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Pour sauver le tourisme en Thaïlande, la junte minimise l’impact des attentats

Au total, entre jeudi 11 et vendredi 12 août 2016, onze bombes ont explosé à travers cinq provinces du sud de la Thaïlande, notamment dans les stations balnéaires de Hua Hin et Phuket, faisant quatre morts dans ce pays très touristique. La junte militaire refuse d’y voir la marque des séparatistes malais du sud.
Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
A Hua Hin en Thaïlande, au lendemain des attentats, les plagistes attendent les rares touristes. (AFP)

Le tourisme. Le tourisme comme une obsession. A Hua Hin, au lendemain du double attentat qui a fait deux morts, on s’inquiète des conséquences pour la station balnéaire. Interrogé par l’AFP, un propriétaire de restaurant croit voir les premiers signes de la peur des touristes étrangers. «Ce matin, il y a moins de monde pour le petit-déjeuner. Je pense qu’ils sont tous partis. J’ai peur que l’activité ralentisse.»
 
Car le tourisme est le poumon de l’économie. Vital. La Thaïlande a compté 30 millions de visiteurs en 2015. Le secteur représente plus de 10% de l’économie thaïlandaise. Aux yeux d’Anthony Davis, un expert des questions de sécurité interrogé par l’AFP, «toute l’opération visait une chose: l’économie du tourisme.». Alors pour faire bonne figure, la junte minimise les incidents. Pourtant il y a un an à Bangkok, un attentat, déjà, tuait 20 personnes, dont de nombreux touristes chinois. L'enquête est au point mort.
 
Un Français, qui vit en Thaïlande, nous confirme que la junte militaire fait tout, une nouvelle fois, pour dédramatiser la situation. Ainsi, sur l’île de Ko Samui dans le golfe de Thaïlande, il n’y a pas de patrouille de la police ou de l’armée. Tout est calme. Pourtant en avril 2015, une bombe explosait dans le centre commercial principal de l’île. Cette fois encore, il s’agit «d’endormir» les touristes, nous explique notre compatriote. Inutile de faire monter la tension en renforçant les contrôles, et prendre le risque de voir partir les vacanciers.
 
«Un réseau»
Nageant en plein paradoxe, le chef-adjoint de la police nationale a reconnu devant la presse que les onze bombes qui ont explosé en deux jours «sont toutes liées». «C’est l’œuvre d’un réseau», a-t-il insisté tout en écartant une attaque terroriste ou une action des séparatistes de l’extrême sud du pays. Les enquêteurs parlent d’un «sabotage local» sans donner de piste.

Des attaques en série 
En niant toute responsabilité aux séparatistes, la junte veut ainsi minimiser leur influence et l’existence d’un problème dans les régions du sud. Or, Le conflit avec les séparatistes malais musulmans s’éternise. Et depuis 2004, la violence a considérablement augmenté. Près de 6000 personnes ont trouvé la mort.
Ainsi, les provinces frontalières du sud (Narathiwat, Yala, Pattani) ont connu 50 attaques à la bombe dans les dix premiers jours d’août 2016. Il s’agissait clairement d’appeler au boycott du référendum lancé par la junte militaire au pouvoir.
 
Mais les insurgés ont déjà par le passé mené des actions sur des zones touristiques. Et, comme le fait remarquer sur Tweeter Jonathan Head, le correspondant de la BBC pour le Sud-Est asiatique, qui d’autre pourrait mener une opération de cette envergure ?


Cette série d'attentats, très spectaculaire en pleine saison touristique, pourrait aussi être stratégique pour les séparatistes malais. C'est une bonne occasion pour faire connaitre leurs revendications sur la scène internationale.

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