Cet article date de plus de neuf ans.

Tunisie: la styliste Mouna Ben Braham dévoile ses créations

Rien n’arrête les Tunisiennes. On trouve ainsi des femmes stylistes qui rêvent de conquérir les marchés internationaux de la haute couture. Et qui ne voient pas en quoi l’islam pourrait être un problème pour leur profession. C’est notamment le cas de Mouna Ben Braham, qui fait du «traditionnel revisité». Portrait.
Article rédigé par Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Mouna Ben Braham en plein travail dans son atelier à Tunis le 23 juin 2015. Elle montre ici un gilet rouge. Lequel reprend un modèle que possédait sa grand-mère. (FTV)

«La Tunisienne est très indépendante et très émancipée. Elle sait ce qu’elle veut. Elle a son salaire. Elle conduit sa voiture. Et elle s’habille très bien», explique Mouna Ben Braham, 35 ans. Elle exerce aussi de multiples professions. Comme celle de créatrice de mode.
 
En ce qui la concerne, la jeune femme a commencé très tôt. Adolescente, elle préférait déjà dessiner des modèles plutôt que d’aller en cours d’anglais au lycée… Elle n’en réussit pas moins son bac avant d’intégrer l’école ESMOD à Tunis. Elle part un an à Paris pour travailler chez la créatrice Chantal Thomass. Puis elle revient à Tunis où elle est embauchée successivement par la marque de prêt-à-porter Sasio et par Lee Cooper. «Pour autant, je ne m’éclatais pas. Ce que je faisais, ce n’était pas moi», se souvient-elle.
 
Début 2008, elle décide de se lancer dans la création en s’associant avec la mère de sa meilleure amie, une Italienne. Elle se met à fabriquer des robes du soir, de mariée, pour cocktail… «Aujourd’hui, je fais du traditionnel tunisien revisité. Ce qui m’a amenée à fouiner dans des vieux livres, dans les brocantes, à discuter avec d’anciennes brodeuses», raconte Mouna.
 
La tradition, oui. Mais pas trop. «Aujourd’hui, on peut ainsi trouver des robes de mariée faites avec de très belles choses. Mais réunies, toutes ces belles choses ne donnent rien», estime-t-elle. Aussi entend-elle jouer sur les couleurs et les matières premières modernes. Mais qu’elle n’hésitera pas à associer à des modèles très anciens. «Cela ne m’empêche pas de faire des robes super-modernes à la Dior ou à la Channel.»

Mouna Ben Braham avec une robe... «à la Marie-Antoinette».  (FTV)

Cols Mao
Désormais, elle dirige un atelier qui emploie six brodeuses et couturières, sans parler de la sous-traitance. La jeune chef d’entreprise doit affronter la crise qui touche son pays. «Les gens ne se marient plus comme dans le passé. Avant, on faisait beaucoup la fête. Cela pouvait durer une semaine. Et les femmes avaient une robe pour chaque jour. Maintenant, il n'y a plus que la soirée à la mairie avec une soirée», observe-t-elle. 
 
Dans le même temps, son activité n’est-elle pas impactée par la montée de l’intégrisme religieux? «Cela ne m’a jamais gênée», répond la styliste. «Je peux parfaitement recevoir des femmes voilées. Elles demanderont par exemple des manches longues, avec des cols Mao sans décolletés. Mais elles porteront aussi des robes brodées en mousseline. Pour elles, la mode du caftan, c’est du pur bonheur. Et puis, il faut voir que ces femmes peuvent être très sympas. Et parfois, elles s’habillent beaucoup mieux que celles qui ne portent pas le voile!»
 
Et l’avenir dans tout ça? Mouna Ben Braham rêve de conquérir le marché international. Elle a d’ailleurs déjà présenté des créations à la Joyce Gallery au Palais Royal à Paris du 10 au 16 juin 2015 dans le cadre de l’After Fashion Week Tunis 2015. Et de conclure : «On ne peut pas rester petit éternellement. Il faut savoir aller voir ailleurs.»

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.