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Arnaque au crédit carbone : le contrôle international en question

Le marché du carbone, né avec le protocole de Kyoto pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, a été perverti affirme un rapport scientifique. «Une faille dans le système a permis la vente de crédits carbone sans que cela ne débouche sur de véritables réductions d’émissions de Co² ». Un manque de contrôle international inquiétant à la veille de la Conférence de Paris sur le climat.
Article rédigé par Michel Lachkar
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Des étudiants chinois manifestent pour la ratification du protocole de Kyoto (février 2005) (Reuters photographer)

 
Un détournement des mécanismes prévus par le protocole de Kyoto, à augmenté de 600 millions de tonnes les émissions de CO² entre 2008 et 2013, affirme une étude du Stockholm Environment Institute publié le 24 août 2015.
 
Le Protocole de Kyoto, entré en vigueur en 2005, intègre un mécanisme d’échange de crédit carbone visant à optimiser la réduction des gaz à effet de serre à l’échelle mondiale. Une industrie polluante peut financer un projet de réduction de CO² à moindre coût, dans un autre pays.
Ce principe, aurait dû réduire les émissions de dioxyde de carbone de 872 millions de tonnes entre 2008 et 2013. Mais «les trois quarts de ces crédits ne correspondent pas à de véritables réductions», estime le Carbon Market Watch, un organisme d’observation du marché du Carbone.
 
Selon les chercheurs du Stockholm Environment Institue, Lambert Schneider et Anja Kollmuss «la Russie et l’Ukraine signataires du protocole de Kyoto ont été les deux principaux contrevenants». Ce mécanisme dénommé «Mise en œuvre conjointe » accorde des crédits carbones lorsqu’un pays diminue ou incinère les gaz de ses industries. Mais une faille dans le système à crée «un effet pervers» : produire et incinérer davantage de gaz, afin de gagner plus de crédits.
Selon le rapport  suédois «Les pays hôtes (qui accueillent ces investissements, Russie et Ukraine en tête ndlr) peuvent largement établir leur propre règles pour approuver les projets et émettre des crédits carbones, sans contrôle international».
 

Affiche de la conférence des Nations Unies sur le climat (Paris 2015) (AFP/ jacques Demarthon)

Ces dérives concernent également, mais dans une moindre mesure le mécanisme de développement propre, destiné aux pays du Sud (non signataires du protocole de Kyoto). En dix ans, 4500 projets de ce type ont été financés dans les pays en développement. Avec la Chine et l’Inde comme principaux bénéficiaires. Pourtant dès 2008, le coordinateur du programme Energie de l’Ong Enda Jean-Philippe Thomas qualifiait de «bidon,  20% des projets financés en Inde».
 
De même, certains industriels y voient un marché juteux. On s’est rendu compte qu’en Chine de usines avaient été construites avec pour seul objectif de bénéficier de crédits carbones, explique l’économiste Christian de Perthuis dans le journal le Monde.
 
 En Afrique, certains projets financés, ont été détournés, faute d’évaluation et de contrôle efficient. Cependant pour la Banque Mondiale  ses dérives seraient marginales et ne doivent pas cacher l’efficacité de ce mécanisme.
 
Le rapport du Stockholm Environment Institute dérange à quelques semaines de la conférence des Nations Unies sur le Climat (COP 21). Sans une véritable surveillance internationale, ces crédits carbones risquent de continuer à ne pas correspondre à de véritables réductions d’émissions.
 
«Il existe un risque considérable que les mêmes erreurs soient répétées dans le nouveau traité international qui sera adopté en décembre à Paris» affirme le chercheur Lambert Schneider. «C’est un des enjeux de la conférence de Paris, mais certains pays ne veulent pas entendre parler de contrôles.».
 
 
 
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