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Aux Maldives, une île poubelle gâche la carte postale

Les Maldives. Ce paradis touristique, avec ses lagons turquoises et ses eaux transparentes baignant une myriade d’îlots ourlés de sable blanc, abrite une bombe à retardement. Derrière la carte postale, l’île de Thilafushi concentre les ordures des touristes et des habitants du pays.
Article rédigé par Pierre Magnan
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
Maldives, septembre 2013. Au marge de l'île capitale de Malé, de la fumée s'échappe de l'île poubelle de Thilafushi. (ROBERTO SCHMIDT / AFP)

L'île de Thilafushi, à une demi-heure en bateau de la capitale Malé, est entourée comme ses voisines d'eaux cristallines et de sable blanc, qui ont rendu célèbre l'archipel comme destination privilégiée pour les voyages de noces des touristes les plus fortunés.  Mais aucun vacancier n'y met les pieds et aucun n'imagine que la fumée qui s'en échappe provient des ordures accumulées par les touristes et les autochtones.

 
Cette île, autrefois paradisiaque comme les autres, a été transformée en décharge en 1992. «Longue de 7 kilomètres sur 200 mètres de largeur, Thilafushi est aujourd'hui davantage connue sous le nom de "Rubbish Island", autrement dit l'île-poubelle. Et s'étend de près d'un mètre carré par jour, soit par extensions cimentées construites par les industriels locaux, soit par dépôts sauvages des déchets dans les eaux peu profondes du lagon», raconte le site Novethic.

«Des bouteilles de bière ─ boisson interdite aux musulmans de l'archipel, mais largement proposée aux touristes ─ s'accumulent noircies à côté de piles de formulaires pour des transferts par bateau. Non loin, un masque de plongée attire l'attention au milieu d'un tas de cartons de jus de fruits, de sacs en plastique et de légumes avariés», raconte Adam Plowright, journaliste à l’AFP. 


Sur cette île poubelle, des employés, souvent venus du Benglagesh, mettent le feu au détritus, sans discernement. «Avant, nous séparions le papier du carton mais l'entreprise n'en a plus les  moyens», explique le gérant du site, Islam Uddin, en poste dans la décharge depuis 16 ans. Il déplore la négligence des gouvernements successifs et regrette que la privatisation conclue en 2008 avec un groupe de gestion de déchets indo-allemand n'a eu comme résultat que de créer des soubresauts politiques.

Seules les bouteilles en plastiques, les moteurs à essence, les métaux et  les papiers sont triés et envoyés en Inde, ce qui constitue le plus gros volume d'exportation des Maldives vers son voisin. Tout le reste, dont les déchets électroniques et les piles, part en fumée, et l'incinérateur haute technologie promis lors de la privatisation reste une chimère.
 
«Les piles contiennent du plomb. Il y a également des produits avec du mercure. Tout cela peut facilement se retrouver dans la chaîne alimentaire», dénonce Ali Rilwan, un militant de l'ONG écologiste locale, Bluepeace Maldives. Tandis qu'il parle, des vagues viennent lécher le bord de la déchetterie qui s'étend vers la mer, mais également en hauteur, formant l'un des points culminants de l'archipel. «La pollution est patente. Des éléments toxiques (plomb, cadmium, mercure, amiante) se mêlent aux rebuts de ferraille et contaminent la faune et la flore de l’océan. Les coraux en pâtissent. Les crustacés aussi», note un blog de Courrier International

Le tourisme est en grande partie responsable de cette pollution. Selon les chiffres du gouvernement, chaque visiteur génère 7,2 kilos de déchet par jour, contre 2,8 pour les habitants de Male. Et les touristes ─ environ un million par an ─ sont trois fois plus nombreux que les habitants de l'île. 

Maldives, la carte postale : Lhaviyani Atoll, Kanuhura Hotel  (LESLIE WEST / PHOTONONSTOP/AFP)

Les Maldives, pays phare dans la prise de conscience du réchauffement climatique au niveau de la planète, peinent à échafauder la moindre stratégie ou vision pour enrayer son propre problème de pollution.

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