Colombie : Santos réélu, le dialogue avec les FARC peut continuer
Dans le quotidien colombien El Espectador, Pablo Catatumbo, un des délégués des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC, 8000 combattants) participant aux négociations de paix, a estimé le 22 juin que cette réélection démontre la volonté du peuple de trouver une «solution politique au conflit» armé. Et d’ajouter que cela «implique une obligation pour toutes les parties présentes à la table des négociations». Notamment celle de la guérilla qui veut «assumer de manière responsable ses engagements», vis-à-vis des victimes du conflit, par exemple.
Ces négociations concernent également l'Armée de libération nationale (ELN, 2500 guérilleros), autre mouvement d'extrême gauche avec lequel Juan Manuel Santos entretient depuis 2013 des contacts secrets, selon des déclarations faites début juin.
Soutien indéfectible des Américains
En visite à Bogota juste après les résultats de la présidentielle, le vice-président américain Joe Biden, a soutenu au nom des Etats-Unis Juan Manuel Santos et les pourparlers de paix : «Il y a encore beaucoup à faire, mais j'ai une confiance absolue dans votre détermination. Je suis sûr que quel que soit le résultat, il sera bénéfique pour le peuple colombien.»
Cette intervention montre combien Washington et Bogota, son principal allié en Amérique latine, sont liés. Un lien renforcé par les aides américaines, notamment militaires, qui ont permis aux Colombiens de lutter contre les guérillas ou le trafic de drogue : quelque 8 milliards de dollars alloués depuis 2000.
Le président colombien, qui a connu une baisse de popularité à la fin de son précédent mandat et a fait face à de nombreux mouvements sociaux (14 millions de Colombiens sur 47 vivent dans la pauvreté), a assuré que ce soutien des Etats-Unis était d'une «immense importance» pour le processus de paix.
Santos devra jouer fin
Le processus de paix est donc sauvé. De justesse. Réélu avec 50,9% des voix devant Oscar Ivan Zuluaga (arrivé en tête du premier tour, le 25 mai, avec 29,2% des voix), José Manuel Santos va pouvoir continuer sa politique d’ouverture vis-à-vis de la guérilla.
En cas de victoire du camp adverse et du favori de l'ancien président de droite Alvaro Uribe, les choses se seraient sans doute passées différemment : Oscar Ivan Zuluaga, qui s’est positionné durant la campagne électorale comme son mentor (un partisan de la fermeté vis-vis des groupes armés), est en effet le pourfendeur des pourparlers de paix.
Cela dit, la marge de manœuvre de Santos sera étroite, tant le soutien de la population à sa politique est ténu. Et tant l’ancien président Alvaro Uribe, toujours populaire pour avoir livré une guerre totale à la guérilla entre 2002 et 2010, est influent.
Uribe reste en effet l’observateur intransigeant des négociations de Cuba. Aidé en cela par le scepticisme d’une grande partie des Colombiens. Beaucoup n’acceptent pas que des guérilleros accusés de crimes contre l'humanité puissent bénéficier d'une amnistie ou se reconvertissent dans la politique.
Cuba : trois points sur cinq réglés partiellement
L'élection présidentielle a pris, on le voit bien, des allures de référendum sur le bien-fondé des discussions pour mettre fin à une guerre civile dont le bilan s'élève à 200.000 morts et à plus de cinq millions de déplacés en 50 ans.
Quoi qu’il en soit, à Cuba, des avancées ont eu lieu sur la réforme agraire, la participation des rebelles à la vie politique colombienne et la lutte contre la production et le trafic de drogue. Reste deux points essentiels qu’il faudra résoudre : trouver un terrain d'entente sur l'indemnisation des victimes et sur la sortie du conflit avec la question du désarmement.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.