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Antonio Veciana, l’espion cubain de la CIA qui tentait d'assassiner Fidel Castro

Un ancien espion de la CIA d'origine cubaine a dédié sa vie à tenter d'assassiner Fidel Castro et à déstabiliser le régime communiste. Antonio Veciana affirme aujourd'hui que cette vie fut une «histoire d'échecs» même s'il ne regrette rien.
Article rédigé par Catherine Le Brech
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
  ( AFP PHOTO/Adalberto ROQUE)

«J'étais un improbable terroriste, j'étais maigrichon, asthmatique et rongé par l'incertitude», raconte Antonio Veciana dans son livre «Trained to Kill» (Formé pour tuer) co-écrit avec le journaliste Carlos Harrison. L'ancien espion âgé aujourd'hui de 88 ans, assis à côté de son déambulateur dans le salon de sa fille à Miami, s'explique: «Ce que j'ai fait c'est ce que les terroristes font. C'est juste que ce n'était pas appelé comme tel». Le livre narre dans le détail comment l'agent de la CIA David Atlee Phillips – connu sous l'alias "Bishop" (évêque) – l'a recruté en 1959 et l'a formé à La Havane dans le but de tuer Fidel Castro, mort l'an dernier de causes naturelles. «Bishop m'a invité à déjeuner. C'était facile, il n'avait pas besoin de me convaincre des dangers du communisme à Cuba».
 
Fidel Castro (Photo Prensa Latina / Reuters)

Propager des rumeurs
Comptable à la Banque nationale de Cuba, Antonio Veciana a appris à se rendre invisible, à comploter, à ne plus avoir de scrupules et à se méfier. «Au départ l'idée était de déstabiliser» le régime, explique-t-il. «Dans les pays qui sont déstabilisés, les gens croient aux rumeurs. C'était mon boulot: lancer ces rumeurs». La première d'entre elles fut un projet de loi qui prévoyait que le gouvernement cubain enlève aux parents la garde légale de leurs enfants.

 
Cette fausse information a permis l'envoi, par leurs parents, de quelque 14.000 enfants aux Etats-Unis dans un exode connu sous le nom d'«Opération Peter Pan».
«Beaucoup de parents ont ensuite revu leurs enfants, mais d'autres n'ont pas pu les revoir parce qu'ils sont morts ou parce qu'ils ne pouvaient pas quitter le pays», note l’ancien espion, qui dit ne pas regretter d'avoir séparé ces enfants de leurs parents.
 
De 1960 à 1962, les parents déposaient leurs enfants dans des locaux de l'Eglise catholique. Ces mineurs non accompagnés étaient ensuite accueillis dans des camps en Floride.
Des cubains tentent de rejoindre la Floride (US COAST GUARD / AFP)

Alpha 66, groupe paramilitaire
Antonio Veciana a fui aux Etats-Unis en 1961 après une attaque ratée contre Castro qui aurait facilement mené les autorités cubaines jusqu'à lui. Quand il a été contacté par Bishop à Miami, l’espion cubain  a fondé un groupe paramilitaire anti-Castro nommé «Alpha 66» qui, pendant les années 60 et 70, a mené des attaques de type commando contre le régime castriste. «Ces attaques nourrissaient l'espoir, et quand la presse en parlait c'était l'euphorie, les gens avaient encore l'espoir de pouvoir gagner la bataille», dit-il tout en reconnaissant que les succès et l'ampleur des attaques étaient «toujours exagérés».
 
Comme beaucoup de Cubano-Américains de son âge, Antonio Veciana en veut au président John F. Kennedy qu'il accuse d'avoir trahi les exilés cubains en retirant l'armée américaine de l'opération anti-castriste de la Baie des cochons à Cuba en 1961, qui fut un échec.

Trinidad de Cuba : représentation de Che Guevara sur le mur d'une école. (Alberto Diaz Guttierez alias Korda)

Discréditer Ernesto «Che» Guevara
Une dernière tentative de tuer Castro à Santiago du Chili a échoué et Antonio Veciana a abandonné des années plus tard toute tentative d'attenter à la vie du dirigeant cubain. Il a aussi mis fin à ses actions pour discréditer Ernesto « Che» Guevara après sa mort en 1967 en Bolivie. Le révolutionnaire argentin est devenu à l'inverse une icône de la gauche.
«J'essaie vraiment de ne pas trop y penser, parce mon histoire est une histoire d'échecs. Quand vous échouez par différentes circonstances vous pensez que vous n'avez pas fait la bonne chose, mais surtout vous vous sentez comme un raté.»
 
En 1979, après avoir plusieurs fois tenté de se suicider, Veciana a finalement jeté l'éponge de l'espionnage et du métier de tueur à gages. La dernière phrase de son livre : «Ma vie secrète est finie.»

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