuyé quolibets et insultes. Mais il en faut plus pour l'intimider. "Je n'ai jamais vécu dans le secret", déclare-t-elle après une journée de campagne où on l'a vue envoyer des baisers et chanter une chanson d'amour à des foules curieuses. "J'ai grandi ici. Les gens me connaissent", explique la candidate, dont la mère a occupé trois mandats à la Chambre des représentants. L'identité sexuelle, assure-t-elle, "ne devient un problème que si on ne l'assume pas".
"Pourquoi en serais-je honteuse ?"
Bien sûr, il y a aussi eu dans sa jeunesse les moqueries de ses camarades qui la trouvaient différente. Mais son père, un puissant homme politique aujourd'hui mort, lui a appris à avoir confiance en elle. "Je n'ai fait de mal à personne. Je suis heureuse, pourquoi en serais-je honteuse ?" interroge Geraldine Roman, en couple avec le même homme depuis dix-huit ans.
Titulaire de deux masters, elle maîtrise aussi trois langues européennes (espagnol, français et italien). Elle a un temps travaillé en Espagne comme journaliste pour l'agence EFE, avant de rentrer au pays il y a quatre ans pour s'occuper de son père malade.
En cas de victoire, "[sa] loyauté sera toujours en premier pour le district de Bataan", promet-elle. "Mais qu'une personne comme moi entre au Congrès signifierait que même les transgenres peuvent servir leur pays et ne méritent pas les discriminations", dit-elle. Catholique, Geraldine Roman porte un message simple : "Si Jésus-Christ était en vie aujourd'hui, il n'approuverait pas les discriminations."
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